Véritable poudrière depuis le début de la crise ukrainienne, le Partenariat oriental doit revenir sur la table des discussions dans trois mois à Riga. Une rencontre que le ministre des Affaires étrangères letton qualifie de « sommet de la survie ».?
Edgars Rink?vi?s, le ministre des Affaires étrangères letton, n’a pas mâché ses mots lors d’un événement organisé par le bureau européen du groupe de réflexion Konrad-Adenauer-Stiftung. Trois mois avant le sommet sur le Partenariat oriental, qui se déroulera les 21 et 22 mai en Lettonie, pays à la présidence tournante de l’UE, il estime qu’il existe « plus de problèmes brûlants que jamais auparavant ».
Le Partenariat semble en effet être dans une mauvaise passe, et ressemble de plus en plus à une tentative ardue de l’UE de s’entendre avec ses voisins européens. L’initiative, qui inclut l’Ukraine, la Moldavie, la Biélorussie, la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, a notamment compliqué les relations entre Bruxelles et Moscou.
Mauvaise passe
Le denier sommet s’était déroulé à Vilnius en novembre 2013 et avait marqué le début de la crise ukrainienne. C’est en effet à cette occasion que Viktor Ianoukovitch, l’ancien président ukrainien, avait refusé de signer un accord d’association avec l’UE. Cette décision avait déclenché de grandes manifestations pro-UE à Kiev, puis l’éviction du président, première étape de la crise dans l’est de l’Ukraine, où les habitants soutenaient Viktor Ianoukovitch et son attitude pro-russe avec enthousiasme.
Edgars Rink?vi?s a pour sa part déclaré que l’Ukraine était en proie à une « guerre » et que la Russie voulait revoir le système de sécurité internationale et s’assurer une emprise plus grande dans sa zone d’influence. Selon le ministre letton, il s’agit d’un « retour à la politique du 19ème siècle ».
Pas de consensus au sein de l’UE
Edgars Rink?vi?s estime qu’il n’existe pas de « stratégie de repli » par rapport au Partenariat oriental, mais que l’UE devait définir précisément l’objectif final de cette initiative. À l’heure actuelle, il n’existe pas de consensus entre les États membre quant à une éventuelle adhésion à l’UE des pays du Partenariat oriental.
Le Letton ajoute qu’il faudrait en outre développer des liens plus individuels avec chacun des pays partenaires. Si trois d’entre eux, l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie, souhaitent signer un accord d’association avec l’UE, l’Arménie lui a quant à elle préféré l’Union douanière dirigée par la Russie. De son côté, Baku voudrait conserver telles quelles ses relations avec l’UE, selon Edgars Rink?vi?s.
Celui-ci affirme que certains pays de l’UE considèrent le sommet du Partenariat comme « une discussion procédurière », alors que d’autres, dont la Lettonie, en attendent de réels résultats. Cette remarque du ministre concerne probablement la possibilité d’accorder un régime d’exemption de visa à l’Ukraine et à la Géorgie. Dans le jargon européen, on appelle cette étape la « libéralisation des visas », alors que la « facilitation des visas » est offerte aux pays moins avancés dans le processus d’assouplissement des règles concernant les visas avec l’UE.
La France et le Danemark s’opposent à une telle mesure. Edgars Rink?vi?s n’a d’ailleurs pas hésité à mentionner « Paris et Copenhague » comme les États « appelant à plus de prudence » dans l’instauration d’un régime d’exemption de visa avec la Géorgie et l’Ukraine.
Le ministre des Affaires étrangères souligne également que la Biélorussie a joué un rôle constructif depuis le début du conflit ukrainien. Bien qu’allié de Moscou, le pays n’a en effet pas reconnu l’annexion de la Crimée et plusieurs rencontres diplomatiques ont eu lieu dans sa capitale, Minsk.
De nouvelles alliances
Quand les journalistes lui ont demandé s’il comptait inviter Alexander Loukachenko, le président biélorusse, au sommet de Riga, Edgars Rink?vi?s a répondu que la Lettonie espère que les chefs d’Etat et de gouvernement de tous les pays représentés seront présents. Alexander Loukachenko, qui portait encore récemment l’étiquette du « dernier dictateur d’Europe », avait été exclu des précédents sommets du Partenariat oriental. Le ministre letton a cependant ajouté que cette décision devrait être prise de concert avec les 27 autres États membres de l’UE.
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