Le commissaire européen au budget, Günther Oettinger, s’est rendu à Rome le 13 septembre pour présenter la proposition de budget européen à long terme. Il ne s’est toutefois entretenu qu’avec le chef de file du Mouvement 5 étoiles et vice-premier ministre italien, Luigi Di Maio.
Tout indique que pour traiter avec l’Italie, Bruxelles préfère se tourner vers le Mouvement 5 étoiles (M5S) que vers la Ligue. La semaine dernière, Jean-Claude Juncker, a critiqué le partenaire de coalition de Luigi Di Maio, le leader de la Ligue du Nord, Matteo Salvini.
« Le commissaire n’avait pas encore discuté du cadre financier pluriannuel avec le nouveau gouvernement », a affirmé une source du cabinet de Günther Oettinger. « L’idée était un échange de visions direct avec le vice-premier ministre. »
Günther Oettinger s’est déjà rendu dans les 27 États membres, principalement avant d’avoir soumis la proposition, et s’était aussi entretenu avec le gouvernement italien précédent.
Après la réunion, Luigi Di Maio a déclaré à la presse qu’ils avaient également parlé d’immigration. « J’ai apprécié que le commissaire dise que le système d’asile de Dublin était d’un autre temps, qu’il était obsolète et qu’il fallait passer à autre chose. Nous devons maintenant transformer ces paroles en actes », a-t-il souligné.
Le commissaire a aussi rencontré le président de la chambre des députés, Roberto Fico, une autre figure clé du M5S, et deux membres indépendants du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères, Enzo Moavero Milanesi et le ministre des Affaires européennes, Paolo Savona.
Même si Paolo Savona est proche de la Ligue, il n’est pas affilié au parti, qui partage le pouvoir avec le Mouvement 5 étoiles en Italie. Aucun membre du parti de Matteo Salvini n’a été consulté par le commissaire.
Plus tard, Günther Oettinger a participé à une audition conjointe avec les commissions affaires européennes et budget du Parlement et le sénat italien.
Discussions sur le budget
Luigi Di Maio et Günther Oettinger se sont disputés en août, lorsque Luigi Di Maio a menacé de retirer des milliards d’euros de contribution au budget de l’UE pour l’immigration, accusant l’Europe de tourner le dos au pays aux prises avec des arrivées sans fin de migrants en Méditerranée.
Günther Oettinger n’a pas manqué de répondre à la menace en disant qu’il ne serait pas intelligent de bloquer les négociations, car cela nuit à tous les États membres, aux citoyens, aux agriculteurs, aux chercheurs et à la compétitivité de l’UE.
« Notre position sur la planification du budget européen n’a pas changé pour le moment », a déclaré M. Di Maio après la réunion avec M. Oettinger, confirmant que l’Italie est toujours prête à opposer son veto aux négociations budgétaires de l’UE en raison de la lutte acharnée avec la Commission sur le dossier des migrants.
« Pour l’instant nous sommes très inquiets des discussions sur le prochain budget », a-t-il ajouté.
Le commissaire Oettinger est devenu la cible préférée de l’Italie depuis le tollé provoqué par sa déclaration dans une interview lors de laquelle il a dit que les marchés apprendraient aux Italiens à voter.
Juncker et Salvini
Mercredi, le chef de la Commission, M. Juncker, s’en est pris à Matteo Salvini lors d’un entretien avec la presse internationale.
« Salvini a dit que pendant la campagne électorale, chaque fois que j’ouvrais la bouche, il gagnait des votes. Je ne veux pas lui être utile, mais utile à l’Italie », a déclaré le Luxembourgeois.
Interrogé sur la possibilité d’un dialogue entre le Parti populaire européen et la Ligue, Jean-Claude Junker a déclaré à la presse qu’il ne voyait pas une seule raison pour laquelle le PPE devrait développer un partenariat avec Salvini.
« Nous avons déjà Orban, c’est bien suffisant », a-t-il asséné.
Alors qu’il était « stupéfait par les attaques incessantes du vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur Matteo Salvini contre Bruxelles », le président de la Commission s’est dit en bons termes « avec le Premier ministre Conte, mon ami Giuseppe ».
Le président de la Commission a dit aux journalistes qu’il avait eu un appel téléphonique avec Giuseppe Conte mardi soir. « Nous avons parlé de ce que j’allais dire [dans le discours sur l’état de l’Union] aujourd’hui. En Italie, une partie du gouvernement craignait que j’attaque l’exécutif italien. »
« Ils pensaient que je les attaquerais de la même manière qu’ils attaquent l’UE et la Commission », a-t-il conclu.