Après l’échec de la signature de l’accord d’association avec l’Ukraine en novembre, des critiques se font entendre en France sur la gestion des négociations menées par l’UE avec l’ancienne république soviétique.
Un mal pour un bien : c’est le constat effectué par le ministre en charge des Affaires européennes, Thierry Repentin, lors d’une audition à l’Assemblée nationale.
« Le président Viktor Ianoukovitch a peut-être rendu service à la fois à l’Union européenne et à la population ukrainienne en engageant un débat qui n’était pas forcément ouvert », a déclaré le ministre devant les membres des commissions des affaires européennes et des affaires étrangères. « Ianoukovitch a donné un appétit d’Europe à la population qui n’était pas présent avant », a-t-il expliqué.
Réunis à l’occasion d’un compte-rendu sur le Conseil européen de décembre dernier, les députés se sont penchés sur les raisons de l’échec de la signature d’un accord d’association avec l’ancienne république soviétique lors du sommet du Partenariat oriental en novembre à Vilnius.
Responsabilité européenne
Et le constat est dur. « Nous avons eu en face de nous un État qui ne souhaitait pas signer l’accord d’association », a déclaré Thierry Repentin, précisant que le pays était dans une situation difficile face aux pressions exercées par la Russie.
Du côté européen, les négociations n’ont pas été menées de manière exemplaire. « J’ai remarqué que, plus nous nous approchions du sommet de Vilnius, moins nous étions une Union européenne exigeante face aux réformes structurelles », a expliqué Thierry Repentin.
« Parce que nous souhaitions arrimer l’Ukraine à l’Europe, nos exigences sur l’adoption de textes législatifs en matière de fin de justice sélective, de liberté de la presse, du droit de tout citoyen à se présenter à une élection diminuaient. Et nous nous raccrochions au symbole de la libération de Madame Ioulia Timochenko » a-t-il poursuivi.
Pour le ministre, la signature d’un accord d’association dans ces circonstances aurait également été un échec pour l’Union européenne. « Si l’UE avait signé contre la seule libération de Mme Timochenko sans demander les réformes que nous exigions il y a 18 mois », les critiques auraient été aussi virulentes, pronostique le ministre.
Les relations avec la Russie pointées du doigt
Pour Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, l’échec de Vilnius est entre autres le produit d’une mauvaise gestion des relations diplomatiques de l’UE avec la Russie. « Nous avons géré ça vraiment n’importe comment », regrette-t-elle.
« Il faudrait dire clairement à certains responsables européens que nous ne sommes plus dans une perspective de faire adhérer l’Ukraine à l’UE et encore moins à l’OTAN », s’est-elle insurgée.
Pour autant, la perspective d’un rapprochement futur avec l’ancienne république soviétique reste d’actualité. « L’Ukraine a fait un autre choix. Mais elle ne l’a pas fait complètement puisqu’elle n’a pas adhéré à l’Union douanière de la Russie », souligne Thierry Repentin.
« Nous verrons comment cela évolue lors des élections qui se tiendront dans un an. En attendant, il faut maintenir le lien et apporter notre soutien aux manifestants », a-t-il poursuivi.
Depuis le 21 novembre, les manifestations en Ukraine se sont succédé. Dans la foulée du refus de signer l’accord d'association avec l'Union européenne, les Ukrainiens ont d’abord protesté en faveur d’un rapprochement avec l’Europe avant de réclamer, en vain, le départ du président Viktor Ianoukovitch et la tenue d’élections anticipées. Depuis le début de l’année 2014, les manifestations semblent toutefois s’essouffler.
La porte reste ouverte
Du côté européen, le discours de la « porte ouverte » est aussi sur toutes les lèvres. Au cours du Conseil européen de décembre, les chefs d’État et de gouvernement des 28 États membres sont revenus sur la situation en Ukraine. Dans les conclusions adoptées, le conseil rappelle que « l'Union européenne reste disposée à signer l'accord d'association avec l'Ukraine […] dès [qu’elle] y sera prête.
Les chefs d’État et de gouvernement ont apporté au cas par cas leur soutien aux soulèvements populaires. La présidente lithuanienne, Dalia Grybauskait?, a déclaré qu’elle « restait ouverte à l’Ukraine, mais pas forcément à ce gouvernement », tandis que la chancelière allemande Angela Merkel a salué le courage des manifestants et leur envie d'Europe.