Les Démocrates de Suède, parti d’extrême droite, font monter la pression sur le gouvernement suédois, notamment en ce qui concerne l’immigration et l’énergie éolienne, alors que Stockholm, qui assure actuellement la présidence du Conseil de l’UE, pourrait être confrontée à une grave crise politique, voire à un éventuel effondrement du gouvernement.
Bien que les Démocrates de Suède (SD/CRE) ne fassent pas partie de la coalition de centre-droit au pouvoir — qui comprend les Modérés, les Libéraux et les Chrétiens-démocrates — ils ont proposé d’apporter leur soutien au gouvernement en échange de la mise en œuvre de certaines politiques, notamment en matière d’immigration.
La semaine dernière, Mattias Karlsson, chef de file des SD au parlement suédois, a déclaré que le gouvernement ne devait pas soutenir la version actuelle du Pacte sur la migration votée par le Parlement européen, faute de quoi il aurait « du mal à voir comment la base de notre coopération peut être maintenue », menaçant de facto le gouvernement d’une crise politique.
Il a été rapidement soutenu par le chef du parti SD, Jimmie Åkesson, qui a exprimé de nombreux désaccords avec le gouvernement suédois dans une interview accordée à Aftonbladet jeudi (27 avril).
Le leader du SD a déclaré que lorsque l’accord de gouvernement sera respecté — et qu’il suivra fondamentalement la ligne du SD en matière d’immigration — la Suède aura « la politique migratoire la plus restrictive, ou la deuxième plus restrictive, de l’UE ».
Outre la demande de réduction de l’immigration, le SD souhaite que la Suède mette en place des centres de transit pour les demandeurs d’asile et insiste sur le rapatriement, par exemple par le biais de ce que l’on appelle les « bureaux de rapatriement ».
M. Åkesson a insisté sur le fait que son parti ne voulait pas d’un système commun de répartition des demandeurs d’asile, sur lequel l’Union travaille depuis de nombreuses années.
« La priorité absolue est d’atteindre le niveau minimum de l’UE en matière de législation sur l’asile et d’immigration liée à l’asile », a déclaré M. Åkesson.
Le chef de file du parti s’est également dit « frustré que cela prenne du temps. Nous devons commencer à réparer les dégâts causés par Stefan Löfven, Magdalena Andersson et Fredrik Reinfeldt », a déclaré M. Åkesson en faisant référence aux trois derniers Premiers ministres suédois.
Des objectifs climatiques différents
Le climat, au même titre que la migration, est un autre point d’achoppement entre le gouvernement suédois et son allié d’extrême droite.
Au début du mois, la ministre libérale du Climat et de l’Environnement, Romina Pourmokhtari, a clairement exprimé cette divergence d’opinions. « Il suffit de lire les points de vue des Démocrates de Suède sur la politique climatique », avait-t-elle déclaré, ajoutant qu’ils étaient « très éloignés ».
Dans le même temps, M. Åkesson a clairement indiqué que son parti n’accepterait pas une expansion de l’énergie éolienne — que le gouvernement a favorisée — en affirmant jeudi que les éoliennes n’étaient « pas nécessaires ».
« Notre ambition est de disposer d’une énergie planifiable. Nous n’avons pas besoin d’une énergie plus dépendante des conditions météorologiques. Si nous construisons encore plus d’éoliennes, nous devrons brûler encore plus de pétrole lorsqu’il n’y a pas de vent, ce qui est une très mauvaise politique en matière d’émissions », a-t-il ajouté.
Une autre question qui divise SD et le gouvernement est le taux de biocarburants qui doivent être mélangés à l’essence et au diesel – est actuellement fixé à 30 % – et que le parti d’extrême droite souhaite voir baisser.
« Nous sommes en train de négocier l’obligation de réduction. Je recevrai dans le courant de la semaine un rapport sur le déroulement des négociations. Nous verrons alors à quoi nous aboutirons. Mais notre point de départ est zéro », a déclaré M. Åkesson.
Un gouvernement confiant, mais pour combien de temps ?
Malgré les divergences évidentes dans des domaines essentiels, le Premier ministre suédois Ulf Kristersson a insisté sur le fait qu’il n’y avait pas de crise politique à l’horizon, surtout pas en ce qui concerne l’immigration.
« La position générale du gouvernement est très claire dans l’accord de coalition. Nous réduirons l’immigration en Suède, ce qui est très important. Nous ne contribuerons jamais à des solutions européennes qui augmentent l’immigration en Suède », a-t-il déclaré à la suite des déclarations du SD.
En ce qui concerne la position du parti d’extrême droite sur la production d’énergie, M. Kristersson a clairement indiqué que le gouvernement continuerait à appliquer sa propre position.
« La position du gouvernement est très claire. Nous obtiendrons un large soutien pour la construction de nouvelles centrales nucléaires, et nous obtiendrons un large soutien pour la construction de nouvelles éoliennes là où elles sont adaptées et efficaces », a-t-il déclaré.
Malgré la position du gouvernement sur l’énergie éolienne, l’opposition critique vivement sa politique énergétique et climatique, qu’elle considère comme influencée par les objectifs climatiques peu ambitieux de l’extrême droite. Elle a également critiqué le gouvernement pour l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre depuis que M. Kristersson est au pouvoir.
Selon M. Kristersson, la coopération avec le SD fonctionne généralement bien et ce sont les médias qui « dramatisent » leur menace de crise gouvernementale.
Mais sans le soutien du parti d’extrême droite, la coalition au pouvoir n’aurait plus de majorité parlementaire, ce qui pourrait empêcher le gouvernement de poursuivre son agenda législatif deux mois avant la fin de la présidence tournante de l’UE par la Suède.
Contactée par EURACTIV, la Commission européenne n’a pas souhaité commenter les débats politiques dans les États membres ni « avancer des conjectures » sur la manière dont elle réagirait si le gouvernement suédois tombait avant la fin de son séjour à la présidence de l’UE.