Les pays européens devraient avoir des objectifs contraignants en matière d’installation de technologies pour capturer et stocker les émissions de dioxyde de carbone d’ici à 2030, selon un nouveau rapport de la Commission européenne.
Le groupe d’experts scientifiques sur le climat de l’ONU a annoncé que la technologie de captage et de stockage de CO2 pourrait réduire de plus d’un cinquième les émissions mondiales de dioxyde de carbone d’ici à 2050. Selon le nouveau rapport, rédigé par un groupe de consultants pour la Commission européenne, il s’agit là d’un « besoin véritable et urgent » pour l’Europe.
Le captage et stockage du dioxyde de carbone (CSC) est une technologie expérimentale permettant de piéger les émissions des centrales électriques afin de réduire leur impact sur le changement climatique.
« La feuille de route de l’UE sur le CSC comprend des objectifs contraignants pour 2030 et démontre clairement la détermination des membres de la convention climat (CCNUCC) à concrétiser les ambitions de l’UE en matière de CO2 et à maintenir ainsi la position de l’UE au cœur du débat climatique », explique le rapport de l’UE consulté par The Guardian.
Il appelle les pays membres à développer les feuilles de route CSC et la Commission à préparer une liste des sites de stockage CSC potentiels.
Graeme Sweeney, président de la Plateforme technologique européenne pour une production d’énergie sans émission, a déclaré que les objectifs CSC se devaient d’être ambitieux. « Nous devrions placer quelque chose de l’ordre de 220 millions de tonnes de CO2 sous terre à travers l’UE d’ici à 2030 », a-t-il précisé à The Guardian.« Trois quarts de cette quantité devraient provenir du secteur énergétique et au moins un quart de sources industrielles, telles que l’acier, le ciment ou l’aluminium. »
Un financement plus équitable
Graeme Sweeney, également ancien conseiller CO2 pour Shell, a aussi appelé à une « égalité des politiques » dans le financement public du CSC et de technologies fiables en matière de réduction des émissions de carbone, telles que les énergies renouvelables ou l’efficacité énergétique.
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En effet, la Commission n’a pas encore fixé d’objectifs contraignants pour 2030 en ce qui concerne les énergies renouvelables ou les économies d’énergie. Certains défenseurs de l’environnement craignent que le CSC n’encourage l’extraction d’énergie fossile à se poursuivre toujours aussi intensément, en enfermant les futures émissions, et ne détourne les investisseurs d’autres projets à faibles émissions.
Simon Bennet, analyste CSC pour l’Agence internationale de l’énergie, a néanmoins rappelé qu’il était important de rejeter « ce favoritisme inutile » dans les politiques de réduction des émissions carbone. Il n’a tout de même pas été jusqu’à appeler à un financement équitable du CSC.
Un investissement de valeur pour l’UE
« Le CSC reste une technologie essentielle si nous voulons atteindre nos objectifs mondiaux pour le climat », a-t-il affirmé à The Guardian. « Nous pensons que c’est le moment opportun pour que l’UE commence à proposer des politiques qui montreront au secteur industriel et aux parties prenantes de l’UE que le CSC est un investissement de valeur pour l’Europe.
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Le gouvernement britannique et certaines entreprises de combustibles fossiles ont fait pression pour une approche neutre sur le plan technologique, qui permettrait d’attirer plus d’argent public pour relancer l’industrie du CSC.
À échelle mondiale, les programmes de démonstration du CSC n’ont pas été à la hauteur des résultats attendus. En Europe, la Commission espérait voir entrer 12 grandes centrales CSC en activité, mais jusqu’à présent, seules deux, situées en Norvège, sont opérationnelles, et il n’en n’existe que 13 dans le monde.
La plupart d’entre elles sont liées à la récupération assistée du pétrole, une technique qui permet d’injecter du carbone liquéfié dans des champs de gaz et de pétrole épuisés afin d’extraire les derniers combustibles fossiles avant que les champs soient recouverts.
Le rapport propose de rendre les données sur les champs de gaz et de pétrole accessibles afin d’améliorer la phase d’exploration du CSC.
Les défenseurs de l’environnement ont salué la recommandation du rapport concernant la mise en place en Europe de normes de performance à l’américaine en matière d’émissions, qui seraient compatibles avec le système européen d’échange des quotas d’émissions de carbone.
« La Commission n’a désormais plus d’excuses pour repousser le débat essentiel sur le rôle de cette politique pour les centrales énergétiques », a déclaré Darek Urbaniak, chargé de la politique énergétique chez WWF. « Non seulement elle nous permettra d’éviter le monopole des infrastructures les plus polluantes, mais elle nous fournira des signaux clairs sur les investissements pour la décarbonisation du secteur de l’électricité. »