Nouvel accord de coopération UE-OTAN : quid de l’autonomie stratégique ?

Signé par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen (à droite), le président du Conseil européen, Charles Michel (à gauche), et le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg (au milieu), le nouvel accord de coopération en 14 points intervient près d’un an après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. [EPA-EFE/STEPHANIE LECOCQ]

L’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) et l’Union européenne cherchent à intensifier leur coopération à la suite de l’invasion russe en Ukraine. Les deux parties ont signé une nouvelle déclaration conjointe ce mardi (10 janvier), ce qui implique également la redéfinition du concept d’autonomie stratégique.

Signé par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le président du Conseil européen, Charles Michel, et le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, le nouvel accord de coopération en 14 points intervient près d’un an après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a débuté en février dernier.

La signature d’un accord était initialement prévue lors du sommet de l’OTAN à Madrid en juin 2022, mais cette signature a été retardée principalement en raison des tensions entre la Turquie et Chypre, selon des diplomates de l’OTAN.

S’adressant à des journalistes à Bruxelles, les deux parties ont souligné leur volonté de « faire passer le partenariat au niveau supérieur ». M. Stoltenberg a par ailleurs fait remarquer que le président russe Vladimir Poutine avait « échoué » dans sa tentative de diviser les alliés occidentaux sur la question de la guerre en Ukraine.

« La guerre de la Russie contre l’Ukraine a eu deux conséquences inattendues : elle a renforcé nos deux organisations, l’UE et l’OTAN, et nous a rapprochés », a expliqué M. Michel.

« [Vladimir] Poutine voulait moins d’OTAN, mais il a obtenu le contraire : il aura plus d’OTAN et il aura plus d’UE », a-t-il ajouté, précisant que l’Union était « déterminée à contribuer plus efficacement à la sécurité mondiale et transatlantique ».

Le nouveau document conjoint s’appuie sur deux précédentes déclarations conjointes de 2016 et 2018.

Mais si cette nouvelle version est la première déclaration de ce type à mentionner explicitement la Russie et la Chine, le reste du texte reste plutôt ordinaire pour ce qui est de l’identification des menaces ou des engagements concrets.

La déclaration souligne que la lutte contre « l’intensification de la compétition géostratégique », la protection des infrastructures critiques et la gestion des menaces liées aux nouvelles technologies et à l’espace sont des domaines clés pour une coopération approfondie.

Le secrétaire général de l'OTAN met en garde le monde des affaires contre la Chine

Jeudi (8 décembre), le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg a mis en garde le monde des affaires contre les risques découlant d’une trop grande dépendance du commerce avec la Chine, établissant un parallèle avec l’« erreur » commise par l’Europe qui dépend fortement du gaz russe.

Redéfinir l’autonomie stratégique

Les diplomates de l’UE et de l’OTAN soulignent que le document conjoint représente un succès diplomatique.

Cela fait des années que certains craignent que les efforts visant à renforcer le rôle de l’UE en matière de défense ne nuisent à l’alliance militaire dirigée par les États-Unis. Or, la déclaration conjointe indique que l’OTAN demeure « le fondement de la défense collective de ses membres ».

Pour rappel, vingt-et-un États membres de l’UE sont également membres de l’OTAN, et les procédures d’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’alliance militaire devraient aboutir d’ici la fin de l’année.

Au fil des ans, les efforts déployés, principalement par la France, pour renforcer le rôle de l’Union européenne dans le domaine de la défense et la volonté de Paris de parvenir à une autonomie stratégique ont provoqué des tensions avec les pays d’Europe de l’Est, qui considèrent Washington comme le principal garant de la sécurité en Europe.

Les États-Unis, quant à eux, poussent depuis longtemps leurs alliés européens à allouer davantage de fonds à la défense, à combattre les cybermenaces et à renforcer les infrastructures nécessaires pour un déploiement rapide des forces armées à travers le continent.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a changé la donne, suscitant des appels à mieux aligner et coordonner les responsabilités des deux organisations basées à Bruxelles.

La nouvelle déclaration conjointe indique clairement que l’OTAN « reste le fondement de la défense collective de ses membres » et que l’organisation « demeure essentielle pour la sécurité euro-atlantique ». Elle précise toutefois que les deux parties « reconnaissent l’intérêt d’une défense européenne plus forte et plus performante, qui contribue effectivement à la sécurité mondiale et transatlantique, complète l’action de l’OTAN et soit interopérable avec celle‑ci ».

Les deux organisations possèdent « des rôles complémentaires, cohérents et se renforcent mutuellement au service de la paix et de la sécurité au niveau international », peut-on lire dans le document. Cela vient confirmer l’idée selon laquelle des armées européennes plus fortes doivent soutenir l’alliance politico-militaire, et non offrir une alternative à celle-ci.

Interrogé par les journalistes pour savoir si l’autonomie stratégique doit être considérée comme « morte » avec la nouvelle impulsion donnée à la coopération OTAN-UE, Charles Michel a répondu que les principales doctrines militaires des deux organisations se compléteraient.

« Le concept stratégique de l’OTAN complète, soutient et est cohérent avec la Boussole stratégique l’UE [le plan d’action du bloc pour renforcer sa politique de sécurité et de défense] », a affirmé le président du Conseil européen.

« Cette notion d’autonomie, d’indépendance, est très importante pour avoir plus de résilience à l’avenir, et il est tout à fait clair que c’est quelque chose qui doit être fait en complémentarité avec nos amis, partenaires et alliés », a-t-il ajouté.

« L’autonomie stratégique n’implique pas que l’on ne coopère pas, mais plutôt que l’on coopère avec des partenaires partageant les mêmes idées », a expliqué Mme Von der Leyen.

Des progrès ont notamment été réalisés dans les domaines de la production de vaccins ainsi que pour se débarrasser de la « dépendance toxique » de l’Europe vis-à-vis des combustibles fossiles russes, a-t-elle ajouté.

L’Ukraine au cœur de la déclaration

La promesse de soutenir l’Ukraine figure parmi les éléments clés de la déclaration conjointe sur la coopération entre l’UE et l’OTAN.

Depuis l’invasion de l’Ukraine par Moscou, l’OTAN a augmenté la présence de ses troupes en Europe de l’Est, alors que l’alliance procède à la plus grande réorganisation de ses forces de défense depuis la fin de la Guerre froide (1947-1991).

La semaine dernière, le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg a appelé les membres de l’alliance à fournir davantage d’armes à l’Ukraine.

En outre, l’UE imposera de nouvelles sanctions à la Biélorussie, tout en maintenant la pression sur la Russie pour qu’elle mette fin à sa guerre en Ukraine et en prolongeant ses sanctions contre les pays qui soutiennent l’agresseur, a déclaré Mme von der Leyen mardi.

« Nous continuerons à exercer la pression sur le Kremlin aussi longtemps qu’il le faudra grâce à un système de sanctions sévères, nous étendrons le champ d’application de ces sanctions à ceux qui soutiennent militairement la guerre de la Russie, comme la Biélorussie ou l’Iran », a-t-elle annoncé aux journalistes au siège de l’OTAN à Bruxelles.

« Et nous proposerons de nouvelles sanctions contre la Biélorussie pour son rôle dans la guerre en Ukraine », a-t-elle ajouté.

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[Édité par Anne-Sophie Gayet]

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