Un demi-million de Grecs expatriés privés de référendum

Alexis Tsipras, du parti Syriza, est arrivé au pouvoir grâce à son programme anti-austérité. [Karl-Ludwig Poggemann/Flickr]

Au moins un demi-million de Grecs expatriés ne pourront pas voter pour ou contre la proposition des créanciers internationaux, sauf s’ils reviennent dans leur pays avant le référendum de dimanche.  

La loi grecque ne permet pas de voter depuis l’étranger. Les Grecs doivent donc rentrer chez eux pour faire entendre leur voix.

Depuis la crise financière de 2007-2008, 505 666 Grecs ont quitté leur pays, qui a subi deux plans de sauvetage financiers et des années de dure austérité et de chômage, indique Eurostat, le bureau des statistiques européennes.

Le véritable nombre de Grecs privés de leur droit de vote pourraient être encore plus élevé puisqu’Eurostat ne possède pas les chiffres pour 2007, 2009, 2014 et 2015.

Lors du référendum de dimanche, les Grecs auront le choix d’accepter ou non les nouvelles propositions des créanciers de l’État hellénique. En réalité, ce vote semble équivaloir à la décision de rester ou sortir de la zone euro.

Vote des expatriés

L’interdiction de vote des Grecs expatriés à l’étranger n’est pas nouvelle et a été appliquée lors des élections de janvier, remportées par Syriza. Ce référendum soudain, annoncé le 27 juin seulement, n’a pas donné aux expatriés le temps d’organiser leur voyage en Grèce pour voter.

Le dimanche 27 juin, le Premier ministre Alexis Tsipras a mis un terme aux négociations avec les créanciers à Bruxelles, avant d’annoncer qu’il demanderait au peuple grec, par référendum, s’il accepte les coupes dans les retraites et les augmentations des impôts en échange d’un nouveau plan de renflouement.

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Un « non » pourrait entrainer la sortie de la Grèce de la zone euro, peut-être même de l’Union européenne, et un retour à la drachme. Avec un « oui », il serait difficile pour le parti anti-austérité au gouvernement, Syriza, de rester au pouvoir.

La Grèce, qui n’a pas payé ses dettes au FMI dues au 30 juin, est désormais au bord de la faillite. C’est la première économie développée qui ne rembourse pas une dette au FMI.

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Le FMI est l’un des trois prêteurs internationaux de la troïka, avec la Banque centrale européenne et l’Union européenne, et a renfloué le pays grevé de dettes deux fois, en lui prêtant un total de 240 milliards d’euros depuis 2010.

Les ministres des Finances de la zone euro ont déclaré qu’ils ne reprendraient les négociations qu’après le vote. Une décision qui a été reprise par des dirigeants européens, dont Angela Merkel, la chancelière allemande.

Ridicule et illégal

Avgi Papadopoulou, 28 ans, est arrivée en Belgique en 2010. Elle travaille désormais pour une association professionnelle, pour laquelle elle organise des événements, à Bruxelles.

« Je trouve ridicule et illégal que nous ne puissions pas voter depuis l’étranger », s’est-elle indignée, « et de nombreux expatriés grecs, si ce n’est tous ceux que je connais, pensent la même chose ».

Avgi Papadopoulou rentre en Grèce demain pour voter à Athènes. Elle a dépensé 300 euros pour son billet d’avion et devra faire 10 heures de bus pour arriver jusqu’au bureau de vote.

« Je vais voter non, car c’est la seule solution sage et décente du point de vue financier », a-t-elle expliqué.

Nikos Gamouras, 27 ans, a emménagé à Bruxelles en 2006. Il travaille maintenant chez ALDA, l’association européenne pour la démocratie locale. Les expatriés devraient pouvoir voter depuis les ambassades, a-t-il estimé.

« Malheureusement, je ne rentre pas pour le référendum », a-t-il regretté. « Je n’ai pas pu prévoir un voyage à la dernière minute.  »

« C’est très frustrant et beaucoup de mes amis qui vivent ici sont aussi très frustrés. En vivant à l’étranger, vous suivez l’actualité grecque, et vous vous sentez concernés, mais vous ne pouvez pas y prendre part », a ajouté Nikos Gamouras.

Selon ces deux jeunes Grecs, leurs amis sont partagés entre le oui et le non, ce qu’Avgi Papadopoulou trouve « terriblement effrayant ».

Margaritis Schinas, porte-parole de la Commission européenne, vit à Bruxelles et est rentré en Grèce pour voter.

Pour l’instant, les sondages n’ont pas donné d’indication claire sur l’issue du référendum. Une enquête divulguée aux médias grecs le 2 juillet donne 43 % au non et 47 % au oui.

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Le référendum pourrait cependant encore être annulé ou suspendu. Le plus haut tribunal administratif grec, le Conseil d’État, doit statuer aujourd’hui sur sa légalité

La représentation permanente grecque auprès de l’UE a en effet rappelé que « les citoyens grecs ne peuvent pas voter depuis l’étranger. Cela s’applique au référendum, aux élections – générales ou régionales – à l’exception des élections pour le Parlement européen. « Les raisons sont principalement techniques étant donné le système de circonscription de la Grèce. Il serait toutefois exagéré de dire que les élections en Grèce ne sont pas suffisamment représentatives.  »

L’ensemble de la diaspora grecque dans le monde représente environ 11 millions de personnes, soit presque le même nombre que la population en Grèce. Ce chiffre inclut néanmoins les Grecs de deuxième et troisième générations.

Le parti anti-austérité Syriza a remporté une victoire écrasante lors des élections anticipées du 25 janvier dernier en Grèce, mais il n'a pas obtenu une majorité absolue au parlement.

Son chef de file, Alexis Tsipras, a affirmé que le « cercle vicieux de l'austérité » était terminé, déclenchant ainsi des réactions variées au sein de l'UE.

Alexis Tsipras a annoncé que la dette publique grecque n'était pas viable et a demandé sa restructuration. La dette représente 177 % du PIB du pays. 

  • 5 juillet : référendum grec

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