Des centaines d’agriculteurs prévoient de manifester ce mardi 22 octobre devant le Parlement européen. Ils exigent des changements fondamentaux dans la proposition de la nouvelle politique agricole commune (PAC).
Une alliance de sept organisations environnementales et agricoles prévoit de protester lors de la troisième séance plénière du Parlement européen nouvellement élu à Strasbourg. Des centaines d’agriculteurs de France et d’Allemagne souhaitent bloquer l’accès au bâtiment avec leurs tracteurs et remettre en personne leurs revendications.
Ils s’opposent au projet de la nouvelle PAC. « La manifestation devrait être un signal auprès du Parlement, mais aussi de la Commission, que le projet actuel de la nouvelle PAC doit être révisé de toute urgence », explique Saskia Richartz, la porte-parole allemande de l’alliance Good Food Good Farming. « Les nouvelles observations scientifiques du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) doivent être prises en compte », a-t-elle ajouté.
La mobilisation de ce 22 octobre conclut une série de manifestations contre le texte actuel de la PAC, qui ont agité l’Europe un mois durant. L’année dernière, 19 États membres avaient pris de nombreuses mesures et une pétition avec 114 000 signatures avait été remise aux ministres de l’Agriculture de l’UE.
L’alliance réclame une nouvelle fois que la réforme de la PAC vienne davantage en aide aux producteurs locaux. « Les agriculteurs continuent bien trop souvent de produire pour le marché mondial plutôt que pour leur propre région. Ce n’est pas en accord avec les principes du développement durable », souligne Mme Richartz.
L’alliance appelle aussi au respect du bétail et pour qu’il soit élevé en plus petit troupeau. À ses yeux, davantage de fonds devraient être débloqués pour protéger les terres arables et restreindre l’utilisation des pesticides.
« Les paiements directs sont toutefois les plus grands défis, car ils soutiennent principalement les grandes exploitations, au détriment des moyennes et petites structures, qui sont pourtant majoritaires dans le secteur », soutient Saskia Richartz. Selon l’alliance, les paiements directs doivent être réduits progressivement, en commençant par une redistribution de 50 % des soutiens financiers aux deux piliers de la PAC. À l’heure actuelle les primes d’hectares du premier pilier représentent environ 70-80 % du budget global, autrement dit 40 % des revenus des agriculteurs européens.
Les manifestants constatent également un manque de mesures contraignantes pour la protection de l’environnement dans le projet actuel de la PAC. « La conditionnalité améliorée », qui prévoit les primes d’hectares sous certaines conditions, ratisse « tellement large qu’elle nuit à l’évolution nécessaire du secteur agricole », ajoute Mme Richartz. Par ailleurs, les montants forfaitaires prévus pour rénover les étables sont octroyés sans savoir si les mesures sont respectueuses de l’environnement ou pas.
D’après Saska Richartz, la marge de manœuvre accrue des États membres pour l’octroi des fonds représente également un risque.
« Il est logique d’adapter les mesures aux conditions locales. Mais, étant donné que les États peuvent fixer leurs propres priorités, nous craignons que les projets climatiques ne soient dilués », maintient-elle.
Le lobby des agriculteurs critique les nouvelles conditions
Les négociations relatives à la PAC entre le Parlement européen et le conseil des ministres européens de l’Agriculture n’ont pas encore abouti et un accord ne semble pas être à portée de main. Il y a toujours des désaccords concernant les paiements prévus liés à la préservation des écosystèmes.
Certains États membres de l’UE ont l’intention de les introduire à titre de mesure volontaire. L’Italie, par exemple, souhaiterait obtenir une exemption pour les petites entreprises. En outre, les négociations sur les conditions que les agriculteurs doivent remplir pour recevoir des paiements directs sont toujours en cours.
Le lobby agricole européen Copa-Cogeca rejette les exigences croissantes en matière de paiements directs. Si le budget de la PAC était réduit en même temps, ce serait « inacceptable », a écrit l’organisation dans une déclaration officielle en réponse à la proposition de la Commission sur la PAC.
« Cela entraînera des pertes de revenus considérables pour les agriculteurs et limitera considérablement les possibilités de mesures écologiques dans le deuxième pilier », ajoute-t-elle.
Quoi qu’il en soit, les négociations au Parlement et au Conseil risquent de traîner en longueur. Les membres de la commission de l’agriculture ont récemment indiqué que la nouvelle PAC pourrait être retardée de deux ans au maximum.