La Commission européenne a publié le 19 juillet une communication à l’intention des entreprises dans l’UE pour les prévenir des conséquences d’un Brexit sans accord.
Le document a été publié quelques heures avant que le nouveau ministre britannique du Brexit, Dominic Raab, arrive à Bruxelles pour sa première rencontre avec le responsable des négociations pour la Commission européenne, Michel Barnier.
La Commission estime qu’il n’est toujours pas certain qu’un accord de retrait soit ratifié avant le 30 mars 2019, date d’entrée en vigueur du Brexit. Et anticipe que les institutions européennes ainsi que les citoyens et entreprises doivent se préparer à un scénario sans accord.
Deux scénarios
Si l’accord de retrait est ratifié avant le 30 mars, le droit européen continuera de s’appliquer au Royaume-Uni pendant une période de transition de 21 mois, qui prendra elle-même fin en décembre 2020, selon les termes de l’accord en question.
Si aucun accord de retrait n’est conclu, il n’y aura pas de période de transition et le droit européen cessera immédiatement de s’appliquer au Royaume-Uni.
Les conséquences d’un scénario sans accord seraient sévères pour les citoyens et les entreprises.
Ainsi, aucune disposition spécifique ne serait mise en place pour les citoyens européens au Royaume-Uni ou pour les citoyens britanniques dans l’UE.
L’UE devrait par ailleurs appliquer les mêmes règlements et droits de douane au Royaume-Uni que ce qu’elle applique aux pays tiers, y compris des contrôles douaniers, sanitaires et phytosanitaires et des vérifications de conformité aux normes européennes.
Le transport entre le Royaume-Uni et l’UE en serait gravement affecté car ces contrôles provoqueraient des retards considérables sur les transports routiers par exemple et entraîneraient des difficultés dans les ports.
Côté commerciale, les relations du Royaume-Uni avec l’UE seraient gouvernées par le droit public international, y compris les règles de l’Organisation mondiale du commerce. Dans les secteurs lourdement réglementes, cela représenterait un inconvénient important comparé au niveau actuel d’intégration du marché.
Par ailleurs, les entités britanniques ne seraient plus éligibles aux fonds européens et ne pourraient plus participer aux procédures d’attribution des marchés.
Dans un style rappelant le poster iconique « Keep calm and Carry on » produit par le gouvernement britannique en 1939 au début de la Seconde Guerre mondiale pour relever le moral de l’opinion publique, la Commission a déclaré : « Il est important que les entreprises de toutes tailles, y compris les PME, se préparent et agissent en fonction dès maintenant. Les acteurs privés, les opérateurs commerciaux et les professionnels doivent prendre leurs responsabilités en fonction de leur propre situation, évaluer les impacts potentiels d’un tel scénario sur leurs activités, prendre les décisions économiques adéquates et conclure toutes les démarches administratives nécessaires avant le 30 mars 2019. »
« Les citoyens qui subiront les conséquences du retrait du Royaume-Uni, ainsi que les administrations publiques qui sont à leur service devraient aussi se préparer avant le 30 mars 2019. »
Sept domaines dans lesquels les entreprises doivent prendre leurs dispositions sont identifiés, allant des droits de douane, à la TVA et à l’accise en passant par les règles d’origine et le transfert de données personnelles.
Les entreprises britanniques se préparent également à la perspective d’un Brexit sans accord.
« Dans huit mois, nous quitterons l’Union européenne, il est donc important que nous – régulateurs et industrie – nous continuons de nous préparer à différents scénarios », commente Nausicaa Delfas, responsable de la stratégie internationale de l’Autorité de bonne conduite financière (FCA).
« À la FCA, et avec des collègues de la Banque d’Angleterre et du gouvernement, nous travaillons sur le développement d’un certain nombre de filets de sécurité et d’éventualités, dans le cas d’un Brexit dur, pour s’assurer notre premier jour en dehors de l’UE se passe en douceur », a-t-il déclaré.
Le gouvernement britannique devrait publier des conseils similaires pour un scénario sans accord pour ses propres entreprises dans les prochains jours.
Les responsables britanniques et de la Commission affirment que plusieurs cycles de discussion auront probablement lieu pendant les vacances d’été puisque peu de progrès ont été réalisés sur l’accord de retrait ou sur l’avenir des relations commerciales ou sécuritaires depuis mars. Un accord et une déclaration politique sont attendus pour octobre.
La probabilité que les négociations autour de l’article 50 s’effondrent a considérablement augmenté ces deux dernières semaines, durant lesquelles le gouvernement de Theresa May a finalement publié son Livre blanc tant attendu sur les relations post-Brexit avec l’UE.
Onze ministres britanniques et adjoints, dont le ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson et le ministre du Brexit, David Davis, ont démissionné depuis la présentation de l’accord de Chequers, qui a servi de base au Livre blanc. Des départs qui font craindre que la Première ministre se retrouve face à un vote de défiance de la part de ses députés conservateurs.
Checkpoints avec l’Irlande du Nord
Le 19 juillet, le gouvernement irlandais a dit avoir accéléré les préparations du départ du Royaume-Uni, même « dans le cas très improbable d’un Brexit sans accord ».
Ces préparations comprennent le déploiement d’au moins 902 nouveaux douaniers et inspecteurs vétérinaires dans les ports et aéroports pour être en règle avec les changements opérés dans les relations commerciales suite au divorce.
Michel Barnier doit rendre compte aujourd’hui des avancées des négociations sur le Brexit aux 27 ministres des Affaires européennes.