Projet de loi « immigration » : Marine Le Pen revendique une « victoire idéologique »

Le projet de loi tel qu’il est aujourd’hui adopté « est loin de la révision constitutionnelle nécessaire à la maîtrise réelle de l’immigration que nous appelons de nos vœux mais acte une incontestable victoire idéologique du RN  », a affirmé Marine Le Pen sur X. [Victor Velter/Shutterstock]

Les députés et sénateurs ont approuvé mardi (19 décembre) tard dans la nuit le projet de loi immigration. Le texte, très contesté, est beaucoup plus dur dans son contenu que le projet initial du gouvernement, si bien que la présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, parle sans ambages d’une « victoire idéologique ».

Le durcissement des règles reflète un glissement politique de plus en plus important vers des politiques inspirées de l’extrême droite partout en Europe, tandis que d’importantes dissensions se sont révélées au sein même du parti présidentiel.

Le projet de loi, adopté avec 349 voix, dont celles du RN, contre 186, résulte d’un bras de fer sans précédent dans l’histoire politique moderne du pays.

D’une part, les forces de droite et d’extrême droite estimaient que le texte initial du gouvernement était trop laxiste sur la question de l’immigration « illégale », permettant trop facilement aux travailleurs en situation irrégulière d’obtenir des visas temporaires de travail.

D’autre part, les partis de gauche ont mis en garde contre de nouvelles dispositions jugées discriminatoires, anti-immigration, voire, selon certains responsables politiques, racistes.

La crise parlementaire s’est déroulée en trois actes sur les deux derniers mois. Après plus d’un an de tergiversations et d’hésitations à présenter le texte au Parlement devant l’évidence que le gouvernement n’avait pas de majorité distincte, il a été présenté au Sénat en octobre, qui en a adopté une version particulièrement dure.

Arrivé à l’Assemblée nationale, le texte a été rejeté avant même d’arriver en hémicycle.

Puis, une semaine plus tard, le texte a été remanié dans le cadre de négociations en commission mixte paritaire (CMP), largement influencées par les demandes politiques des députés Les Républicains (LR) et RN.

Le Sénat a largement adopté cette dernière version en fin de soirée mardi, avant que les députés ne fassent de même.

Selon le nouveau texte, le droit du sol est entièrement remis en question. L’accès aux prestations sociales « non-contributives » est limité en fonction de la situation de l’emploi de chaque personne immigrée. Les visas de travail temporaire, dont l’octroi devait être automatique sous certaines conditions pour une durée d’un an, seront maintenant délivrés au cas par cas, à la discrétion du préfet. Enfin, de nouvelles restrictions sont mises sur pied pour les jeunes souhaitant venir étudier en France.

Le président Emmanuel Macron, dont le parti Renaissance n’a pas de majorité absolue à l’Assemblée nationale, a fait le pari de négocier en premier chef avec les députés LR afin de s’assurer une majorité pour le texte – au risque de trahir ses valeurs de parti centriste, affirmaient hier de nombreux députés Renaissance.

Plusieurs ONG et autres représentants de la société civile ont tiré la sonnette d’alarme contre un texte qu’ils jugent particulièrement dur et qui met en exergue le concept d’extrême droite de « préférence nationale ».

Le projet de loi tel qu’il est aujourd’hui adopté « est loin de la révision constitutionnelle nécessaire à la maîtrise réelle de l’immigration que nous appelons de nos vœux mais acte une incontestable victoire idéologique du RN  », a affirmé Marine Le Pen sur X.

Dans un rare signe de colère, 37 députés Renaissance ont voté contre le projet de loi ou se sont abstenus, selon le décompte des votes. Tous les députés conservateurs et d’extrême droite ont voté en faveur du texte. Aucun député des partis de gauche n’a voté pour.

Six ministres dont Clément Beaune, ministre des Transports, Roland Lescure, ministre de l’Industrie, et Aurélien Rousseau, ministre de la Santé, ont menacé de démissionner si le projet de loi était adopté.

Au moment de la publication, seul M. Rousseau avait officiellement présenté sa démission.

Projet de loi immigration : il faut « faire le choix » des travailleurs immigrés, avance le Medef

Avec 800 000 postes à pourvoir d’ici 2030 et « d’énormes tensions de recrutement » partout sur le territoire, il est temps pour la France de faire le choix d’une « immigration économique, choisie et raisonnée », affirmait mardi le président du Medef, Patrick Martin.

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