Le Maltais Karmenu Vella devrait être le futur commissaire aux affaires maritimes et à la pêche selon la proposition de Jean-Claude Juncker. Cependant, son intervention devant le Parlement européen n’a pas su persuader l’audience.
« Je ne prends aucun engagement aujourd’hui, non pas parce que j’ai reçu des ordres d’en haut, mais simplement nous devons faire le point sur l’état de la législation européenne et de sa mise en œuvre », a déclaré Karmenu Vella devant les eurodéputés durant son audition le 29 septembre.
M. Vella, ancien ministre maltais des Travaux publics, de l’industrie et du tourisme, a été le premier candidat à passer devant le Parlement. Les différents commissaires sont actuellement entendus durant une longue série d’auditions, qui s’égrèneront sur deux semaines, avant que le collège soit approuvé ou rejeté par les eurodéputés le 22 octobre prochain.
La question de la fusion des politiques environnementales avec les affaires maritimes et la pêche, qui appartenaient jusqu’alors à des portefeuilles différents, a suscité de vives oppositions en amont des auditions.
La nouvelle direction générale sera sous la houlette du Finlandais Jyrki Katainen, vice-président responsable de l’emploi, de la croissance, de l’investissement et de la compétitivité.
Les eurodéputés verts, mais aussi le président du Parlement européen, Martin Schulz, ont exprimé leurs inquiétudes face à la nouvelle structure de la Commission européenne, telle qu’elle a été présentée par le président Jean-Claude Juncker. Or cette nouvelle configuration risque de minimiser l’importance donnée aux questions environnementales au sein des politiques européennes, notamment dans le cadre de la stratégie économique de l’Union européenne.
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Au début de l’audition, l’eurodéputé français Alain Cadec, membre du parti populaire européen et président de la commission de la pêche, a conseillé à Karmenu Vella de donner un peu plus de consistance à ses propos lorsqu’il répond aux eurodéputés. Le commissaire maltais n’a en effet apporté que des réponses générales dans le questionnaire écrit qu’il a retourné aux eurodéputés peu avant l’audition, s’est agacé l’eurodéputé français.
Le possible futur commissaire s’est cantonné à faire de vagues déclarations. Par exemple, il a mis en exergue que la mise en commun des deux portefeuilles était une chose « tout à fait naturel » et que la croissance bleue et celle verte représentaient « les deux faces de la même pièce ».
En effet, l’eau recouvre la planète à 70 %, tandis que la terre n’en représente que 30 %, a-t-il illustré. Selon lui les politiques environnementales et maritimes se renforceront mutuellement et en aucun cas il ne fallait que l’un des deux domaines soit privilégié au détriment de l’autre.
Interrogé sur les raisons de l’absence des questions de développement durable dans la lettre de mission donnée par Jean-Claude Juncker à son équipe, Karmenu Vella s’est contenté de répondre que le développement durable était inscrit dans les traités européens. Pour cette raison, la croissance durable concerne tous les départements de la Commission, qui doivent dès lors intégrer cet aspect dans leur travail, a-t-il expliqué.
Aucun conflit d’intérêts
Karmenu Vella a balayé d’un revers de la main les allégations selon lesquelles il existerait des conflits d’intérêts entre les enjeux environnementaux et ceux économiques dans le cadre du nouveau portefeuille, produit de la fusion de l’environnement et des affaires maritimes.
Si les spécialistes des questions environnementales inscrivaient le thon rouge sur la liste des espèces protégées, alors le secteur de la pêche n’aura pas son mot à dire, a affirmé en substance le candidat maltais. Il y a peu de chances qu’il y ait un conflit dans ce domaine puisqu’il existe des quotas qui sont déterminés sur la base de recherches scientifiques, a-t-il estimé. Aucune manœuvre politique ne pourrait subitement être à l’avantage de l’industrie de la pêche, selon lui.
L’ancien ministre a donné quelques détails quant aux initiatives qu’il compterait mener s’il obtenait le vote du Parlement. Cependant, le candidat a admis ne pas connaître ces dossiers en profondeur dans certains cas, par exemple lors le sujet des restrictions des essais sur les animaux relatifs aux produits ménagers a été abordé.
Sur d’autres points particuliers, tels que l’interdiction européenne des néonicotinoïdes suspectés d’avoir un impact sur la santé des abeilles, ou la résolution du parlement sur l’utilisation du cyanide dans les mines d’or, ou encore la possible fusion des directives « Habitat » et « Oiseaux sauvages », Karmenu Vella a expliqué préférer attendre et étudier les résultats des évaluations en cours sur la législation européenne déjà en vigueur avant de lancer de nouvelles initiatives.
De la même façon, le candidat maltais a souligné que seuls les États membres pouvaient décider de leur propre mix énergétique. Si certains mènent des études sur le gaz de schiste, il serait intéressant de voir ce qu’il en ressort avant que l’UE soumette un projet législatif, a-t-il exposé.
Dans l’ensemble, Karmenu Vella a insisté sur la mise en œuvre efficace des lois déjà existantes plutôt que de lancer de nouveaux chantiers législatifs. À ses yeux, la première des priorités est de faire en sorte que les États se mettent en conformité avec la législation européenne grâce à des discussions au cas par cas et d’une mise en œuvre efficace des textes européens. Plus de 300 procédures d’infractions vis-à-vis des lois environnementales ont été ouvertes rien que pour l’année dernière.