Le Parlement européen prépare sa riposte sur la taxe numérique

[EPA-EFE/PATRICK SEEGER]

Les ministres européens ont repoussé la taxe numérique aux calendes grecques. Mais les eurodéputés s’apprêtent à voter une version beaucoup plus ambitieuse.

L’incapacité des ministres des Finances  à s’accorder sur une taxe numérique ambitieuse agace les eurodéputés. Favorables à une taxation plus juste de l’économie numérique, les élus européens veulent envoyer un message d’alerte aux dirigeants européens.

Lors d’une réunion le 4 décembre, les ministres ont une nouvelle fois échoué à s’accorder sur une taxe à l’échelle européenne, malgré une proposition édulcorée mise sur la table de la France et de l’Allemagne.

Un échec qui a particulièrement irrité les parlementaires européens, qui avaient réussi la veille obtenir un consensus très large sur la taxe numérique au sein de la commission des affaires économiques et monétaires.

Les GAFA échappent à la création d'une taxe numérique

Fortement revue à la baisse, la proposition de taxe numérique porte un sérieux coup à l’ambition initiale de la Commission  pour une fiscalité plus juste. Et ne fait toujours pas consensus parmi les Etats membres.

« En résumé, pendant que nous, au Parlement européen, nous avons été capables de soutenir de manière quasi unanime l’idée d’une taxe sur les services numérique le lundi soir, mardi matin, les ministres de l’Ecofin ont été incapables de parvenir à un accord. Pire encore, ils ont repoussé les discussions à février ou à mars 2019 sur la base d’une proposition complètement diluée de la France et de l’Allemagne, qui ne taxerait que les revenus générés par la publicité, en fermant les yeux sur les activités des plateformes comme Amazon et Airbnb, ou la vente de données » a regretté l’eurodéputé socialiste française Pervenche Beres dans un message adressé aux autres parlementaires européens.

Les eurodéputés veulent muscler la future taxe numérique

La taxe numérique européenne devrait être de l’ordre de 5%, estiment les eurodéputés de la commission des affaires économiques. Mais la proposition d’un taux de 3% divise déjà les Etats membres.

Lundi 3 décembre, les eurodéputés avaient en effet adopté en commission le rapport du socialiste  néerlandais Paul Tang sur la taxe numérique. La quasi-totalité des eurodéputés présents a voté pour la version du Parlement, qui prévoit une taxe plus ambitieuse que la proposition initiale de la Commission. Et sans commune mesure avec le compromis franco-allemand issu du dernier Conseil.

Une taxe plus ambitieuse

Les députés proposent notamment de taxer le chiffre d’affaires des géants du Net à 5 %, et non pas 3% comme proposé par la Commission européenne. Le spectre de la taxe est également plus large, puisque les eurodéputés proposent aussi d’intégrer les tels que Netflix et de commerce électronique comme Amazon ou Airbnb.

Seuls 4 eurodéputés ont rejeté cette proposition ou se sont abstenus, tandis que 33 élus européens issus de l’ensemble des groupes politiques se sont prononcés en faveur.

« Plus de 80% des citoyens de Suède, du Danemark, d’Autriche, de France, d’Allemagne et des Pays-Bas soutiennent une mise en œuvre rapide de cette taxe numérique. Plus de 700.000 personnes ont signé la pétition Avaaz et réclament plus de justice fiscale. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes. Les ministres des finances de l’UE doivent écouter les appels de leurs concitoyens. » a rappelé le rapporteur socialiste Paul Tang.

À l’occasion de la session plénière du Parlement qui se tiendra du 10 au 15 décembre à Strasbourg, les députés européens devraient mettre un coup de pression supplémentaire aux ministres. En adoptant le rehaussement de la taxe à 5%, comme le préconise le rapport de Paul Tang. Sur ce dossier, une alliance entre les socialistes, les Verts et la gauche radicale se dessine.

Budget de l’UE

Outre la question de la justice fiscale, la taxe numérique est également soutenue par les parlementaires européens pour des raisons budgétaires. Les élus y voient en effet un canal de financement du budget européen à long terme.

Comme la taxe sur les plastiques ou les revenus générés par le  système d’échange de quotas d’émission, la taxe numérique fait partie des potentielles  nouvelles ressources propres de l’UE

Si le vote des parlementaires en faveur d’une taxe numérique plus ambitieuse lance un appel clair aux États membres, il reste cependant symbolique puisque sur les sujets de fiscalités, les États membres gardent la main et doivent se prononcer à l’unanimité.

Un carcan dont certains pays pourraient s’affranchir en instaurant leur propre taxe numérique, en l’absence de compromis européen. Ainsi,  la France a annoncé son intention de mettre en place une taxe GAFA à l’échelle nationale en l’absence d’accord d’ici mars 2019. « Je me donne jusqu’au mois de mars pour qu’on obtienne une taxation européenne des géants du numérique […] sinon nous le ferons au niveau national », a déclaré le ministre de l’Économie et des Finances ce jeudi 6 décembre 2018, dans les 4 Vérités sur France 2.

Faute d'accord européen, la France taxera les GAFA en 2019

Le ministre de l’Économie et des Finances a annoncé que le France allait taxer « les géants du numérique » dès 2019, si les pays européens ne parviennent pas à s’accorder sur le sujet. Un article de notre partenaire Ouest-France.

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