La menace du terrorisme en Europe « n’a pas diminué et perdure », malgré la perte de territoires de l’État islamique en Syrie et en Irak, selon le directeur du département antiterrorisme à Europol, Manuel Navarrete. Un article d’Euroefe.
« En Europe, nous continuons d’être très vigilants. La menace est importante et prend diverses formes. Nous parlons de plus de 20 incidents en 2017, d’attaques très réfléchies, comme à Barcelone ou Manchester, à d’autres moins préparées », a affirmé Manuel Navarrete.
Ce colonel de la Guardia civil [force de police espagnole] dirige depuis janvier 2016 le centre européen contre le terrorisme d’Europol. Son département œuvre au « renforcement de la réponse » des pays de l’UE à la menace terroriste, qui s’est reflété dans des attentats comme celui de Paris, Bruxelles ou Berlin.
Selon Europol, qui n’a pas encore présenté son rapport annuel, 980 arrestations liées au djihadisme ont été enregistrées en Europe l’an dernier, un chiffre légèrement inférieur à celui de 2016, avec 1 000 arrestations comptabilisées.
Quant aux conséquences du terrorisme, Manuel Navarrete signale que « même si la menace perdure, le nombre de victimes a diminué » car en 2017 il y a eu près de « 68 morts » par attentat djihadiste en Europe, contre 135 l’année précédente.
Al Qaeda
L’attention internationale est centrée sur la perte de territoire du groupe terroriste État islamique (EI) et de son « califat » autoproclamé en Syrie et en Irak, mais Manuel Navarrete rappelle que cela ne signifie pas que le groupe terroriste Al-Qaïda a disparu des radars : « les deux menaces sont simultanées », prévient-il.
Pour cet expert de la lutte contre le terrorisme, la menace de l’EI « prend des formes diverses, est difficile à établir et a de nombreuses tendances, même à l’étranger », mais elle continue à entretenir « des liens, une concurrence et des affrontements » avec Al-Qaïda.
« Parler de l’EI et d’Al-Qaïda comme un seul et même ensemble est inexact. Nous ne pouvons pas non plus dire qu’il existe une collaboration entre les deux groupes, mais il y a une certaine communication », a-t-il déclaré lors d’une interview qui a lieu au siège d’Europol à La Haye (Hollande).
Ce qui importe pour les forces de sécurité, c’est « la manière dont cela se manifeste dans les attentats ou actions terroristes », en Europe et dans le reste du monde.
L’EI a « une marque de fabrique, il est beaucoup plus agressif et impitoyable », comme en témoignent la propagande et la cruauté que ce groupe diffuse sur les réseaux sociaux avec la publication de photos et de vidéos de leurs crimes.
Toutefois, Al-Qaïda, qui a perpétré des attentats terroristes de grande envergure comme le 11 septembre 2001 à New York (3 016 morts) ou le 11 mars 2004 à Madrid (193 morts), est un « groupe tout aussi agressif et impitoyable, mais doté d’un certain degré de sophistication et de planification », selon Manuel Navarrete.
Aujourd’hui, trois sources de menace terroriste peuvent être identifiées : les acteurs solitaires qui « passent de 0 à 100 en très peu de temps », les plans « plus sophistiqués et à plus long terme » d’Al-Qaïda, et le système complexe d’action de l’État islamique, explique-t-il.
Menace croissante de l’EI à l’extérieur de la Syrie
Le recul de l’EI en Irak et en Syrie « ne réduit pas la menace terroriste » en Europe, selon Manuel Navarrete, et multiplie même un facteur de risque : les extrémistes qui ont combattu dans le « califat » sont confrontés à ce siège et cherchent à revenir dans les pays européens dont ils sont ressortissants.
« Ces dernières années, nous nous sommes préparés à et occupés de cela. Les chiffres du partage de l’information se sont multipliés, les opérations policières sont de plus en plus approfondies et de meilleure qualité, et elles sont alignées sur la lutte contre le terrorisme et la propagande en ligne », a-t-il ajouté.
Europol, agence de coordination et de coopération avec les forces de police des pays de l’Union européenne, se concentre aujourd’hui « sur l’identification, la prévention et la poursuite » de ceux qui souhaitent entrer en Europe depuis des groupes djihadistes du Moyen-Orient.