La gauche grecque s’insurge de la présence de Jordan Bardella à un Forum pour la démocratie organisé à Athènes

Le leader du Rassemblement national, Jordan Bardella (R), réagit alors que la présidente du parti parlementaire, Marine Le Pen (G), prononce un discours lors de la soirée électorale du parti de droite français, le Rassemblement national (RN), à Paris, en France, le 9 juin 2024, après les premiers résultats des élections européennes. [EPA-EFE/ANDRE PAIN]

Jordan Bardella, le président du Rassemblement national (RN) et du groupe des Patriotes pour l’Europe au Parlement européen, doit participer jeudi 3 octobre au Forum de la démocratie d’Athènes (1-3 octobre), mais la présence du dirigeant d’extrême droite est vivement dénoncée par la gauche grecque. 

« Le protégé de Marine Le Pen n’est pas le bienvenu à Athènes », explique ainsi pour Euractiv Nasos Iliopoulos, porte-parole du parti la Nouvelle Gauche (NA), ajoutant qu’il était « impensable » d’inviter Jordan Bardella à parler de démocratie.

« Apparemment, cette invitation reflète la perception qui prévaut au sein des partis libéraux, selon laquelle l’extrême droite peut être un allié important », a-t-il ajouté.

Pour Nikolas Farantouris, eurodéputé grec membre du parti d’opposition Syriza, le chef du RN défend une idéologie fondée sur l’intolérance et le racisme. « [Jordan Bardella] prône une Europe phobique dans une société divisée », explique-t-il. « Nous nous affrontons au Parlement européen en tant que représentants de deux mondes qui se heurtent. Mon monde déteste le fascisme et tout ce qui l’embellit ».

En Grèce, les partis traditionnels en crise après les élections européennes

Les résultats des élections européennes ont été décevants pour tous les partis traditionnels en Grèce, les citoyens ayant également tourné le dos à tous les responsables politiques avec un taux d’abstention record dans le pays.

Euractiv a contacté les organisateurs du Forum de la démocratie pour connaître les raisons de l’invitation de Jordan Bardella.

Dans une réponse par courriel, le président de la Fondation Démocratie et Culture, Achilles Tsaltas, a indiqué : « En tant que Forum, nous invitons des orateurs qui sont pro-démocratie et anti-démocratie, car c’est par la discussion et le dialogue que nous pouvons mieux comprendre, remettre en question et affronter la montée des extrêmes et de l’autoritarisme afin d’aider la démocratie à évoluer ».

Grèce : SYRIZA en terre inconnue après l’éviction du chef du parti

En Grèce, Stéfanos Kasselákis a été écarté de la direction du parti d’opposition de gauche SYRIZA, après le vote dimanche 8 septembre d’une motion de censure présentée par plusieurs membres du parti.

Un environnement politique fragile

À l’instar de plusieurs États de l’UE, les partis d’extrême droite sont en progression en Grèce. Selon un sondage récent, le parti conservateur Solution grecque (CRE), le parti Voix de la raison (Patriotes pour l’Europe) et le parti d’extrême droite Mouvement démocrate patriote — Victoire, autrement appelé « Niki » (non affilié à un groupe européen), obtiendraient 15 % des voix. Il y a quelques semaines, un autre sondage estimait qu’ils pourraient atteindre jusqu’à 20 %.

Le parti d’extrême droite Voix de la raison est dirigé par l’eurodéputée Afroditi Latinopoulou.

Cette dernière a récemment salué la victoire du Parti de la liberté (FPÖ), un mouvement d’extrême droite autrichien, lors des élections du 29 septembre, expliquant « l’UE change, la raison l’emporte ».

Les principaux partis grecs favorables à l’UE tentent de leur côté de se remettre des résultats des élections européennes. Le parti au pouvoir, Nouvelle Démocratie (PPE, centre droit), a perdu plus d’un million de voix depuis les législatives de 2023 et recueille aujourd’hui 27 % des voix, suivi par le PASOK socialiste, qui se situe à 14 %.

La principale opposition est représentée par le parti de gauche Syriza, qui arrive en cinquième position avec 7,7 % des voix.

Le PASOK et Syriza vont bientôt élire leurs nouveaux dirigeants, dans l’espoir de relancer une dynamique. En fonction des résultats de ces élections, les deux mouvements pourraient former un front « progressiste » pour contester l’hégémonie de Nouvelle Démocratie.

À Athènes, les experts estiment que la future direction du parti socialiste Pasok détient la clé du prochain gouvernement.

Nouvelle Démocratie espère l’élection d’un leader socialiste favorable à une ouverture au centre droit, mais surinvestit dans le même temps le thème de l’immigration, pour ne pas perdre des voix à droite.

La Commission européenne a récemment refusé de financer une clôture que le gouvernement grec construit à sa frontière terrestre avec la Turquie, le long du fleuve Evros, afin de freiner l’immigration irrégulière.

Les chrétiens-démocrates allemands (CDU), qui appartiennent au sein du Parlement de Strasbourg au Parti populaire européen (PPE), ont au contraire soutenu les arguments d’Athènes.

« J’attends du gouvernement fédéral et de la Commission européenne qu’ils s’assurent que nous n’abandonnons pas les États situés aux frontières extérieures comme la Pologne et la Grèce », a souligné en début de semaine pour Euractiv Alexander Throm, principal député de la CDU pour les affaires intérieures.

Le parti allemand CDU fait pression sur Bruxelles pour financer les clôtures aux frontières grecques et polonaises

Le parti allemand de centre droit CDU (PPE) a exhorté la Commission européenne, présidée par Ursula von der Leyen, membre de la CDU, à financer des clôtures aux frontières de la Grèce et de la Pologne, alors que les nouveaux contrôles aux frontières allemandes augmentent la pression sur les pays de première entrée. 

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