Dix ans après l’avoir ratifiée, la France accuse un « lourd retard » dans l’application de la Convention d’Istanbul, traité du Conseil de l’Europe luttant contre les violences faites aux femmes, déplorent mercredi des associations qui s’alarment d’un nouveau recul en cas d’arrivée au pouvoir de l’extrême droite.
Entrée en vigueur le 1er août 2014, la Convention d’Istanbul a été ratifiée à ce jour par une trentaine d’États membres du Conseil de l’Europe et par l’Union européenne.
Elle oblige — sur le papier du moins — les gouvernements à adopter une législation réprimant la violence à l’égard des femmes, le harcèlement sexuel, les mutilations génitales féminines, le mariage forcé, et à prévoir des refuges pour les victimes de violences.
Mais dix ans après, « la législation française n’est toujours pas conforme à la Convention d’Istanbul, et quand le droit la respecte plus ou moins, la mise en œuvre est rarement à la hauteur », estiment cinq associations de défense des droits des femmes dans un communiqué publié mercredi.
La Fédération nationale Solidarité Femmes, la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF), la Cimade, le Planning familial et les Féministes contre le cyberharcèlement indiquent avoir remis lundi un rapport dans ce sens au Grevio, le mécanisme de suivi de cette Convention.
« Les mesures mises en place, de manière éparse et éclatée, concernent quasi exclusivement, et encore insuffisamment, les violences conjugales » et « font moindre cas des violences sexistes, sexuelles et des cyberviolences et excluent les groupes minorisés et marginalisés à l’instar des femmes étrangères et des femmes en situation de handicap, pourtant surexposées à ces violences », pointent les associations.
Face à ce « lourd retard », la possible arrivée au pouvoir — à l’issue des élections législatives anticipées — de l’extrême droite « opposée à ce texte, constitue une menace sérieuse pour les droits des femmes, la lutte contre les violences et l’application de la Convention », jugent-elles.
Tout en dressant un bilan sévère des « manquements » de la France, les associations saluent plusieurs mesures prises ces dernières années par les pouvoirs publics (déploiement de 3 000 téléphones grave danger supplémentaires, le renforcement du recours aux bracelets anti-rapprochement, création d’un fichier des auteurs de violences conjugales, renforcement de la gouvernance locale de la politique de lutte contre les violences conjugales…).
Mais les mesures adoptées « demeurent éparses et éclatées » et le financement n’est pas « à la hauteur des besoins », déplorent-elles dans leur rapport remis au Grevio, critiquant un « traitement judiciaire défaillant » et un « défaut de prévention ».