Des boitiers illégaux désactivant le système de dépollution ont été retrouvés dans les poids lourds d’une société de transport espagnole. Pour le Parlement européen, l’Europe n’est pas tout à fait sortie du scandale Dieselgate.
Des contrôles routiers ont identifié dans certains poids lourds la présence de boitiers permettant de leurrer les système de contrôle de la pollution. La gendarmerie espagnole a ouvert une enquête sur une entreprise de transport routier madrilène concernée par ces pratiques.
Contrairement au Dieselgate, qui concernait les fraudes de constructeurs automobiles, les responsables sont des propriétaires de véhicule qui installent ces boitiers faciles à se procurer. Des boitiers ont été retrouvés sur 13 camions au diesel et les autorités espagnoles ont arrêté 4 personnes. « Certains liens ayant été établis » avec la France et le Royaume-Uni, la garde civile a également fait appel aux services d’Europol, qui n’a pas été en mesure de définir la nature de ces liens.
Le réseau d’ONG Transport et Environnement (T&E) a confirmé qu’il ne s’agissait toutefois pas « d’un cas isolé » et qu’il y avait « déjà eu de nombreuses enquêtes conséquentes concernant des centaines de véhicules au Royaume-Uni et en Allemagne. Selon Stef Cornelis de T&E, « en termes d’émissions supplémentaires libérées, ce scandale pourrait être bien plus important que celui du Dieselgate. Ces pratiques sont généralisées, ce qui prouve toute la vulnérabilité des systèmes de contrôle de ces poids lourds. »
Ces dispositifs frauduleux leurrent le système électronique de bord en signalant que le système de réduction catalytique fonctionne correctement. La consommation du liquide permettant la dépollution de gaz tels que dioxyde d’azote est réduite, et les fraudeurs font ainsi des économies. Les enquêteurs espagnols estiment que ces économies peuvent s’élever à 700€ par an et par véhicule et que les boitiers permettent de polluer sans aucune limite.
Comme un mauvais souvenir
L’affaire fait écho à un mauvais souvenir pour les autorités européennes. Le scandale Dieselgate avait éclaté en 2015, quand des logiciels truqueurs avaient été retrouvés sur plus de 11 millions de véhicules du constructeur automobile allemand Volkswagen partout dans le monde. Les eurodéputés avaient réagi à ce scandale en convoquant une commission parlementaire et en ouvrant une enquête. Un rapport final avait permis de faire certaines recommandations à la Commission et au Conseil.
Le 28 mars, les eurodéputés ont soutenu une résolution non contraignante appelant les États membres à diminuer le nombre de véhicules polluants sur les routes. Le Parlement craint que ce problème persiste.
Pour la vice-présidente du groupe S&D, Kathleen Van Brempt, le scandale espagnol n’est « pas si surprenant » et fait référence à la « culture de la fraude » à laquelle les constructeurs automobiles ont largement contribué. La présidente de la commission des transports, Karima Delli (Verts/ALE) a quant à elle regretté que le le Dieselgate n’ait pas permis de tirer de leçons, saluant toutefois la résolution du 28 mars.
En 2017, les eurodéputés avaient accepté de donner plus de pouvoir à la Commission pour surveiller les constructeurs automobiles, mais le projet d’agence européenne visant à empêcher de nouveaux scandales similaires n’a finalement pas abouti. Kathleen Van Brempt regrette cette occasion manquée, ajoutant que « la situation ne fera qu’empirer » sans une autorité compétente.
La nouvelle résolution critique également l’incapacité de la Commission à impliquer les États membres et condamné son « comportement obstructionniste », faisant notamment référence à sa réticence à rendre publiques des documents techniques sur le sujet.