L’UE et l’Inde souhaitent renforcer leur coopération dans le domaine de l’énergie solaire et de l’hydrogène vert

Le premier ministre britannique Boris Johnson (à gauche) et le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres (à droite) saluent le premier ministre indien Narendra Modi (à droite) à leur arrivée à la COP26 à Glasgow, le 1er novembre 2021. [ROBERT PERRY/EPA]

Delhi et Bruxelles ont réaffirmé leur volonté d’étendre leur collaboration en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Le lancement éventuel d’une « alliance pour l’hydrogène vert » est à l’ordre du jour des discussions bilatérales de l’année prochaine.

L’objectif de New Delhi étant de parvenir à des émissions nettes nulles d’ici à 2070, la perspective de voir l’Inde se transformer en une puissance mondiale dans le domaine des énergies renouvelables pourrait offrir des possibilités de coopération entre l’UE et l’Inde en matière de climat.

En début de semaine, le Premier ministre indien Narendra Modi a profité des négociations sur le climat de la COP26 à Glasgow pour annoncer que l’objectif du pays était de parvenir à la neutralité carbone en 2070.

L’annonce surprise de M. Modi est intervenue après des mois d’opposition à la pression internationale en faveur de nouveaux engagements en matière de climat, et après que son ministre de l’environnement ait rejeté l’idée de promesses de réduction nette des émissions une semaine auparavant.

À Glasgow, l’Inde a relevé son objectif de capacité énergétique à faibles émissions pour 2030, le faisant passer de 450 à 500 gigawatts, et s’est engagée à réduire ses émissions de dioxyde de carbone d’un milliard de tonnes avant la fin de la décennie.

Le plus ambitieux des cinq objectifs de l’Inde est de tirer la moitié de l’énergie du pays des énergies renouvelables d’ici 2030, contre environ 38 % en 2020.

Selon des sources proches du gouvernement indien, les vraies ambitions seraient encore plus élevées, mais Delhi ne serait pas prêt à fixer davantage d’objectifs sans un soutien financier accru et un transfert de technologie de la part des nations plus riches.

« Les pays développés ont atteint le pic d’émissions dans les années 90 et ont annoncé un taux net zéro d’ici 2050, ce qui représente un écart de 60 ans, alors que l’Inde atteindrait, selon les estimations actuelles, le pic d’émissions peut-être vers 2040-50 », a déclaré la source à EURACTIV. « Cependant, nous avons annoncé notre objectif de net-zéro d’ici 2070, avec un écart de seulement 20 ans. »

« Ce que l’UE aura essayé d’atteindre en 60 ans, l’Inde essaie de l’atteindre dans une période de 20-30 ans », a souligné la source.

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Le CBAM, une « boîte de Pandore »

« Les émissions par habitant des pays développés devraient au moins atteindre la moyenne mondiale, et il devrait y avoir suffisamment d’espace carbone pour les pays en développement », a ajouté la source, précisant que des mesures telles que le mécanisme d’ajustement aux frontières pour le carbone (CBAM) devraient être un dernier recours.

Le CBAM, conçu pour stimuler la demande de produits écologiques, a été qualifié de discriminatoire par des pays émergents comme l’Inde, un pays dont l’UE importe des quantités substantielles d’aluminium et d’acier.

« Le CBAM pourrait d’autre part ouvrir la boîte de Pandore des guerres commerciales dans le contexte des émissions historiques et des émissions actuelles », ont déclaré des sources proches du gouvernement indien à EURACTIV.

Bien que l’Inde soit actuellement le troisième plus grand émetteur de gaz à effet de serre au monde après la Chine et les États-Unis, les émissions par habitant du pays sont beaucoup plus faibles que celles des autres grandes économies.

En début de semaine, les dirigeants des pays en développement ont exprimé à Glasgow leur frustration face au fait que les économies développées n’ont jusqu’à présent pas réussi à tenir leur promesse de mobiliser davantage de fonds pour les soutenir dans la transition énergétique.

