Les eurodéputés veulent mettre un plafond au prix des appels et sms envoyés d’un État membre à un autre, estimant les tarifs appliqués outrageusement chers pour de nombreux consommateurs.
La commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs (IMCO) a décidé de faire baisser le prix des appels et sms envoyés de et vers les pays de l’UE, dans le cadre d’une proposition législative globale sur les télécommunications.
Les eurodéputés de la commission IMCO estiment qu’il s’agit là de la suite logique de la création d’un marché unique des télécoms pour les consommateurs européens. L’interdiction d’appliquer des frais d’itinérance, c’est-à-dire les surplus facturés aux usagers lors de déplacements entre États membres, est en place depuis le mois de juin.
C’est cependant la commission parlementaire sur l’industrie (ITRE), la principale commission sur les télécoms, qui votera un projet contraignant sur le sujet, soit le 11 septembre soit lors d’une réunion en octobre. La décision de l’IMCO devrait cependant encourager les eurodéputés de l’ITRE à adopter des mesures pour baisser les prix.
Dita Charanzova, libérale tchèque, coauteure de l’opinion de l’IMCO sur le projet législatif, estime « absurde » que les citoyens paient plus pour appeler à l’étranger que dans leur propre pays.
« Les tarifs actuels des appels internationaux ne reflètent pas leurs coûts réels », assure-t-elle. « Ces tarifs sont souvent extrêmes, surtout depuis les téléphones portables. »
Les représentants des consommateurs espèrent obtenir le plafonnement des prix des appels internationaux dans des nouvelles règles des télécoms, proposées l’an dernier par la Commission européenne. Le prix des appels internationaux n’est cependant pas mentionné dans la version initiale de la proposition.
« La suppression des frais d’itinérance était un premier pas dans la bonne direction. À présent, il faut réduire l’écart entre les appels nationaux et internationaux », indique Monique Goyens, directrice du BEUC, le Bureau européen des consommateurs.
À titre d’exemple, le prix payé pour les appels vers un autre État membre varie en général entre 0,65 et 1,50 euro la minute pour les consommateurs belges, par exemple, contre 0,83 euro la minute, maximum, en Lituanie, selon les organisations de protection des consommateurs.
Une mesure « superflue »
Les sociétés de télécoms trouvent quant à elle qu’imposer des plafonds serait une manière invasive de réguler le marché. « Le choix des consommateurs pour leurs communications internationales est vaste et les marchés son concurrentiels. Aujourd’hui, le vrai défi est d’apporter un Internet ultra-rapide à tous les Européens », assure Lise Fuhr, directrice d’ETNO, une association représentants des grands opérateurs téléphoniques, comme Deutsche Telekom et Orange.
La proposition législative inclut également des mesures censées encourager les opérateurs à construire des réseaux Internet plus rapides, ainsi que de nouvelles règles pour la réglementation de services liés à Internet, comme WhatsApp et Skype, afin d’améliorer la concurrence. Le contenu de la proposition doit obtenir l’approbation du Conseil, du Parlement et de la Commission avant de devenir contraignante.
L’industrie estime également que la mesure serait superflue, étant donné que les services Internet, comme WhatsApp et Skype, sont des alternatives aux appels et sms traditionnels de plus en plus utilisées.
Selon une enquête menée par ETNO en 2016, 48 % des utilisateurs ont indiqué avoir passé des appels internationaux dans l’année écoulée. Parmi eux, 38 % ont appelé vers l’étranger via les fournisseurs téléphoniques traditionnels, alors que 34 % ont opté pour des services en ligne.
Les appels des élus pourraient relancer des discussions difficiles entre autorités européennes et industrie téléphonique, comme ça a été le cas pour les frais d’itinérance. Si les discussions générales s’annoncent complexes, elles le seront encore plus si le Parlement insiste sur le plafonnement des tarifs pour l’étranger. Il a ainsi fallu une décennie pour parvenir à une mesure sur l’itinérance, à cause des désaccords entre les législateurs et les sociétés du secteur.
Il est cependant peu probable que les eurodéputés laissent tomber cette demande. L’an dernier, ils étaient 156, issus de différents partis, à exiger que la Commission agisse contre les prix « excessifs » des communications à l’étranger dans l’UE.
Dita Charanzova s’attend donc à des négociations à couteaux tirés. « Mais j’espère que les membres du Conseil se souviendront de l’expérience des frais d’itinérance et son issue positive », conclut-elle. « La fin des frais d’itinérance a été bénéfiques pour les citoyens et pour la plupart des fournisseurs télécoms. Je pense qu’il en ira de même avec les appels internationaux. »