L’eurodéputée Angélique Delahaye dénonce le jugement du tribunal de Lyon qui a remis en cause l’autorisation du RoundUp Pro 360. Elle appelle à plus d’investissement dans l’innovation, pour remplacer les produits phytosanitaires.
Angélique Delahaye, eurodéputée PPE (Les Républicains), fait partie de la commission parlementaire sur l’environnement et la sécurité alimentaire. Elle siégeait aussi à la commission spéciale PEST, qui s’est penchée sur le système européen d’autorisation des pesticides, ces dix derniers mois.
Pour elle, le dernier rapport de la commission sur le sujet, adopté par le Parlement de manière non contraignante, constitue une orientation politique positive, qui entérine l’approche scientifique, sans appeler à l’interdiction soudaine de quelque substance que ce soit.
« On sait que la science évolue. Donc il faudra que nos procédures évoluent au même rythme qu’évolue la science. La science dit aujourd’hui qu’il n’y a pas de risque, donc il n’y a pas de risque », estime-t-elle.
Pour elle, il faut faire preuve de courage politique pour dire aux gens ce qui est possible et ce qui ne l’est pas, sans jouer sur leurs peurs.
« Il faut des années pour trouver des alternatives à certaines pratiques, parce que la recherche n’est pas suffisamment avancée et financée, parce qu’il faut mettre en place de l’innovation. Et tout ça, ça ne se déclare pas juste en claquant des doigts et en disant que dans trois ans c’est fini », souligne-t-elle. « Les plantes, c’est comme les êtres humains, elles peuvent être malades et il faut les protéger. »
Glyphosate en France
Le débat public sur le glyphosate, l’herbicide le plus utilisé dans le monde, a refait surface la semaine dernière, quand un tribunal français a décidé l’interdiction immédiate du Roundup Pro360, de la marque Monsanto.
Ce qui n’est pas pour plaire à l’élue de droite, qui assure que « le jugement du tribunal de Lyon n’a aucune base scientifique ». « On sait que ce n’est pas la molécule glyphosate elle-même qui est un problème, mais les produits avec lesquels on la mélange pour la rendre plus efficace. Or ces produits-là ne sont pas testés. »
Elle plaide donc pour une homologation de l’ensemble du produit, et pas seulement de sa substance active. Cela pose évidemment la question des moyens, alors qu’il existe des centaines de pesticides aux formules différentes. « Rien qu’en France, il y a plus de 600 produits à base de glyphosate. Est-ce qu’on a besoin de tous ces produits ? »
Le ministre français à l’Agriculture, Didier Guillaume, a répété à l’envi qu’une interdiction brutale du glyphosate pourrait pousser un grand nombre d’agriculteurs français à mettre la clé sous la porte.
Lors d’un entretien télévisé la semaine dernière, il a rappelé que l’élimination subite du glyphosate n’était pas possible parce qu’il n’existait pas d’alternative viable, selon lui. Il a également assuré que les produits utilisés par les agriculteurs étaient totalement sous contrôle.
En novembre dernier, le gouvernement français a mis en ligne le site www.glyphosate.gouv.fr, « un site déclaratif où chaque agriculteur qui le souhaite peut s’engager soit à dire qu’il est déjà sorti du glyphosate, soit à dire qu’il s’engage à en sortir en trois ans ».
Outre la carte de France montrant les parcelles déclarées sans glyphosate, le gouvernement entend mettre en ligne une série de conseils. « L’idée c’est d’essaimer les bonnes pratiques, responsabiliser et être dans la dynamique du changement », souligne l’Élysée. Au-delà du nombre d’agriculteurs qui s’engageront en ligne, l’objectif final « reste l’interdiction dans les trois ans ; on sera jugé sur pièces à ce moment-là ».
Faible risque
Parmi les propositions du rapport de la commission PEST, les eurodéputés demandent aux États membres de fournir assez de financements, via des programmes comme Horizon, pour promouvoir les pesticides dits à « faible risque ». Le texte appelle aussi la Commission à présenter une proposition législative spécifique pour permettre une procédure d’évaluation rapide, rigoureuse et efficace pour ces produits à « faible risque ».
« Il n’y a pas de faible risque. Il y a des pesticides. Qu’ils soient de synthèse ou naturels, il faut vérifier quel est leur impact sur la santé humaine et sur l’environnement », prévient cependant Angélique Delahaye, qui souligne que ce n’est d’ailleurs pas parce qu’un produit est naturel qu’il n’est pas potentiellement dangereux. « Donc il faut changer nos pratiques et faire en sorte d’utiliser le moins possible de produits de protection des cultures. »
L’EFSA a récemment confirmé le caractère toxique des produits à base de cuivre, utilisés comme fongicides et bactéricides naturels dans la culture du raisin, des pommes de terre, des tomates et des pommes. Un vote aura lieu d’ici début février pour prolonger ou non l’autorisation d’utilisation de ces produits.