Armée, inflation, sobriété, « Uber Files » : les grands points de l’interview du 14 juillet d’Emmanuel Macron

Emmanuel Macron lors du traditionnel défilé du 14 juillet. [MOHAMMED BADRA/EPA]

Lors de sa première interview télévisée depuis les élections législatives jeudi (14 juillet), Emmanuel Macron a fait le point sur de nombreux sujets brûlants, alors que l’Ukraine s’enlise dans la guerre et que la hausse des prix frappe aux porte-monnaies des français.

Alors que le défilé du 14 juillet a mis à l’honneur l’armée française, « force d’âme d’une nation », Emmanuel Macron a commencé son allocation en annonçant vouloir « réinvestir dans tous [les] stocks et [les] capacités militaires, ainsi que de continuer à former et embaucher » afin de mieux faire face aux « guerres de haute intensité ».

« Ceux qui ont dit que les guerres de haute intensité n’existeraient plus ont eu tort », a-t-il argué, en soulignant l’engagement français auprès des troupes ukrainiennes face à l’envahisseur russe. Il a en revanche réitéré sa volonté de ne pas s’engager directement dans le conflit : « on veut stopper la guerre sans faire la guerre ».

C’est dans cette logique qu’il a annoncé une « réévaluation » de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 – annonce confirmée par le ministre des Armées Sébastien Lecornu lors d’une audition à la commission de la défense de l’Assemblée nationale la semaine dernière.

Lors de la traditionnelle réception donnée par le ministre des Armées la veille de la fête nationale mercredi (13 juillet), le président a par ailleurs demandé à M. Lecornu des « propositions concrètes » pour une nouvelle LPM, qui courra jusqu’à 2030. Celle-ci devrait être débattue au Parlement « début 2023 ».

Elle devra notamment se pencher sur trois volets prioritaires que sont le cyber, le maritime et l’espace – alors que la France, en plus de son flanc est, combat aussi au Sahel.

Le budget de la défense, à 39,3 milliards d’euros en 2021, va croître à 41 milliards d’euros en 2022, pour atteindre 50 milliards en 2025 — soit 2 % du PIB de la France.

Emmanuel Macron : il faut une défense européenne « beaucoup plus forte »

Le président français Emmanuel Macron a annoncé vouloir «  renforcer une industrie de défense européenne  » plutôt que de «  dépenser beaucoup pour acheter ailleurs  », à l’occasion du salon international de défense Eurosatory lundi (13 juin).

L’inflation au cœur des préoccupations majeures des Français

Au cours de son interview, le président a également évoqué un autre sujet de préoccupation qu’est l’inflation – alors que les prix en juin sont en hausse de 6,5 % en France par rapport à juin 2021, selon une note de l’office statistique de l’UE Eurostat.

Le chef de l’Etat a déclaré vouloir aider les Français et leur pouvoir d’achat en mobilisant de « grands groupes de transporteurs ». 

« De manière très claire, nos grands transporteurs de fret, on va les mettre autour de la table – on a déjà commencé – pour nous aider à baisser des prix et même à réparer une partie des hausses sur des matières premières et l’alimentation pour nos consommateurs et en particulier pour nos outre-mer », a-t-il détaillé. 

Quant aux aides pécuniaires directes, elles seront conditionnées aux revenus des ménages – une annonce d’autant plus importante que Bruno Le Maire a annoncé la semaine dernière que le « bouclier tarifaire » ne serait pas renouvelé en 2023.

L’inflation est intrinsèquement liée à l’explosion des prix de l’énergie, alors que la Russie menace de couper les exportations de gaz vers l’Europe occidentale – une hypothèse « probable » pour le chef de l’Etat.

C’est dans ce cadre qu’Emmanuel Macron a annoncé la préparation d’un plan de sobriété afin de réduire les consommations françaises d’énergie dans les prochains mois.

« Je vais demander dès à présent aux administrations publiques et à toutes les entreprises qui le peuvent que l’on se mette en situation de consommer moins. On va construire un plan et on va essayer de faire attention à l’éclairage le soir. On va faire un plan de sobriété et de délestage : on doit rentrer collectivement dans une logique de sobriété. »

Cette annonce n’a pas manqué de faire réagir les écologistes, qui prônent une politique de sobriété depuis longtemps : « Quand les député-es écologistes proposent des mesures de sobriété, embargo sur le gaz russe, développement des transports en commun, rénovation massive des logements… C’est toujours refusé » a tweeté Julien Bayou, Secrétaire national d’Europe Ecologie les Verts (EELV).

Le pouvoir d’achat s’installe au cœur des débats européens

La lourde question de la hausse des prix s’impose dans le débat public français, alors que l’urgence sociale est au plus haut. Le gouvernement tente de faire face en soutenant la croissance par la consommation, au risque de faire exploser les niveaux de dépenses publiques.

Enfin, le sujet hautement inflammable des retraites a été abordé. Emmanuel Macron s’est montré ferme, assurant qu’il irait jusqu’au bout de la retraite à 65 ans et ce « dès l’été 2023 ».

Sans donner plus de détails, M. Macron a déclaré vouloir « bâtir des compromis responsables », en engageant des discussions dès la rentrée, notamment avec les « forces syndicales et patronales ».

« On doit travailler plus et plus longtemps », a-t-il dit, avant d’ajouter : « On travaille moins longtemps que nos voisins. » Une nouvelle réforme du marché du travail devrait, dans cette veine, aussi voir le jour à la rentrée.

« L’esprit de responsabilité des oppositions » à l’épreuve

C’est un président affaibli politiquement qui prenait la parole face aux deux journalistes – deux femmes, une première pour un tel exercice – alors que sa majorité à l’Assemblée nationale n’est que relative et que les révélations « Uber Files » posent la question de son intégrité vis-à-vis de lobbies américains lorsqu’il était ministre.

Au sujet d’Uber, M. Macron « ne regrette rien ». « Je défendais cette ouverture de marché [face au monopole des taxis] et je la défendrai demain », se félicitant du travail fait depuis la loi « Sapin II » de 2016 pour la transparence de la vie publique.

Quant à l’instabilité parlementaire du moment, « avez-vous peur de passer un quinquennat à voir vos projets retoqués ? », lui a demandé l’une des journalistes, en référence au projet de loi sanitaire dont l’article 2, qui concerne l’instauration d’un passe sanitaire entre la France métropolitaine, la Corse et les Outre-mer, a été rejeté par les oppositions parlementaires. 

 « Non », a répondu Emmanuel Macron, qui a évoqué « un coup de chaud nocturne » et une alliance « baroque » de la NUPES, des Républicains et du Rassemblement National. Et de conclure : « Je crois en l’esprit de responsabilité des oppositions ». Chiche.

Projet de loi sanitaire : le gouvernement mis en échec par les députés

C’est le premier échec du gouvernement. Le nouveau projet de loi sanitaire, discuté à l’Assemblée nationale depuis lundi, n’a été que partiellement adopté par les députés dans la nuit de mardi à mercredi.

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