La réunion des ministres des Finances du 6 mai a accouché d’une première mouture édulcorée de la taxe sur les transactions financières, qui fait face à une forte opposition de la part du Royaume-Uni et de la Suède.
La réunion des ministres des Finances (ECOFIN) a accouché d’une déclaration commune. La France, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Estonie, la Grèce, l’Italie, le Portugal, la Slovaquie et l’Espagne se sont accordés pour taxer les actions et certains produits dérivés à partir du 1er janvier 2016 au plus tard. La Slovénie, le 11e pays de la monnaie unique, n’a pas signé la déclaration commune étant donné que le pays est sans gouvernement pour l’instant.
Selon les représentants des pays signataires, les textes juridiques relatifs à une taxe sur les transactions financières doivent être achevés d’ici la fin de l’année. La taxe s’étendra ensuite étape par étape à une plus grande série de produits dérivés. Les États membres participant à ce projet de coopération renforcée pourront introduire des taxes à l’assiette plus large au niveau national, afin de préserver leurs dispositifs existants. Certains pays, à l’image de l’Italie, ont en effet déjà introduit différents types de taxes sur les produits dérivés.
D’autres aspects de la future taxe restent encore à définir, comme le pays de taxation en cas de transaction transfrontalière. Dans sa première proposition en 2011, la Commission européenne laissait penser que les deux pays concernés par une transaction pourraient percevoir la taxe. Un pays qui n’a pas souscrit au système de prélèvement d’une taxe sur les transactions financières pourrait être contraint à percevoir des taxes au nom de l’autre État.
Opposition britannique
« Nous analyserons les détails, mais nous n’hésiterons pas à contester une taxe sur les transactions financières qui nuiraient [aux intérêts] du Royaume-Uni et d’autres États membres ou au marché unique. » a déclaré George Osborne, le ministre britannique des Finances.
« Si les États membres veulent nuire à leur marché de l’emploi et à leur investissements, c’est leur décision. Par contre, s’ils veulent les endommager dans d’autres États, nous avons le droit de contester. » a-t-il poursuivi.
Les autorités britanniques affirment que la TTF aura des répercussions disproportionnées pour le Royaume-Uni, qui abrite la plus grande place financière.
Lors de la réunion, la Suède a également bloqué un compromis, craignant que ces nouvelles règles ne nuisent à un certain modèle de société d’investissement utilisé par les entreprises comme Volvo et Eriksson.
Le ministre suédois des Finances, Anders Borg, a fait écho aux critiques britanniques lors de l’ECOFIN. La Suède a également fait face à des difficultés économiques à la suite de l’introduction d’une taxe nationale sur les transactions financières dans les années 1980. « Nous n’avons pas soutenu le Royaume-Uni [au départ], mais nous sommes sur le point de le faire », a déclaré Anders Borg.
Les Pays-Bas ont également regretté le manque de détails de la déclaration.
Réaction des autres États membres
Le ministre allemand des finances, Wolfgang Schäuble, a déclaré pour sa part : « Nous n’avons pas tranché. Nous avons seulement convenu d’un accord politique minimum pour poursuivre [le dossier]. Nous devons toujours examiner en profondeur les questions juridiques. »
Pour les dirigeants européens, cette déclaration était nécessaire à l’occasion du dernier ECOFIN avant les élections européennes de fin mai, afin d’honorer l’engagement des grandes nations à avancer dans ce dossier.
Natalia Alonso, la directrice du bureau européen d’Oxfam, a indiqué pour sa part :« Avec les élections européennes qui pointent le bout de leur nez, les ministres semblent plus préoccupés par lancer de la poudre aux yeux des électeurs. Leur compromis actuel n’équivaut pas à la TTF nécessaire pour garantir que le secteur financier paie sa juste part de taxes. »
L’accord de compromis fera l’objet de discussions lors du prochain ECOFIN en juin.