Les autorité de régulation indépendantes européennes s’interrogent sur la transposition juridique « du droit à l’oubli ». L’objectif est de donner la possibilité aux citoyens de faire appel afin de retirer des informations non désirées affichées par les moteurs de recherche, comme Google.
L’hypermnésie dont est atteint Internet pourrait bientôt appartenir au passé. Un groupe de travail constitué de régulateurs européens cherche à clarifier certains points à la suite d’un arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne qui donne pour la première fois le droit aux Européens de demander à des moteurs de recherche de supprimer des informations sur internet les concernant.
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Plusieurs lignes directrices en cours d’élaboration devraient être publiées fin novembre par le Contrôleur européen de la protection des données. Elles devraient proposer les différentes formes de recours qui peuvent être déposés par les citoyens. En outre, elles visent à aider les autorités à trancher entre le droit public à l’information et le droit au respect de la vie privée de l’individu.
« [Les autorités chargées de la protection des données] élaborent actuellement les critères, mais aussi le système de coordination », a expliqué Peter Hustinx, à la tête du Contrôleur européen de la protection des données lors de la réunion du Groupe de travail « Article 29 » (WP29). Le Contrôleur européen des données est chargé de coordonnée l’action des autorités indépendantes comme la CNIL en France.
« Il y a une forte volonté de mettre un système coordonné entre autorités de régulation », selon lui.
Les lignes directrices ont pour but de guider les régulateurs. À l’aide de certains critères comme le rôle public de la personne, si l’information porte sur un crime, et sur l’ancienneté du crime, les autorités pourront déterminer plus facilement le maintien ou non d’informations sur le réseau avec le nom de la personne concernée.
« Nous voulons une série d’instruments afin de contribuer à la prise de décision dans des affaires difficiles et trancher entre le droit à la vie privée de l’individu sur Internet et l’intérêt général », a expliqué plus tôt dans le mois Isabelle Falque-Pierrotin, par ailleurs à la tête d’une organisation de protection de la vie privée et du WP29.
Google a déclaré avoir reçu plus de 120 000 demandes en provenance de l’Europe pour retirer de son moteur de recherche une pléthore de résultats allant d’antécédents criminels à des articles médiatiques pernicieux, en passant par des photographies gênantes.
L’arrêt de mai rendu par la CJUE a déclenché un débat enfiévré entre les chantres de la liberté d’expression, qui considèrent que cette décision va permettre de blanchir le passé de certains individus, et les défenseurs du respect de la vie privée, qui voient ce dispositif comme une façon de limiter un tant soit peu la visibilité de certaines informations personnelles.
Le géant d’Internet, qui gère plus de 80 % des demandes de recherche sur le réseau européen, avait été vertement critiqué pour sa gestion des demandes faites au nom du « droit à l’oubli ». Le fait de restreindre ce droit aux seuls sites européens, par exemple, a suscité de nombreuses interrogations et inquiétudes parmi certaines organisations.
« Nous avons l’impression jusqu’à ce jour que les décisions de Google en la matière ne sont pas cohérentes », a expliqué Isabelle Falque-Pierrotin.
Près de 90 recours ont été intentés contre les décisions du moteur de recherche par les organismes de protection de la vie privée en Grande-Bretagne, 70 en Espagne, 20 en France et 13 en Irlande.