Le premier ministre français a été confirmé dans son poste par l’Assemblée Nationale le 8 avril. Après un discours durant lequel la question de l’Europe a à peine été évoquée.
«Trop de souffrance
pas assez d’espérance,
telle est la situation de la France».
C’est par cet alexandrin que Manuel Valls a démarré son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale, une déclaration qui engage la responsabilité de son gouvernement devant les élus. Le parlement lui a accordé sa confiance par 306 voix contre 239 dans la soirée. Onze députés de la majorité se sont abstenus.
Orateur de talent et passionné, il a aligné les effets de style, rompant avec le flegme de son prédécesseur, Jean-Marc Ayrault. L’essentiel de son discours a porté sur l’analyse de la France d’aujourd’hui. L’ancien ministre de l’Intérieur a souligné les problèmes sociaux et tenté de se placer en empathie avec « les feuilles de paie trop faibles et les feuilles d’impôt trop lourdes », ou avec la progression du nombre de cambriolages depuis 5 ans.
Des préoccupations peu europhiles
Réputé peu europhile, celui qui avait en 2005 commencé par militer pour le « non » au traité constitutionnel, avant de se ranger à la ligne officielle du PS, a à peine évoqué l’Europe, évitant même de prononcer le mot durant les 33 premières minutes de son discours.
Et sa première citation a été pour la Banque centrale européenne, dont il a critiqué « la politique monétaire moins expansionniste que celles des autorités monétaires américaines et japonaises ».
Dans la droite file de son collègue de l’Economie, Arnaud Montebourg, Manuel Valls a donc développé l’idée selon laquelle l’euro serait trop évalué.
>>Lire l’interview d’Arnaud Montebourg : Augmenter les impôts et attendre que la crise passe n’a jamais marché
Avant de développer sur le thème de la croissance, pour réclamer une politique orientée vers l’emploi plus que vers l’austérité.
« C’est dans la zone euro que la reprise économique est la moins vigoureuse. Ce sujet, qui va d’ailleurs être au cœur des prochaines élections européennes, je veux l’aborder très directement. Car il appartient à l’Europe d’apporter des réponses concrètes aux attentes des peuples. Ce qui est essentiel, c’est de remettre l’Union Européenne sur le chemin de la croissance au travers de politiques de grands investissements, des politiques pour l’emploi, notamment tournées vers la jeunesse.
Sinon, tous les efforts de réduction des déficits seront vains. Et je ne veux pas que cette magnifique aventure qui a uni notre continent perdre son éclat et finalement sa logique. Je suis très attaché à la solidité du couple Franco-allemand
Je reste convaincu que la France ne peut pas se passer de l’Europe et que l’Europe ne peut pas se passer de la France»
Seule note pro-européenne, l’Europe, citée 7 fois durant un discours de 47 minutes, et dans l’espace d’une minute, a été qualifiée de « magnifique aventure ».
Réformes en série
Le nouveau premier ministre a ensuite fait part de réformes qu’il entend mener tambour battant, notamment en matière fiscale, d’inspiration très libérales : il s’agit principalement d’allègement de charges pour les entreprises, surtout sur les bas salaires.
Le premier ministre a aussi donné une feuille de route pour la transition écologique, avec de nouveaux objectifs.
La France va ainsi s’engager à réduire ses émisisons de gaz à effet de serre de 40 % d’ici 2050, et sa consommation d’hydrocarbures de 30 % d’ici 2030.
La contrepartie de ces mesures risque de mal passer à Bruxelles.
En effet, le rythme de réduction de la dette publique et du taux de déficit annuel va être revu. Le retour à la limite de 3 % du PIB en 2015 semble désormais hors de portée. Les deux candidats à la présidence de la Commission, Juncker et Schulz, ont déjà croisé le fer sur cette idée.