Les institutions européennes à Bruxelles pourraient apprendre des publicitaires et mieux promouvoir les avantages de l’adhésion à l’UE vis-à-vis des citoyens, affirme Gary Leih, PDG de Ogilvy UK et président de l’Association européenne des agences de communication (EACA) dans un entretien à EURACTIV.
Marketing social
M. Leih convient que les médias et les ONG surveillent de plus en plus les messages que les entreprises envoient. « Il y a là un yin yang naturel : si vous revendiquez la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) mais qu’en réalité vous ne jouez pas le jeu, je pense que les conséquences pourraient être catastrophique pour votre image ».
M. Leih s’exprimait en marge de la cérémonie des EACA Care Awards qui récompensait les campagnes qui encouragent la responsabilité sociale en faveur de la population, des ressources et de l’environnement.
Si les entreprises transmettent des « messages erronés ou incertains » au travers de leurs campagnes publicitaires, les consommateurs ont désormais un meilleur accès aux médias en ligne et peuvent rapidement découvrir la vérité derrière le message, affirme M. Leih, faisant allusion à une citation que David Ogilvy a prononcé il y a près de 50 ans : « The consumer is not a moron, she’s your wife » (le consommateur n’est pas un idiot, c’est votre femme).
L’échec des campagnes publicitaires européennes
Quant à savoir si l’UE pourrait en tirer des leçons suite au rejet du traité de Lisbonne lors du référendum en Irlande, M. Leih estime que l’Union a des difficultés à transmettre ses messages. Ses campagnes actuelles, selon lui, ne sont pas « suffisamment ambitieuses et audacieuses pour faire la différence ».
Il pense que la publicité a un rôle important à jouer pour promouvoir les messages de l’UE auprès des citoyens. « Selon moi, l’essentiel est que si vous faite quelque chose qui est dans l’intérêt de la communauté, vous pouvez parler des choses positives que vous faites et je pense que c’est le rôle des campagnes publicitaires européennes. Je ne peux pas affirmer ce que les gens savent des activités de l’UE, honnêtement ».
M. Leih critique la façon dont la Commission soumet les appels à propositions pour sa campagne, estimant qu’il est « pratiquement impossible pour les agences publicitaires ordinaires » de remporter ces appels. « Les projets invariablement reviennent au même groupe de spécialistes de l’Europe », a déclaré M. Leih, ajoutant : « je ne suis pas certain qu’ils trouvent les bons partenaires pour les aider à obtenir ce qu’ils veulent ».
Dominic Lyle, le directeur général de l’EACA, estime que les agences publicitaires recrutées par le processus d’appel à propositions ne sont pas « suffisamment courageuses pour affronter la mentalité générale ». D’après lui, le processus actuel d’appel à propositions est « frustrant » à cause de la quantité de bureaucratie impliquée, et « inefficace » dans la mesure où l’UE ne souhaite pas s’écarter de la publicité traditionnelle. « C’est le problème avec la publicité institutionnalisée : c’est sûr, c’est ennuyeux et c’est stimulant d’un point de vue politique », a-t-il expliqué.
Malgré la multitude de législations publiées par Bruxelles, M. Leih estime que l’UE ne sait pas comment en vendre l’aspect positif. « C’est notre job », a-t-il déclaré, « et ils devraient davantage s’adresser à nous sur la façon de gérer ce genre de choses ».
(Auto) régulation
M. Leih admet qu’il y a un changement important dans le paysage médiatique qui passe des sources traditionnelles (presse écrite, radio, télévision) à l’ère du numérique en ligne. Le monde en ligne ne devrait « en aucun cas » être régulé et toute tentative en ce sens serait extrêmement difficile. « Vous pouvez aller voir les fournisseurs d’hébergement et leur dire de fermer leurs sites Internet, mais d’ici là cinq, dix, voire 50 millions de personnes pourraient avoir déjà visité le site ».
En commentant la récente proposition de la Commission concernant l’autorégulation du secteur de la publicité et du secteur alimentaire, M. Leih pense que la décision de l’exécutif européen était « sage » dans la mesure où elle accordait « du temps au secteur de la publicité pour qu’il améliore ses performances plutôt que d’imposer des législations draconiennes d’un jour à l’autre ».