Matteo Renzi, le Premier ministre italien a lancé un appel en faveur d’une Europe forte, capable de tourner la page de la crise et de sculpter sa propre vision de l’avenir, notamment grâce à la signature du traité transatlantique avec les États-Unis.
L’Europe, le rêve d’une génération toute entière, doit être ravivé, a martelé Matteo Renzi lors de son discours à la conférence de l’État de l’Union à Florence.
« Nous devons rendre hommage aux pères fondateurs de l’Europe, mais nous devons également retrouver l’esprit qui les habitait et nous forger un avenir différent. Le monde a besoin de l’Europe et l’Europe doit cesser de se dérober à chaque situation de crise. Elle doit au contraire avoir le courage de croire en ses idéaux », a-t-il assuré.
Après toutes les urgences de l’année écoulée, dont la crise financière, la crise migratoire, le conflit en Ukraine et l’alerte sanitaire Ebola en Afrique, l’Europe donne l’impression de gérer les crises « mais de ne pas avoir de stratégie ».
« Nous avons tout ce qu’il faut pour mettre les choses en marche et convaincre les citoyens de croire au projet européen, un projet construit sur des bases culturelles et scientifiques solides », insiste-t-il.
Matteo Renzi tire la sonnette d’alarme
Le Premier ministre italien a appelé à une réflexion sur les années écoulées depuis l’adoption du Traité de Lisbonne, qui avait pour objectif de créer l’économie de la connaissance la plus dynamique et la plus compétitive du monde, une économie en mesure de créer une croissance économique durable grâce à plus d’emplois de meilleure qualité et à une plus grande cohésion sociale, le tout avant 2010.
Aujourd’hui, l’Europe croît pourtant moins rapidement. « D’autres pays, comme les États-Unis par exemple, sont parvenus à faire baisser le taux de chômage et à augmenter le PIB depuis 2008. En Europe, le chômage a gagné du terrain et le PIB recule », regrette-t-il.
« Il y a des secteurs pour lesquels l’UE pourrait agir, mais nous n’arrivons pas à profiter du plein potentiel qui est entre nos mains », ajoute le Premier ministre italien, rappelant qu’il avait été, avec son homologue maltais, le seul chef d’État à appeler à plus de flexibilité l’an dernier.
Un an plus tard, nous ne parlons plus du pacte de stabilité et de croissance, le mot « flexibilité » apparaît dans les communiqués de la Commission et tous les outils pertinents sont mis en place, comme l’assouplissement quantitatif lancé par la Banque centrale européenne et le plan d’investissement de 315 milliards d’euros de la Commission Juncker.
« Pourtant, ce n’est pas suffisant. L’Europe est comme un élève très doué qui ne travaille pas assez dur », insiste Matteo Renzi.
Mea culpa
Depuis les dernières tragédies dans la Méditerranée, les dirigeants européens se concentrent de plus en plus sur les liens qui unissent les 28 États membres, estime le Premier ministre.
« L’Europe est un continent qui fournit de l’oxygène à d’autres pays grâce à ses valeurs et à ses idéaux », insiste-t-il.
L’Italien a condamné les tristes tentatives de nombre de dirigeants européens qui accusent l’UE d’être responsable de leur propre manque de vision et a admis les limites de l’Italie.
« Dans beaucoup de pays, l’Europe est très souvent perçue comme le problème. En Italie, nous avons clairement dit que l’Europe n’était pas à l’origine des problèmes de l’Italie, mais que l’Italie était trop faible », indique-t-il, notant au passage que si Rome avait réformé l’économie nationale en 2004, comme Berlin l’a fait, la situation serait aujourd’hui très différente.
Matteo Renzi a mentionné la réforme électorale de la semaine dernière, indiquant qu’il « ne s’agissait pas de faire le bonheur des marchés, mais celui de nos enfants ».
La nouvelle loi électorale, adoptée après plus d’un an de discussions dans les deux chambres du parlement, est un aspect essentiel du programme de réformes politiques et économiques de Matteo Renzi.
« L’Italie n’est plus le mauvais élève de l’UE et est à présent en mesure d’apporter se créativité et son dynamisme à l’Europe, qui en a bien besoin », a-t-il souligné. « Le monde a besoin de plus de passion, de culture et d’innovation. En d’autres termes, le monde a besoin de plus d’Europe. »
TTIP
Il a également affirmé qu’un échec du partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (TTIP) serait un désastre pour l’Europe.
« Il n’est pas possible que les États-Unis concluent des accords avec l’Extrême-Orient [le Partenariat transpacifique, PTP] alors que l’Europe hésite et s’interroge sur le TTIP », estime le Premier ministre italien.
« Si l’on ne trouve pas un accord d’ici la fin de l’année, l’UE se tire une balle dans le pied. Et ce sera notre dernière chance, parce que les élections américaines se déroulent l’année prochaine », conclut-t-il.