EXCLUSIF / Quatre PDG des plus grosses entreprises de l'énergie ont écrit au ministre britannique de l'Énergie, Ed Davey. Ils demandent la suppression de deux milliards de crédits carbone.
Les PDG de quatre entreprises, Alstom UK, Shell UK, Doosan et SSE ont prévenu que la réforme du système européen d'échange de quotas d'émissions (ETS) compris dans le paquet climat-énergie 2030 n'était pas assez ambitieuse et ne répondait pas aux « enjeux immédiats » de surplus de crédits de carbone.
« Ces deux milliards de quotas excédentaires annulent l'effet positif du marché du carbone et retardent les investissements dans des technologies, des produits et des services qui contribuent à améliorer l’efficacité énergétique et à réduire les émissions de carbone sur le moyen et long terme », est-il écrit dans la lettre qu'EURACTIV a pu consulter.
« Nous soutiendrions avec force l’initiative britannique en vue de prendre des mesures supplémentaires permettant de traiter les excédents produits par le système avant 2021, dont l'abandon des crédits carbones européens », ont poursuivi les PDG des entreprises.
La réserve de marché proposée par l'UE dans le cadre de l'ETS stabiliserait les prix du carbone en retirant le cas échéant environ 100 millions de crédits carbone.
Peu d'experts estiment toutefois que cette mesure aura suffisamment d'impact sur les prix du carbone pour dissuader le recours au charbon ou pour stimuler les domaines industriels en expansion, comme le captage et stockage du dioxyde de carbone (CSC).
En l'absence de mesures réglementaires plus strictes, le prix du carbone serait le premier levier en vue de réduire les émissions de CO2 en Europe. Même si les prix du carbone ont repassé la barre des 7 euros la tonne le 28 février dernier, ce montant est bien en deçà des 30 euros la tonne qui avait été établi juste avant le lancement du système.
« Une décennie perdue »
Selon une représentante de l'entreprise énergétique française Alstom, un prix du carbone faible et des objectifs en matière d'énergie et de climat, qui tardent à être fixés, risquent d'aboutir à une « décennie perdue » pour l’industrie verte.
« Les entreprises en subiront fortement les effets […] et plus que ce que vous pouvez imaginer. Les sociétés élaborent des plans d'entreprises très longtemps à l’avance, par conséquent, un retard de même quelques mois peut avoir des répercussions majeures. L'industrie ne peut pas se permettre de prendre du retard. »
« La réserve de stabilité du marché assurera la stabilité nécessaire à l'ETS, mais elle doit être établie bien avant 2021 pour s'attaquer aux excédents de crédits carbone dont le nombre devrait atteindre plus de deux milliards en 2020. »
En demandant la fixation d’un prix plancher du carbone sur le marché britannique, la Confédération de l'industrie britannique n'a pas fait grand-chose pour dissiper le pessimisme quant au marché du carbone.
Neil Verlander, porte-parole des Amis de la Terre, a qualifié de « décevante » ces dernières nouvelles.
« Un prix plancher n'est pas la solution parfaite, mais réduire ses ambitions enverrait un mauvais message aux investisseurs », a-t-il poursuivi.