Le travail du professeur Séralini n’a pas convaincu l’Autorité européenne de sécurité des aliments, qui demande des informations complémentaires. L’intéressé a déjà fait part de son refus.
A la mi-septembre, la publication par le Nouvel Observateur des résultats du travail du professeur Gilles-Eric Séralini sur les conséquences de la consommation de maïs OGM (traité au pesticide Roundup), sur des rats, avait provoqué un tollé dans l’opinion publique. L’une des principales conclusions de ces deux années d’étude est l’augmentation importante des tumeurs chez les animaux.
La vive réaction des autorités françaises a poussé la Commission européenne à leur emboiter le pas. Elle a saisi l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), qui vient de rendre son avis, aujourd’hui 4 octobre.
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L’agence tire à boulets rouges sur le travail de M. Séralini. Selon elle, le texte est de « qualité scientifique insuffisante pour être considéré valide ».
Pas de réexamen
Parmi les nombreux reproches, les experts de l’EFSA jugent que la souche de rats utilisée est naturellement sujette à des tumeurs et que le panel d’animaux était insuffisant en nombre. Les règles internationales, définies pour ce genre de travaux, n’auraient pas été respectées non plus.
Le responsable des travaux au nom de l’EFSA, Per Bergman, rappelle que « lorsqu’on réalise une étude, il est essentiel de s’assurer qu’un cadre approprié soit mis en place (…). Sans ses éléments, il est peu probable que l’étude se révèle fiable, valide et de bonne qualité ».
Le verdict de l’autorité est sans appel. Elle ne juge pas nécessaire de réexaminer l’évaluation du maïs NK603, incriminé par M. Séralini. Cet OGM pourra ainsi toujours être importé dans l’Union européenne, sans être pour autant autorisé à la culture.
Conflit d’intérêts
L’organisation de défense de l’environnement Greenpeace déplore cette décision. «Il y a des lacunes inacceptables dans les tests de sécurité actuels de l’UE, qui ignorent largement les effets potentiels à long terme sur la santé et les impacts environnementaux des cultures génétiquement modifiées », estime le responsable des politiques agricoles européennes Marco Contiero. Les études généralement fournies par les entreprises n’excèdent pas quelques mois.
L’EFSA laisse toutefois une porte ouverte et souhaite obtenir plus d’informations et de détails sur le travail du chercheur français.
La réaction de l’intéressé ne s’est pas fait attendre. M. Séralini a fait savoir à l’Agence France Presse qu’il ne donnerait aucune information supplémentaire à l’EFSA. « Nous attendons qu’ils fournissent celles qui ont permis d’autoriser cet OGM », a-t-il expliqué. Il estime que l’autorité européenne est « juge et partie ».
Les membres des comités d’experts de l’EFSA sont régulièrement accusés de conflits d’intérêts pour avoir travaillé auparavant pour les fabricants d’OGM.
Le député d’Europe Ecologie Les Verts, José Bové, dénonce ces pratiques depuis plusieurs années. En mars 2012, le Parlement européen avait refusé de voter le budget de l’agence pour ces raisons.