Plus de 100 ONG de protection de l’environnement craignent que la Commission européenne n’utilise son programme de meilleure législation pour supprimer les lois de protection de la nature.
La Commission a ouvert une consultation sur les lois de protection de la nature le 12 mai, dans le cadre de REFIT, son nouveau programme pour une réglementation affûtée et performante.
REFIT fait partie de l’initiative de meilleure législation lancée par la Commission et son premier vice-président, Frans Timmermans. Ce programme vise à simplifier la législation européenne et à réduire les coûts liés à la réglementation. Il a toutefois été accusé de mettre en danger les normes sociales et environnementales européennes.
Les défenseurs de la nature craignent que la consultation soit un premier pas vers l’abandon des directives Oiseaux et Habitats afin de faciliter la vie des entreprises dans l’UE.
Directives Oiseaux et Habitats
La directive Oiseaux a été conçue pour « maintenir la population de toutes les espèces d’oiseaux sauvages de l’UE à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles » et interdit des activités comme la collecte d’œufs et la destruction des nids. La chasse est également limitée à certaines saisons, techniques et espèces.
La directive Habitats entend quant à elle « maintenir ou restaurer les espèces et habitats présentant un intérêt pour l’UE » en donnant un statut de protection spécial à plus de 1 000 espèces de plantes et d’animaux dans quelque 230 types d’habitats.
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L’Union européenne peut se vanter d’avoir les lois de protection de la nature parmi les plus strictes du monde. Ces lois sont en outre soutenues par le grand réseau de sites protégés Natura 2000, qui couvre presque un cinquième du territoire terrestre de l’UE et 4 % de son territoire maritime.
Karmenu Vella, commissaire à l’environnement, insiste sur le fait que le programme REFIT n’avait pas pour objectif d’affaiblir les normes européennes. « Les directives Oiseaux et Habitats sont la pierre angulaire de la politique de protection de l’environnement de l’Europe. Je m’engage donc à m’assurer que ses objectifs ne sont pas revus à la baisse », a-t-il déclaré.
Pourtant, le ton « clairement hostile » des textes de la consultation inquiète nombre d’ONG, qui ont lancé une campagne en ligne intitulée « Alerte : nature en danger ». Le 12 mai, jour de lancement de la campagne, plus de 50 000 personnes, un nombre record, avaient déjà réagi.
Alléger les formalités administratives
« La fixette actuelle de la Commission européenne sur la déréglementation et l’allégement des soi-disant ‘lourdeurs administratives’ l’empêchent de voir les solutions efficaces pour les espèces et habitats en voie de disparition », estime Jeremy Wates, secrétaire général du Bureau européen de l’environnement.
En juillet 2014, Jean-Claude Juncker avait annoncé au Parlement qu’il « libérerait [les PME] d’une réglementation encombrante » afin de créer de l’emploi, de la croissance et de l’investissement.
Frans Timmermans a supprimé 80 projets de loi en cours du programme de travail de la Commission pour l’année 2015, et notamment le paquet sur l’économique circulaire, qui comprenait des lois sur la gestion des déchets. La directive sur le congé de maternité pourrait elle aussi être abandonnée à la fin du mois.
Le paquet sur l’économie circulaire comprenait une série d’objectifs légaux contraignants pour l’élimination des déchets et le recyclage, comme par exemple une interdiction de mise en décharge des déchets recyclables et biodégradables d’ici 2025.
La Commission entend faire une nouvelle proposition dans le courant de l’année. « Nous ferons cela très rapidement, parce que nous voulons l’économie circulaire […] nous voulons proposer des mesures plus ambitieuses », a déclaré Frans Timmermans.
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Dans un document « fuité » sur la stratégie de meilleure législation, la Commission insiste sur le fait que cette initiative ne doit pas affaiblir les normes en ce qui concerne l’environnement et d’autres secteurs.
« Une meilleure réglementation ne veut pas dire « plus » ou « moins » de règles européennes ; cela ne signifie pas non plus déréglementer ou revoir à la baisse le statut prioritaire des valeurs qui nous tiennent à cœur », peut-on y lire.
De nouvelles orientations pour une meilleure règlementation seront la garantie que les conséquences économiques, sociales et environnementales sont prises en compte dans l’analyse de la Commission.
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