Le décès aujourd’hui (8 avril) de la baronne Margaret Thatcher, ancienne première ministre du Royaume-Uni, a provoqué une vague de commentaires de la part d’un continent qu’elle a à la fois influencé, encouragé, libéralisé et détesté.
La carrière de la première femme au poste de premier ministre a constitué un tournant pour la Grande-Bretagne : Margaret Thatcher a rompu le « consensus d'après-guerre », en vertu duquel les gouvernements conservateurs et travaillistes poursuivaient des politiques démocratiques semblables à celles du continent.
À la fin des années 1970, le pouvoir des syndicats, la chute du secteur manufacturier et le manque de rouages officiels permettant un consensus dans la démocratie britannique sans constitution écrite ont poussé Margaret Thatcher à mettre en place sur une décennie un programme de privatisation et des réformes orientées vers le marché, qui ont transformé l'environnement économique de la Grande-Bretagne.
Ses partisans ont salué sa répression impitoyable de la contestation des syndicats et sa ténacité et les ont qualifié de cure sévère et attendue depuis longtemps. Selon ses détracteurs, elle était insensible et bornée en raison de sa tendance à désigner un « ennemi de l'intérieur », de sa gestion sévère des communautés désindustrialisées et de la suppression d'un filet de sécurité pour les plus nécessiteux de la société.
L'Europe est le domaine qui l'a finalement vaincue, à la suite d’une intervention mouvementée à la Chambre des communes. Elle y avait rejeté les propositions de renforcement des institutions du président de la Commission de l'époque, Jacques Delors, en déclarant d'une voix stridente : « Non, non, non ! ». Refusant de s'engager avec la Commission et trahie par l'ancien ministre des affaires étrangères Geoffrey Howe, elle a lentement été poussée vers la sortie par les ministres de son propre gouvernement.
Son influence s'étendait cependant bien au-delà des membres de la Communauté économique européenne (CEE). Elle était estimée pour sa position ferme contre le soviétisme dans les satellites en train de s'effondrer en Europe orientale.
Margaret Thatcher et l'Europe
Née en 1952 à Grantham (Angleterre), elle s'est méfiée toute sa vie de la puissance allemande en raison de ses souvenirs des bombardements. Cette méfiance est réapparue lors de ses derniers jours au pouvoir, lorsqu'elle a rejeté la réunification allemande.
Voici quelques-unes de ses positions par rapport à l'Europe :
1975
En tant que ministre de l'opposition, Margaret Thatcher soutient son chef de file Edward Heath lorsqu'il a appuyé l'entrée de la Grande-Bretagne dans le marché commun. Elle a joué un rôle clé dans l'obtention d'un référendum gagnant. Elle est photographiée avec un pull-over tricoté constitué des drapeaux des États membres.
1978
Toujours dans l'opposition, mais chef de file de son parti, elle demande d’envisager une approche européenne commune de la défense. Elle critique également le gouvernement travailliste de l'époque pour ne pas avoir ratifié le mécanisme de change européen (MCE).
1979
Elle remporte une victoire écrasante et devient la première femme du pays au poste de premier ministre.
1980
Elle demande que les contributions du Royaume-Uni à la CEE soient ajustées et, si ce n'est pas le cas, prévient qu'elle différera les paiements de la TVA. « Je veux qu'on me rende mon argent ! », s'est-elle exclamée. Ce combat a duré quatre ans, mais elle a finalement obtenu le rabais britannique.
1986
Elle joue un rôle influent dans la conclusion de l'Acte unique européen. La date butoir de l'achèvement du marché unique est fixée à 1992. Cet acte comprend : la suppression des obstacles à la circulation des personnes, l'harmonisation des normes nationales, des règles sur l'achat de services et de biens par les gouvernements, la libéralisation des institutions financières, la mise en place d'autres taux normaux de taxe sur la valeur ajoutée et du droit européen des affaires.
1988
« Nous n'avons pas réussi à repousser les frontières de l'État avec succès en Grande?Bretagne pour nous les voir réimposées au niveau européen, avec un super-État européen exerçant une nouvelle domination depuis Bruxelles », a-t-elle déclaré.
Elle a également indiqué qu'« Europe » n'était pas synonyme de « Bruxelles ».
1990
Elle s'oppose à la réunification allemande. Elle s'engage dans un conflit dramatique au sein de son parti sur l'adhésion au mécanisme de change européen. Margaret Thatcher l'accepte à contrecœur, alors que sa carrière politique touche à sa fin.