La présidence espagnole du Conseil de l’UE envisage l’exclusion du secteur financier des règles relatives aux obligations des entreprises de l’UE, qui font actuellement l’objet de négociations interinstitutionnelles, selon un document interne consulté par Euractiv.
Dans le document, préparé en amont de la réunion des attachés des États membres de ce vendredi (10 novembre), l’Espagne — qui est actuellement à la tête de la présidence tournante du Conseil des ministres de l’UE — propose d’exclure la finance de la directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CSDDD).
La directive sur le devoir de vigilance a pour objectif de rendre les grandes entreprises responsables des violations des droits humains et de l’environnement tout au long de leur chaîne de valeur.
L’exclusion du secteur est proposée en raison des divisions internes entre les États membres sur la question, qui, selon le document, pourraient mettre en péril l’ensemble de la loi.
Dans leur approche générale adoptée en décembre dernier, les États membres ont convenu de laisser l’inclusion du secteur comme une option au niveau national, une initiative portée par la France, qui continue à soutenir fermement l’exclusion de la finance des obligations en matière de devoir de vigilance.
La dernière proposition de la présidence du Conseil va à l’encontre d’une version antérieure du texte, qui proposait aux États membres différentes options pour couvrir le secteur dans le cadre de la directive, dans un effort de trouver un terrain d’entente avec le Parlement européen. Le Parlement avait en effet voté en faveur de l’inclusion du secteur financier en juin.
Éléments de compensation
Afin de faciliter un compromis avec le Parlement, le document propose d’inclure une clause de réexamen pour avoir la possibilité d’inclure les institutions financières à un stade ultérieur, accompagnée d’une déclaration politique des trois institutions de l’UE pour montrer un engagement politique fort.
Pour compenser l’exclusion du secteur, la présidence propose de faire des concessions sur d’autres éléments pour lesquels le Parlement s’est montré plus ambitieux que les États membres.
Il s’agirait notamment de l’accès à la justice pour les victimes d’abus commis par des entreprises, de la rémunération liée aux plans de transition et de l’inclusion de nouveaux secteurs dans le champ d’application de la directive.
Des négociations difficiles en perspective
L’exclusion possible du secteur financier du champ d’application de la directive devrait susciter des critiques de la part des organisations de la société civile, qui demandent depuis longtemps que les institutions financières rendent compte de l’impact de leurs investissements sur les droits humains et sur l’environnement, ainsi que de la part des membres du Parlement européen.
Selon le document, si les négociateurs du Parlement ne s’accordent pas sur l’exclusion du secteur, les discussions devraient à nouveau porter sur des solutions de compromis.
Les ambassadeurs des États membres devraient se rencontrer la semaine prochaine, et le prochain cycle de négociations interinstitutionnelles (les « trilogues ») devrait avoir lieu le 22 novembre à Strasbourg.
[Édité par Anne-Sophie Gayet]