Les dirigeants européens vont discuter des possibilités de vérification des investissements étrangers au Conseil européen. Une proposition plus radicale pour un système de véto européen des rachats étrangers reste pour l’instant exclue.
En février, l’Allemagne, la France et l’Italie estimaient que l’UE devrait « avoir plus de pouvoir d’enquête sur les rachats individuels et, au besoin, pouvoir les bloquer », dans les secteurs stratégiques.
L’idée a été reprise dans un « document de réflexion » sur la mondialisation publié en mai par la Commission, qui précise que les inquiétudes des États membres en ce qui concerne les investissements étrangers devraient engendrer « une analyse minutieuse et une action adaptée ». Les dirigeants européens en discuteront pour la première fois lors du sommet des 22 et 23 juin et devraient modérer la proposition.
« Le Conseil invite la Commission à se pencher sur des moyens de déceler et de vérifier les investissements de pays tiers dans les secteurs stratégiques, tout en respectant les compétences des États membres », stipule la proposition de conclusions pour le sommet.
Un fonctionnaire européen a indiqué que les chefs d’État et de gouvernement devraient trouver une « interprétation commune » de ce qui doit être fait au niveau européen. Il n’est cependant « pas question » d’un instrument européen capable de limiter les investissements étrangers, a-t-il insisté.
Les représentants européen estiment qu’une « vérification » pourrait être faite par l’UE lors d’investissements étrangers dans des secteurs industriels stratégiques, comme la technologie, la défense ou l’énergie, mais insistent sur le fait que la décision d’empêcher un tel investissement ne peut être prise que par un État membre.
À l’heure actuelle, une douzaine d’États disposent d’instruments légaux de blocage des investissements étrangers. Selon les fonctionnaires européens, certaines capitales tentent cependant de se cacher derrière les institutions européennes quand elles veulent agir à l’encontre d’importants partenaires commerciaux, comme la Chine, parce qu’elles craignent des répercussions sur leurs économies.
Pékin est régulièrement accusé de restreindre l’accès des entreprises européennes à son marché, alors que les investisseurs chinois achètent de plus en plus de parts des marchés européens.
« L’UE devrait aussi s’assurer que nos partenaires commerciaux sont également ouverts en ce qui concerne l’investissement et le marché public », poursuivent les propositions de conclusions pour le sommet.
Pas plus de pouvoirs
L’objectif des partisans de l’initiative n’est cependant pas très clair. « Il ne s’agit pas de donner de nouvelles compétences » à la Commission, précise un représentant d’un des grands États membres. L’intention est plutôt de lancer une « réflexion » sur la manière dont l’UE pourrait peser dans ce débat.
« Ce que nous proposons, c’est que la Commission présentent des éléments pour une vigilance, ou une prise de conscience, partagée sur l’impact potentiel des investissements étrangers sur les secteurs stratégiques », explique le diplomate.
Des fonctionnaires européens ont pour leur part indiqué que le sommet était une première discussion et que les dirigeants européens décideraient sans doute de demander au Conseil et à la Commission de trouver un accord sur le sujet. Aucune grande décision ne sera donc prise.
Au sein de l’exécutif européen, les recherches sur le sujet ont déjà commencé. Des fonctionnaires estiment que Jean-Claude Juncker pourrait présenter une proposition lors de son discours sur l’état de l’Union, en septembre.
Les gouvernements nationaux n’ont pas encore tous pris position sur la proposition de Berlin, Paris et Rome. Selon un diplomate, celle-ci n’est pas encore assez précise, « mais nous sommes prêts à nous laisser convaincre », a-t-il ajouté.