Le gouvernement grec a adopté jeudi (15 février) un projet de loi visant à légaliser le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels grâce aux votes des partis progressistes de l’opposition, 51 législateurs du parti conservateur au pouvoir, Nouvelle Démocratie (Parti populaire européen, PPE), s’étant opposé au texte.
La question a divisé le parti au pouvoir et a suscité un débat intense au cours du dernier mois. L’Église orthodoxe grecque, influente sur la scène politique du pays et proche du parti Nouvelle Démocratie, s’est fermement opposée au projet de loi.
Elle a même demandé un vote par appel nominal pour faire pression sur les responsables politiques.
Le projet de loi a finalement été approuvé avec 176 voix sur 300 au Parlement. Le principal parti d’opposition de gauche, Syriza, la Nouvelle Gauche et le Mouvement socialiste panhellénique (PASOK) ont soutenu le projet de loi.
Les trois partis d’extrême droite et 51 députés de Nouvelle Démocratie — qui représentent la faction conservatrice, voire ultraconservatrice du pays — se sont fermement opposés au projet de loi ou se sont abstenus lors du vote.
L’ancien Premier ministre Antónis Samarás, membre de Nouvelle Démocratie connu pour ses positions de droite, a pris la tête du camp des opposants au projet de loi.
« Le mariage homosexuel n’est pas un droit humain », a déclaré M. Samarás lors d’un discours au parlement grec.
Pour sa part, l’actuel Premier ministre Kyriákos Mitsotákis, considéré comme le représentant de la faction libérale du parti Nouvelle Démocratie, a déclaré que « le mariage n’est rien d’autre que l’aboutissement de l’amour entre deux personnes » et a ajouté que la non-reconnaissance du mariage homosexuel était à l’origine de graves inégalités.
En début de semaine, Elena Akrita, députée Syriza, a accusé le parti au pouvoir d’« incohérence idéologique tragique » par rapport à un vote aussi historique en matière de droits fondamentaux.
« Nouvelle Démocratie n’est pas progressiste, ils n’avaient juste pas d’autre choix que d’accélérer les choses avec ce projet de loi […], surtout après que la Grèce a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme », a-t-elle déclaré à Euractiv.
Des analystes basés à Athènes estiment que cette scission porte préjudice au parti au pouvoir. Certains prévoient également que la faction d’extrême droite du parti gagnera en importance dans les mois à venir.
Une victoire trop faible
Despina Paraskeva-Veloudogianni, coordinatrice des campagnes pour Amnesty International Grèce, a déclaré que bien que la loi introduise des changements très importants, elle ne garantit pas l’égalité totale pour les parents non biologiques et ne reconnaît pas les identités au-delà du binaire de genre.
« Elle ne facilite pas l’accès aux techniques de procréation assistée pour les couples homosexuels, les hommes célibataires et les personnes transgenres et intersexes. Elle ne modifie pas non plus une disposition qui empêche de changer le nom et le sexe d’une personne transgenre dans l’acte de naissance de leurs enfants », a-t-elle déclaré.
L’inclusion de la procréation médicalement assistée a été rejetée, M. Mitsotakis déclarant qu’il ne laisserait pas la Grèce devenir « l’expérience de l’Europe ».
[Édité par Anne-Sophie Gayet]