Le président bulgare Roumen Radev a approuvé la nouvelle loi anti-LGBTI qui interdit tout programme éducatif sur « l’orientation sexuelle non traditionnelle » dans les écoles bulgares. Il ignore ainsi les appels du Conseil de l’Europe et des activistes de la société civile en faveur d’un veto.
Les amendements anti-LGBTI ont été initiés par le parti radical pro-russe Renaissance (Vazrazhdane, membre du groupe Europe des nations souveraines au Parlement européen) et adoptés avec l’aide du Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB, Parti populaire européen) et du Parti socialiste bulgare (BSP, Socialistes et Démocrates européens), un parti de gauche pro-russe.
Les amendements ont été rapidement validés par le parlement en deuxième lecture en une seule journée la semaine dernière, puis ont été publiés au Journal officiel vendredi 16 août. Avec l’approbation du président, ils vont désormais entrer en vigueur.
En vertu de la nouvelle loi, tout programme éducatif dans les écoles traitant de « l’orientation sexuelle non traditionnelle » sera qualifié de « propagande ».
Une proposition controversée
Outre une pétition signée par plus de 6 000 personnes et une manifestation appelant le président à opposer son veto à la proposition d’amendements, le Conseil de l’Europe — un organe international axé sur la défense des droits de l’Homme et la démocratie — avait également exhorté le président bulgare à ne pas donner son feu vert.
« Je suis profondément préoccupé par la récente loi adoptée par le parlement bulgare pour interdire la soi-disant “propagande” LGBTI dans les écoles, j’appelle le président Roumen Radev à ne pas la signer. Les autorités devraient s’attaquer à la discrimination et à la rhétorique hostile à l’égard des personnes LGBTI, y compris à l’approche des élections », avait écrit le commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Michael O’Flaherty, sur X le 12 août.
« Le parlement bulgare vient d’adopter une loi interdisant la représentation des identités LGBTI dans les écoles. J’appelle les autorités bulgares à prévenir et à combattre les discours de haine, la discrimination et la violence à l’encontre des personnes LGBTI, à garantir l’accès à l’information et à abroger la loi immédiatement », avait pour sa part indiqué Béatrice Fresko-Rolfo, membre de la Commission sur l’Égalité à l’Assemblée parlementaire (PACE) du Conseil de l’Europe, sur le même réseau social.
Le Haut Commissaire des Nations unies aux Droits de l’Homme avait également fait écho à ces critiques.
« Nous sommes profondément préoccupés par la promulgation d’un amendement en Bulgarie interdisant les discussions sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans les écoles et nous demandons que la loi soit révisée conformément aux obligations internationales du pays en matière de droits humains », avait déclaré Liz Throssell, porte-parole de l’instance, dans un communiqué publié vendredi 16 août.
Dans un communiqué publié vendredi, les Nations unies estiment que ce texte va « à l’encontre des garanties constitutionnelles en Bulgarie et des engagements issus de traités internationaux sur les droits humains à assurer l’égalité, la non-discrimination et la liberté d’expression ».
Le 13 juillet, la commissaire européenne à l’Égalité, Helena Dalli, avait annoncé qu’elle ouvrirait une enquête pour déterminer si cette loi anti-LGBTI est contraire au droit européen. La commissaire a envoyé une lettre au ministre bulgare de l’Éducation, Galin Tsokov, lui accordant jusqu’à la fin du mois d’août pour expliquer les tenants et les aboutissants de la nouvelle loi, les sanctions que celle-ci entraînera et sa mise en oeuvre.
« La Commission européenne est préoccupée par toute évolution qui pourrait mettre en péril la mise en œuvre effective de la législation européenne, y compris le respect des droits fondamentaux inscrits dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE », pouvait-on lire dans la lettre de la commissaire.
Une loi anti-LGBTI comme en Russie
Ancien pays communiste animé d’un très large sentiment hostile aux LGBT+, la Bulgarie n’autorise ni le mariage ni l’union civile entre personnes de même sexe, note l’AFP.
La nouvelle loi bulgare prévoit que « les actions liées à la propagande, à la promotion ou à l’incitation, de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, d’idées et de points de vue liés à une orientation sexuelle non traditionnelle et/ou à la détermination d’une identité de genre autre que biologique sont interdites ».
L’« orientation sexuelle non traditionnelle » est définie dans la loi comme « différente des notions généralement acceptées et inscrites dans la tradition juridique bulgare d’attirance émotionnelle, romantique, sexuelle ou sensuelle entre personnes du sexe opposé ».
Il y a 11 ans, la Russie était le premier pays à adopter une loi interdisant la « propagande homosexuelle » destinée aux mineurs. Depuis la guerre en Ukraine, la législation russe interdit totalement les « relations sexuelles non traditionnelles », ce qui restreint considérablement les droits des homosexuels et des personnes LGBTI dans le pays.
En Bulgarie, la loi anti-LGBTI avait été rejetée par le parlement précédent, mais elle a finalement été adoptée par l’assemblée actuelle.
Après la promulgation de la loi, l’administration présidentielle a publié un communiqué indiquant que « le chef de l’État a exprimé sa position sur les amendements à la loi sur l’éducation préscolaire et scolaire en signant un décret sur sa promulgation ».
[Édité par Anne-Sophie Gayet et Sarah N’tsia]