Une large majorité des parlementaires européens s’est prononcée en faveur d’une solution à deux États. Mais pour rallier la droite européenne, la déclaration a été fortement édulcorée.
C’est une première au Parlement européen. Les eurodéputés rassemblés à Strasbourg ont adopté le 17 décembre à une large majorité une résolution non contraignante favorable à la reconnaissance d’un État palestinien. La résolution a été adoptée par 498 votes pour, 88 contre et 111 abstentions sur 697 eurodéputés présents.
L’épineuse question avait toujours été soigneusement évitée par les élus européens, qui ne disposent pas d’un pouvoir de décision en matière de politique étrangère, laquelle reste la compétence des États membres.
Large soutien
Une large partie des socialistes et démocrates (S&D) ainsi que les libéraux (ALDE), les Verts et la gauche radicale ont soutenu la résolution. Plusieurs votes provenant des Italiens du Mouvement cinq étoiles, membre du groupe eurosceptique de Nigel Farage ont également soutenu la résolution.
« C’est une victoire politique majeure qui doit permettre de sensibiliser l’opinion publique au sein de l’Union européenne et déclencher un mouvement de reconnaissance similaire dans les différents Parlements des États membres » s’est félicité l’eurodéputé socialiste français Gilles Pargneaux, à l’origine de la résolution.
Si l’adoption de la résolution constitue un véritable virage politique, le texte aura cependant perdu des plumes dans le processus de négociation entre les différents groupes politiques.
>>Lire : Le Parlement européen pourrait reconnaître l’État palestinien
En effet, initialement proposé par les socialistes européens, l’idée d’une résolution en faveur de la reconnaissance de l’État palestinien bénéficiait du soutien des Verts mais aussi d’une partie des libéraux.
Pour convaincre plus largement et notamment faire monter à bord la droite européenne, les négociateurs ont dû mettre de l’eau dans leur vin et s’accorder sur une formulation d’une extrême prudence.
La résolution négociée « appuie en principe la reconnaissance de l’État palestinien et la solution fondée sur les deux États, et estime que celles-ci devraient aller de pair avec le processus des pourparlers de paix, qui devrait être mis en place. »
Un véritable rétropédalage par rapport à la formulation d’origine prévue par le texte socialiste. « Le texte est en effet plus faible que la formulation initiale dans laquelle nous appelions les États membres à reconnaitre l’État palestinien. Mais il s’agit d’un compromis acceptable » a affirmé Gilles Pargneaux.
Du côté du PPE, le texte est d’ailleurs présenté comme une résolution portant sur le processus de paix au Proche Orient, et non pas un appel à la reconnaissance de l’État palestinien.
La résolution soutien par ailleurs une solution à deux États « sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem pour capitale des deux entités, à savoir un État d’Israël dont la sécurité est assurée et un État de Palestine indépendant.
Enfin, à défaut d’appeler directement les États membres à reconnaitre la Palestine, la résolution demande à la haute représentante pour les Affaires étrangères de l’UE, Federica Mogherini « à faciliter une position commune de l’Union à cet égard ».
Effet d’entrainement
Le vote du Parlement européen est intervenu dans la foulée d’un mouvement de reconnaissance entamé par la Suède il y a quelques semaines. Le pays nordique est le premier pays d’Europe occidental à reconnaitre l’État palestinien.
>>Lire : La Suède a lancé un véritable défi à l’Europe en reconnaissant la Palestine
Plusieurs parlements nationaux ont également pris position en faveur d’un État palestinien à la suite de la décision suédoise, parmi lesquels les parlements britanniques et français.
>>Lire : L’Assemblée nationale dit « oui » à la reconnaissance de l’État palestinien
135 pays reconnaissent l’État palestinien
Au total, 135 pays reconnaissent l’État palestinien. Au sein de l’Union européenne, les pays de l’ancien bloc de l’Est ont tous reconnu la Palestine avant leur adhésion à l’UE : la Bulgarie, Chypre, la République tchèque, la Hongrie, Malte, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie. Et tous ont reconnu l’État palestinien avant de rejoindre l’UE.
Dans les pays candidats à l’adhésion à l’UE, le Monténégro, la Serbie, la Turquie et la Bosnie font également partie des pays reconnaissant l’État palestinien.
Décision sur le Hamas
Hasard de calendrier, le 17 décembre le Tribunal de l’union européenne a décidé de retirer le Hamas de la liste des organisations terroristes. Une décision justifiée par la justice européenne pour un vice de procédure, qui a immédiatement déclenché la colère d’Israël.
Le porte-parole de Federica Mogherini a rapidement réagi, affirmant que la décision de la Cour de justice « n’était pas une décision politique de la part des gouvernements des États membres de l’UE ».