La Serbie et l’UE signent un partenariat sur les « matières premières essentielles »

Panorama de la vallée de la rivière Jadar dans l’ouest de la Serbie près de la ville de Loznica. Jadar est un dépôt unique de lithium-borate situé dans l’ouest de la Serbie. [Shutterstock/Vladeta Milojevic]

L’Union européenne et la Serbie ont signé vendredi (19 juillet) un accord pour développer l’approvisionnement en matériaux pour batteries lors d’un « sommet sur les matières premières essentielles », peu après le feu vert de Belgrade à un projet controversé d’exploitation de lithium.

« Une journée de travail importante nous attend, une journée qui aura un impact considérable sur de nombreux aspects de l’avenir de notre pays et qui donnera une forte impulsion au renforcement des relations entre la Serbie et l’Allemagne », a écrit le président serbe Aleksandar Vučić sur les réseaux sociaux avant la signature de l’accord. Un message accompagné d’une photo montrant le président serbe à côté du chancelier allemand Olaf Scholz, présent lors de la signature, dans un complexe gouvernemental à Belgrade.

« Le chancelier Scholz a proposé le soutien de l’Allemagne pour que la Serbie développe une chaîne de valeur plus importante pour la production de lithium, ce qui nous apportera des milliards d’investissements et un progrès incroyable pour l’ensemble du pays, en particulier pour la Serbie occidentale », a souligné le chef d’État serbe.

Pour Olaf Scholz, l’accord est vital pour l’indépendance de l’Europe, « accroît la résilience et promeut l’industrie », rapporte Reuters.

Le lithium est un métal extrait de minerai indispensable à la fabrication de batteries pour les voitures électriques. L’industrie automobile européenne investit tous azimuts dans cette transition, alors que les véhicules thermiques seront interdits à la vente dans l’UE à partir de 2035.

Le marché de la batterie est pour l’instant dominé par les producteurs chinois, vis-à-vis desquels Bruxelles et Berlin veulent réduire leur dépendance.

L’accord UE-Serbie vise donc à assurer que la matière première exploitée en Europe « reste sur le sol européen », avait précisé jeudi M. Vučić. Il avait également indiqué au journal allemand Handelsblatt que des discussions étaient déjà en cours avec plusieurs constructeurs automobiles européens, dont Mercedes, Volkswagen et Stellantis.

La puissante industrie allemande est particulièrement intéressée par l’accord.

Intérêts européens et craintes environnementales

Plus tôt cette semaine, un porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Hebestreit, avait déclaré que cet accord s’inscrivait « dans le cadre d’un projet d’extraction durable de lithium » dans le pays des Balkans.

Découvertes en 2004, les réserves de lithium de la région de Jadar, en Serbie occidentale, sont parmi les plus importantes d’Europe.

Selon le géant minier anglo-australien Rio Tinto, qui gère le projet, elles pourraient permettre de produire annuellement 58 000 tonnes de carbonate de lithium, suffisamment pour 1,1 million de véhicules — soit 17 % de la production européenne de véhicules électriques.

La future mine a toutefois été source de nombreuses querelles politiques ces dernières années, ses détracteurs craignant l’impact sur l’environnement dans cette région agricole.

Sous la pression des manifestations, le gouvernement serbe avait suspendu le projet en 2022. Deux ans plus tard, la Cour constitutionnelle a tranché, le 11 juillet, estimant que cette décision n’était « pas conforme à la constitution ».

Le gouvernement a alors annoncé mardi (16 juillet) la mise en œuvre de l’arrêt de la justice et autorisé la reprise des opérations.

Aleksandar Vučić, dont le parti, le Parti progressiste serbe (SNS), a remporté les élections parlementaires en décembre, s’est voulu rassurant, affirmant vendredi matin que la protection de l’environnement serait une priorité après avoir obtenu de nouvelles garanties de la part de l’entreprise.

Le chef d’État, qui veut arrimer son pays à l’UE, a récemment déclaré que l’exploitation pourrait commencer vers 2028.

« Il n’y aura pas de projet sans protection totale, et nous savons que cela se produira parce que nous faisons venir les meilleurs experts d’Europe en Serbie », a noté le président serbe avant la cérémonie de signature.

Capacités industrielles

M. Vučić a également annoncé la signature vendredi d’une « lettre d’intention » prévoyant l’installation de capacités industrielles en Serbie, en assurant que Belgrade ne permettrait pas l’exportation de plus de « 12 % à 13 % » de matière première de lithium.

Le reste « pourra sortir de la Serbie en forme de cathodes ou de batteries fabriquées en Serbie », a-t-il dit.

« Cela signifie que la production de batteries et éventuellement de voitures [fabriquée en Serbie], ce qui indique une entreprise technologique importante qui implique la science, l’expertise et l’industrie nationales », a estimé Aleksandar Jovović, de la faculté d’ingénierie mécanique de l’Université de Belgrade.

« La Serbie […] serait le premier pays européen à disposer de l’ensemble de la chaîne de valeur, [de l’extraction] du lithium à la fabrication des véhicules électriques, en Serbie. Nous en sommes très heureux, car il s’agit d’un excellent projet pour la Serbie », a déclaré Maroš Šefčovič, vice-président de la Commission européenne, présent à Belgrade ce vendredi, selon Reuters.

Privilégier les partenaires européens

Le président serbe a souligné vendredi que les exportations de lithium du pays seraient pour le moment uniquement vendues à des partenaires européens, malgré l’intérêt porté par des fabricants chinois.

« Nous l’avons promis aux représentants de l’UE », a-t-il insisté.

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