« L’Inde attend des pays développés qu’ils mettent à disposition un billion de dollars pour le financement du climat dès que possible », a déclaré M. Modi, en référence aux promesses non tenues de fournir 100 milliards de dollars de financement annuel pour le climat à partir de 2020.

« La justice exigerait que les nations qui n’ont pas tenu leurs engagements en matière de climat soient mises sous pression », a-t-il ajouté.

Dans le cadre du Green Deal, l’UE s’est engagée à accroître son soutien à la résilience et à la préparation climatique internationale, notamment en augmentant le financement international.

« Nous sommes absolument conscients que le financement de la lutte contre le changement climatique est la clé d’une économie et d’une société mondiales neutres sur le plan climatique et résilientes », a déclaré l’envoyé de l’UE en Inde, Ugo Astuto, lors d’un événement organisé par le centre Ananta Aspen avant la COP26.

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Alliance pour l’hydrogène vert

Lors de sa visite en Inde en octobre dernier, le responsable du climat de l’UE, Frans Timmermans, a suggéré d’explorer des initiatives communes, telles qu’un éventuel forum commun et une réunion de haut niveau au cours du premier semestre de l’année prochaine.

M. Timmermans a également annoncé que l’UE allait lancer un programme doté d’un million d’euros pour renforcer la coopération avec l’Alliance solaire internationale. Les fonds serviront à soutenir les échanges universitaires, la recherche et l’innovation et à permettre l’échange de bonnes pratiques sur la manière de mobiliser des fonds pour le déploiement de l’énergie solaire.

« Je m’attends à ce que l’hydrogène vert joue un rôle majeur dans les discussions entre l’UE et l’Inde au cours des prochains mois », a en outre déclaré M. Astuto.

La promesse de l’hydrogène vert, produit sans émissions à partir d’énergies renouvelables, a suscité un intérêt croissant dans les pays en développement qui cherchent à décarboniser leur économie.

Dans l’optique d’un futur partenariat commercial avec l’UE, Delhi a exprimé son intérêt pour une alliance sur l’hydrogène vert avec l’Union.

Lors de leur sommet conjoint à Porto en début de cette année, Delhi et Bruxelles avaient réaffirmé leur engagement à étendre leur collaboration en matière de lutte contre le changement climatique. Le partenariat UE-Inde pour la connectivité, également conclu lors du même sommet, couvre désormais de nombreuses questions liées à l’action climatique, notamment la transition vers des énergies propres.

Selon un fonctionnaire européen, l’Inde a proposé de discuter de la création d’un forum UE-Inde sur l’hydrogène vert lors du prochain panel UE-Inde sur l’énergie.

« Du point de vue de l’UE, cela pourrait être utile pour soutenir la coopération inter-entreprises en faveur des pilotes d’hydrogène vert en Inde, la coopération sur les cadres réglementaires et les initiatives internationales pour certifier l’hydrogène vert », a déclaré un fonctionnaire de l’UE à EURACTIV.

Au-delà des efforts bilatéraux, les experts estiment que l’UE pourrait également travailler avec l’Inde pour développer des technologies vertes adaptées aux pays tiers du Sud.

Delhi pourrait devenir un bénéficiaire majeur du nouveau commerce énergétique mondial de l’hydrogène, et un exportateur net d’énergie à l’avenir, puisque le pays est l’un des rares à avoir annoncé des plans nationaux pour l’hydrogène.

Dans le même temps, la stratégie indo-pacifique récemment publiée par l’UE a signalé une volonté plus marquée de l’UE de renforcer la coopération avec les pays de la région.

Elle mentionne aussi explicitement la collaboration avec les groupes de travail du Quad sur les vaccins, le changement climatique et les technologies émergentes. [Le dialogue quadrilatéral sur la sécurité, également connu sous le nom de Quad, est un dialogue stratégique entre les États-Unis, l’Inde, le Japon et l’Australie, ndlr.]

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