Le 19 février, l’autorité bancaire européenne a ouvert une enquête formelle visant à déterminer si les autorités estoniennes et danoises ont une forme de responsabilité dans le scandale de la Danske Bank.
En septembre dernier, la Commission a écrit à l’Autorité bancaire européenne (ABE) pour l’ouverture d’une enquête « de toute urgence » pour savoir si les responsables danois et estoniens ont mené les inspections requises et appliqué les sanctions nécessaires à l’égard de la branche estonienne de la banque. « Une supervision efficace et l’application de sanctions proportionnelles et dissuasives sont des critères essentiels prévus par la législation européenne », lit-on dans la lettre.
L’exécutif européen cherche également à savoir si l’échange d’informations entre les autorités des deux pays a été « adéquat et approprié » à la détection des risques potentiels. L’ABE a déclaré qu’elle avait déjà commencé à se renseigner au sujet des autorités danoises et estoniennes avant le début de l’enquête.
Recommandations
Si l’enquête parvient à prouver que les responsables estoniens et danois ont violé le droit européen, l’ABE pourrait adresser des recommandations aux autorités nationales afin d’assurer le respect des normes européennes.
« Nous devons apprendre de ce scandale et réparer les erreurs commises. Je suis en contact avec les gouvernements des deux pays pour m’assurer que les lois européennes contre le blanchiment d’argent sont bel et bien mises en œuvre », a déclaré la commissaire à la justice Věra Jourová au lendemain de sa rencontre avec le ministre danois du Commerce et de la Croissance, Rasmus Jarlov, le 18 février.
La Danske Bank est impliquée dans l’un des plus grands scandales de blanchiment d’argent de tous les temps. Entre 2007 et 2015, près de 200 milliards d’euros de paiements sont passés par les portefeuilles non résidents de la petite branche estonienne de la banque. Selon une estimation de Bloomberg basée sur des chiffres officiels, ces transactions suspicieuses se hisseraient plutôt aux environs des 900 milliards d’euros. Le 18 septembre, la banque a rendu publics les résultats de l’enquête et a admis avoir été impliquée dans des activités de blanchiment d’argent.
Manquements
La Danske Bank a identifié des manquements dans ses mécanismes de contrôle et de gouvernance, le défaut de signalement des transactions suspectes et le manque d’identification des risques et de l’implication de certains employés dans ces activités illégales. C’est Howard Wilkison, responsable de l’unité de trading pendant cette période, qui a dévoilé l’affaire.
Selon Nienke Palstra, militante anticorruption pour l’ONG Global Witness, l’ouverture de l’enquête est « un premier pas positif qui permet de réhabiliter l’UE à lutter contre la corruption, mais la Danske Bank, les banquiers-conseils et les autorités danoises et estoniennes doivent s’assurer que cela ne se reproduira pas ».
C’est la deuxième fois que l’ABE ouvre une enquête formelle à la suite d’une recommandation de la Commission. En novembre dernier, l’exécutif européen avait eu recours à une procédure similaire à l’égard de Malte et avait encouragé les autorités maltaises à prendre des mesures supplémentaires pour mettre en œuvre la quatrième directive anti-blanchiment. En octobre 2017, la Commission avait envoyé une lettre à l’ABE pour demander l’ouverture d’une enquête contre Malte qui avait été conclue en juillet 2018.
L’exécutif européen avait également contacté l’ABE pour l’ouverture d’une enquête formelle au sujet des autorités lettones. Toutes ces procédures à l’encontre des autorités nationales s’inscrivent dans le contexte d’une révision actuelle de la législation anti-blanchiment et visent à renforcer les organes européens de surveillance, après une série de scandales ayant impliqué plusieurs États membres.
En septembre dernier, la Commission a proposé d’accroître les compétences de l’ABE pour la gestion d’enquêtes et d’améliorer la coordination entre les différentes autorités nationales. La BCE et certains pays, dont la France, ont plaidé en faveur d’une mesure supplémentaire qui consisterait en la création d’un organe européen de lutte contre le blanchiment d’argent au sein de l’UE.