Lors de son discours de politique générale du 1er octobre, le Premier ministre Michel Barnier a détaillé son programme énergétique et climatique, réaffirmant l’ambition du gouvernement de poursuivre le développement du nucléaire.
Alors que la « dette écologique » est une « épée de Damoclès » pour les futures générations, Michel Barnier a assuré que la transition énergétique serait « au cœur » de l’action du gouvernement et le « moteur » des politiques industrielles française et européenne.
« Il reste bien des choses à faire bouger en Europe, pour accélérer la transition écologique, en veillant à l’acceptabilité sociale et économique et à la réciprocité environnementale de nos échanges commerciaux », a-t-il résumé en quelques mots.
À l’échelle française, Michel Barnier a réaffirmé la stratégie nucléaire du gouvernement, appelant à « poursuivre résolument le développement des nouveaux réacteurs ». L’Hexagone vise la construction de six réacteurs nucléaires de grande taille d’ici à 2035-2040.
Les designs sont en cours de finalisation du côté d’EDF, tandis que l’État et l’énergéticien réfléchissent au moyen de financer les 67 milliards d’euros nécessaires à ce programme, selon les derniers chiffres révélés par Les Échos.
Les renouvelables sous surveillance
Le Premier ministre souhaite aussi poursuivre le développement des énergies renouvelables, mais « en mesurant mieux, dans certains cas, leurs impacts », notamment dans le cas de l’énergie éolienne sur laquelle Michel Barnier a tenu à insister dans son prononcé, bien qu’elle n’était pas explicitement inscrite dans le texte.
« Cette partie du discours n’est pas positive », juge ainsi pour Euractiv le président du Syndicat des énergies renouvelables, Jules Nyssen. « On peut s’interroger sur le fait de savoir pourquoi on ne mesurerait les impacts que des renouvelables, et pas du nucléaire, qui n’en est pas dénué ».
Le Premier ministre, comme les élus des Républicains et de la plupart des autres formations politiques du centre droit à l’extrême droite, n’a jamais caché sa méfiance envers l’éolien.
« Toujours le même blabla de communication sur le nucléaire. Des belles paroles sur les renouvelables pour, en réalité freiner l’éolien (avant seulement sur le terrestre, et maintenant ?) », s’insurge sur X le chargé de transition énergétique chez Greenpeace France, Nicolas Nace.
En 2021, Michel Barnier avait en effet qualifié « d’échec » le parc éolien offshore de 500 MW qui devait être installé dans la baie de Saint-Brieuc, en Bretagne. Le parc a été officiellement inauguré mi-septembre, après des années d’opposition de la population locale.
Tout n’est pas perdu néanmoins. « Je préfère retenir surtout sa volonté de décarboner, notamment dans l’industrie, et sa volonté de reprendre tout de suite la planification », conclut Jules Nyssen.
Transition et planification
Le Premier ministre a également évoqué la biomasse « pour décarboner efficacement la production de chaleur et de gaz », mais aussi le soutien qu’il souhaite apporter au biocarburant.
Michel Barnier souhaite également relancer une politique du foncier. Pour cela, faire « évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation ’zéro artificialisation nette’ » qui vise à réduire l’artificialisation des sols.
Une mesure qualifiée de « criminelle » par la Secrétaire nationale des écologistes (EELV, Greens/EFA), Marine Tondelier, sur X.
Qu’ils soient opposés aux propositions du Premier ministre ou non, la grande majorité des acteurs intéressés aux questions énergétiques appellent cependant à une planification des objectifs français en la matière.
« Les travaux de planification vont reprendre immédiatement », a ainsi confirmé Michel Barnier, qui a souligné qu’il était l’heure de relancer les textes en attente depuis des mois, comme la stratégie française énergie et climat, la programmation pluriannuelle de l’énergie et le plan national d’adaptation au changement climatique.
Ce dernier a aussi annoncé qu’il allait lancer une « grande conférence nationale de l’eau ».
Et les ambitions ne sont pas que françaises. « Nous devons agir plus concrètement au sein de l’UE et dans le cadre des Accords de Paris », a-t-il avancé. Ce, tout en s’efforçant de ne pas creuser encore le déficit public.
L’exécutif doit d’ailleurs dévoiler la semaine prochaine devant les députés ses propositions pour le contenir. Un certain nombre d’associations portées par le réseau Amorce ont appelé le Premier ministre, mardi 1er octobre, à ne prévoir aucune coupe dans les budgets de l’écologie, de l’énergie et du climat.
[Édité par Laurent Geslin]