Les révélations des Panama papers ont poussé les ministres des Finances à accélérer la lutte contre la fraude fiscale. Tout le monde n’est cependant pas convaincu par les propositions de la Commission européenne. Un article d’EURACTIV Allemagne.
« La notion d’urgence est à présent plus ancrée », soulignait le 23 avril le ministre des Finances néerlandais, Jeroen Dijsselbloem, qui présidait une rencontre entre ses homologues à Amsterdam. La Commission européenne souhaite en effet établir une liste de paradis fiscaux d’ici la fin de l’été.
Michel Sapin, le ministre français des Finances, craint notamment que le scandale des Panama papers n’alimente les populismes européens et le sentiment d’une société à deux vitesses. « Si nous ne réagissons pas assez rapidement, le populisme se renforcera », assure-t-il.
Liste noire
Les ministres européens ont décidé de s’accorder sur les mesures qui permettraient à la Commission de rédiger sa liste d’ici le mois de mai. Ils ont également approuvé le lancement d’un projet pilote sur l’échange automatique des données sur les sociétés-écrans et les holdings utilisées pour soustraire des actifs aux impôts.
La proposition de publier des informations financières et relatives à l’impôt des grandes entreprises ne fait toutefois pas l’unanimité. L’exécutif propose d’appliquer cette règle aux sociétés dont le chiffre d’affaire dépasse les 750 millions d’euros.
Concurrence et secret d’affaire
Jeroen Dijsselbloem a défendu le projet, arguant que les citoyens européens devraient pouvoir voir « où les grandes entreprises paient leurs taxes ». Il a cependant souligné que certains États membres s’inquiétaient du désavantage concurrentiel que cela constituerait pour certaines entreprises visées. Selon eux, les concurrents de ces entreprises seraient en effet en mesure de s’informer sur leurs stratégies commerciales en épluchant les informations publiées.
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Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances allemand, attaque d’un autre angle. Pour lui, la publication de ces informations, et la chasse aux sorcières qui pourrait s’ensuivre, décourageraient les entreprises à partager leurs données avec les autorités fiscales. Il défend donc l’idée de réserver ces informations aux autorités fiscales compétentes.
Malte et l’Autriche ont également exprimé leur opposition à la proposition. Jörg Schelling, le ministre autrichien des Finances, a appelé ses homologues à ne pas négliger leurs objectifs en cédant à l’« hystérie de l’affaire de Panama ».
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