Les normes alimentaires posent problème aux négociations du TTIP

11857609w [@EFE/Olivier Hoslet]

Les différences abyssales des normes alimentaires sont en train de noyer les négociations commerciales entre les États-Unis et l’Union européenne.  Un article d’EURACTIV Espagne.

Depuis 2013, les États-Unis et l’UE tentent de donner vie à ce qui pourrait être le plus grand accord commercial du monde. Pourtant, à ce jour, le partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (TTIP) est embourbé.

Un des principaux écueils auquel se heurte le TTIP est le chapitre dédié aux mesures phytosanitaires, estime Brian Kilgallen, qui fait partie des négociateurs de la Commission européenne.

Lors d’une rencontre récente à l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il a soutenu que l’accord augmenterait le commerce avec le reste du monde et « encouragerait d’autres pays à adopter des normes similaires ».

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Le représentant de la Commission a réfuté l’idée selon laquelle le TTIP provoquerait un affaiblissement des normes de l’UE de sécurité alimentaire. Pour lui, le principe de précaution, selon lequel une politique ou une action peut-être abandonnée si elle nuit aux personnes ou à l’environnement ou s’il n’y a pas de consensus scientifique, n’est pas menacé.

Cette approche, employée par de nombreux pays importateurs d’aliments face aux menaces inattendues ou à la pression de l’opinion publique, contraste avec l’exigence américaine dans gestion des risques à partir de preuves scientifiques.

La disparité des principes s’observe sur des questions comme l’utilisation des pesticides, des hormones, des antibiotiques dans la production animale, les produits transgéniques, l’étiquetage des aliments, y compris les appellations d’origine.

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Brian Kilgallen a rappelé que les organismes génétiquement modifiés (OGM) étaient exclus des discussions, lors desquelles « on ne négocie pas les différentes normes ».

Il a affirmé que la Commission faisait pression pour atteindre un niveau de transparence « équitable » lors des contrôles et avoir des procédures d’importation équivalentes. Il a mis l’accent sur le bien-être animal et la résistance antimicrobienne, entre autres.

L’exécutif plaide pour une régionalisation de la prévention des infections, a-t-il expliqué, faisant référence à cet instrument qui vise à isoler les zones touchées par une épidémie pour ne pas que tout le commerce avec l’UE soit interrompu par peur de contagion.

Pour Juergen Knirsh, coordinateur pour le commerce, chez Greenpeace, l’UE « veut clairement se débarrasser des normes européennes en soutenant que ces dernières ne s’appuient pas sur la science ».

C’est ce qui ressort des documents classifiés des négociations consultés par l’ONG le mois dernier, qui révèlent les pressions exercées par les États-Unis pour que l’UE s’adapte à ses demandes.

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Vu comment sont négociés les chapitres, Juergen Knirsh estime qu’arrivera un moment lors duquel les négociateurs devront donner la priorité à certaines questions. À ce moment-là, la protection des consommateurs et de l’environnement risque d’être la grande perdante.

« Le TTIP est plus dangereux [que d’autres accords] car il englobe presque tous les sujets, sauf les services culturels et audiovisuels », a soutenu Juergen Knirsh.

Sebastian Hielm, expert au secrétariat du groupe « Codex Alimentarius », a quant à lui rappelé que les traités commerciaux ne pouvaient pas enfreindre les règles mondiales de l’Organisation mondiale du commerce. En matière de sécurité des aliments, l’OMC prend celles du Codex comme référence universelle.

Ce recueil de normes alimentaires, approuvé au niveau international, fixe le niveau minimum devant être respecté pour garantir le bon état des aliments, a observé Sebastian Hielm.

Par ailleurs, l’OMC permet aux gouvernements d’adopter des mesures influant sur le commerce pour protéger la santé des personnes et des animaux, ou préserver les plantes, à condition qu’elles ne soient pas discriminatoires ou des mesures de protectionnisme déguisé.

Sebastian Hielm a souligné le fait que les accords commerciaux permettaient d’apporter des réponses à des questions qui n’étaient pas traitées à l’OMC, comme la manière de combattre la propagation de maladies animales par exemple.

Selon lui, ces accords peuvent être des « catalyseurs de changement », puisque « si les plus grands exportateurs d’aliments s’accordent sur des normes communes, les autres seront obligés de suivre ».

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