Pour faire face à l’effondrement de 47% des ventes de pompes à chaleur au premier semestre 2024, la principale association qui représente le secteur à Bruxelles préconise des mesures d’incitation pour stimuler la demande européenne et faire face aux concurrents étrangers.
En 2022, les entreprises européennes avaient vendu trois millions de pompes à chaleur, contre un million en 2016, un record pour ce secteur en pleine croissance. Les pompes à chaleur permettent un chauffage et une climatisation propres et participent à la transition climatique de l’Union européenne (UE).
Mais en 2023, le secteur est entré en crise et les ventes se sont rétractées.
La tendance est encore plus mauvaise pour 2024, selon les données recueillies par l’association EHPA, avec une baisse des ventes de 47% au premier semestre. Le secteur devrait ainsi écouler moins de 1,5 millions de pièces cette année, un niveau qui n’a pas été atteint depuis 2019.
Un début difficile donc pour Paul Kenny, ancien conseiller du ministre irlandais de l’Énergie et nouveau directeur de l’EHPA, qui a pris ses fonctions le 1er septembre dernier.
« La situation n’est pas bonne du tout », confirme-t-il à Euractiv, attribuant la chute des ventes à quatre principaux facteurs : le manque d’installateurs qualifiés, des prix de l’électricité trop élevés par rapport à ceux du gaz, un « parcours client » trop compliqué et un investissement financier trop important pour s’équiper.
« Les gens qui n’ont pas de pompe à chaleur et qui en veulent une font face à chaîne d’approvisionnement vraiment médiocre », ajoute-t-il.
La menace chinoise
Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’Europe représente 20% de la production mondiale de pompes à chaleur et ce pourcentage devrait atteindre 30% d’ici 2030, en raison des investissements annoncés pour soutenir le marché intérieur de l’Union.
À l’instar d’autres technologies propres, les producteurs de pompes à chaleur craignent cependant que la concurrence chinoise ne grignote leurs parts de marché. « Tous nos fabricants doivent être compétitifs, mais il faut que la concurrence soit équitable, et c’est la question que nous devons poser à l’Europe », explique encore Paul Kenny.
Mais compte tenu de la complexité des chaînes d’approvisionnement dans le monde, « même les membres de l’EHPA qui produisent en Europe ont probablement un certain nombre de composants qui viennent de Chine », ajoute-t-il.
Selon le lobbyiste, la Chine dispose d’un marché intérieur qui favorise l’innovation et créé une pression concurrentielle très forte. « Ce que l’Europe doit apprendre, c’est que pour avoir des fabricants européens, il faut avoir des clients européens », continue-t-il.
Planifier l’avenir
Bruxelles avait travaillé sur un plan d’action prévu pour fin 2023, afin de stimuler la demande de pompes à chaleur en Europe. Mais un projet de loi allemand visant à rendre ces dernières obligatoires à partir de 2024 avait ébranlé la fragile coalition gouvernementale outre-Rhin, et le plan avait été retiré de l’agenda de l’UE.
« C’était une politique vraiment stupide et dangereuse », commente Paul Kenny, qui considère que les gouvernements devraient recourir à des mesures incitatives, pas à des obligations.
À l’avenir, Paul Kenny souhaite fournir des conseils précis aux États membres de l’UE, afin de stimuler l’acquisition de pompes à chaleur et il promet une analyse « beaucoup plus détaillée et granulaire » sur « les tâches réelles qui doivent être accomplies dans chaque pays, dans chaque juridiction ».
Il est convaincu que le nouvel exécutif de l’Union sera attentif à ses recomendations.
« J’ai passé du temps avec Wopke [Hoesktra], […] avec Teresa Ribera, […] avec Dan Jørgensen. Aucun d’entre eux ne pense que la réponse à nos problèmes réside dans un accord gazier avec quatre autres pays », a-t-il conclu, faisant allusion aux récents accords conclus avec l’Azerbaïdjan et le Qatar.
[Édité par Anna Martino et Laurent Geslin]