L’aide au développement mise à la diète en 2014 malgré les arrangements comptables

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Le gouvernement prévoit de rogner son aide publique au développement en 2014. Il assure cependant que la taxe sur les transactions financières devrait permettre un maintien des crédits- sans que l'on sache combien la taxe rapportera. Des jeux comptables qui agacent les ONG.

Membre malheureux du club des ministères « non-prioritaires » (hors Intérieur, Justice et Education nationale),  le budget de l’aide publique au développement accuse un sérieux recul dans le projet de loi des finances 2014 présenté le 25 septembre par le gouvernement français.  

Une baisse présentée comme une contribution à l’effort global pour la réduction du déficit français. En valeur, le budget accuse tout de même une baisse de 5,7%, soit 178 millions d’euros.

« Mais nous allons augmenter la part de la taxe sur les transactions financières attribuées à l’aide au développement, donc au final, les budgets sont stables » assure le ministre à EURACTIV.

Exercice d’équilibriste

En fait, l’exercice d’équilibriste mis en place par le gouvernement pourra difficilement compenser la baisse de l’aide publique au développement.

La réévaluation de la taxe de solidarité sur les billets d’avion  doit théoriquement permettre de financer les engagements de la France sur le Fonds SIDA et le Fonds vert pour le climat, pour lesquels des retards de paiement ont été déploré. Rien n'assure que cette réevaluation, qui est en fait un rattrapage de l'inflation depuis la création de la taxe, comble le solde à payer pour les engagements français, soit 42 millions d'euros. Le produit de la taxe évolue en effet en fonction du trafic aérien.

Le second financement innovant n'est pas non plus garanti : il s'agit de la taxe sur les transactions financières. Le mécanisme prélève depuis août 2013 une dîme de 0,2% sur les achats d’action d'une centaine de grandes entreprises françaises, celles dont la capitalisation boursière dépasse à 1 milliard d’euro. Une partie de cette taxe (10%)  est ensuite  reversée au budget développement.  

Pour 2014, le gouvernement a décidé d’augmenter cette participation à 15%, ce qui ne représente en aucune façon une augmentation des montants consacrés à l'aide au développement, puisque la recette de cette taxe est nettement plus faible que prévu.

« Les prévisions de recettes issues de cette taxe ont fortement été revues à la baisse pour 2014. Le gouvernement table maintenant sur 700 millions d’euros  pour 2014 contre 1,6 milliard » explique Alexandre Naulot, spécialiste du financement du développement  chez Oxfam.    

Résultat, l’augmentation à 15% est « symbolique, car elle ne change pas le montant des fonds qui seront versés à l’APD» explique Alexandre Naulot.

Des financements innovants détournés de leur objet

Du côté des ONG, ces augmentations à la marge des nouvelles formes de financement de l’aide publique au développement agacent.  Car en théorie, ces taxes devaient être attribuées  au financement de nouveaux besoins comme l’adaptation au changement climatique. Le Fonds vert pour le climat, conclu à Durban en 2010, doit permettre un transfert entre pays développés et pays en voie de développement afin de lutter contre les effets du changement climatique. Il devait mobiliser 100 milliards d'ici 2020. Or, trois ans après sa création, le Fonds vert peine à rassembler les 2 milliards d'euros nécessaire à son démarrage, en raison de retards de paiement. Comme celui de la France.

Pas plus tard que la semaine dernière, lors de la conférence environnementale, le président François Hollande s'était pourtant engagé à « abonder le Fonds vert pour le climat créé à Durban afin d’aider les pays pauvres à faire face au réchauffement».

« Les nouvelles taxes ont leur propres objectifs, elles ne doivent pas se substituer et compenser une baisse de budget » affirme Christian Reboul, responsable des questions de financement du développement chez Oxfam France.

La sincérité des chiffres mise en cause

Ces petits exercices comptables pourraient irriter au-delà des rangs des ONG. Les parlementaires, qui devront examiner le projet de loi des finance à partir d’octobre, avaient déjà laissé paraître un certain ras-le-bol en 2012, lors de l’examen du précédent budget.  

Malgré une bonne volonté de façade affichée par le président François Hollande, une nouvelle fois réaffirmée lors de son discours à l’assemblée générale de l’ONU cette semaine le budget  français pour l’aide au développement est en baisse continue.  Ainsi, la France s’éloigne de plus en plus de son objectif de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l'aide publique au développement (APD).

Avec un déficit annuel supérieur à 4 % de son PIB pour 2013, la France est sortie des clous balisés par le traité de Maastricht. La Commission lui a donné deux ans pour revenir à un niveau de 3 %. La dette publique frôle les 95 % du PIB. Le taux de prélèvements obligatoires, à 46 % est déjà élevé.

L'option qui consiste à réduire les dépenses de l'Etat tente d'être privilégiée. Le gouvernement français a ainsi annoncé un budget de rigueur. En 2014, 15 milliards d'euros d’économies seront réalisés dans les dépenses publiques de l’ensemble des ministères non-prioritaire. (hors Intérieur, Justice et Education nationale)

  • octobre: début de l'examen du Projet de loi de finance au parlement

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