D’après Pascal Canfin, le Royaume-Uni a pris un risque en approuvant rapidement le vaccin contre le nouveau coronavirus

Pascal Canfin, président de la commission ENVI du Parlement européen. [European Parliament]

Le Royaume-Uni a été plus rapide que l’Union européenne à approuver les vaccins contre la Covid-19, mais il a également pris plus de risques avec les entreprises pharmaceutiques en acceptant toute responsabilité en cas de complications, a déclaré l’eurodéputé français Pascal Canfin lors d’un entretien avec Euractiv.

« Bien sûr, la Grande-Bretagne a commencé à vacciner plus tôt, mais elle est aussi totalement responsable des complications qui, espérons-le, ne se produiront pas mais pourraient se produire », a fait savoir M. Canfin, président de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) du Parlement européen.

« C’est la raison principale pour laquelle les négociations de l’UE ont pris plus de temps », a-t-il expliqué à EURACTIV, alors que les pays du bloc ont commencé des campagnes de vaccination de masse avec le vaccin développé par la start-up allemande BioNTech et son partenaire américain, Pfizer.

Dans l’Union européenne, la responsabilité incombe désormais principalement aux fabricants, ce contre quoi Pfizer a lutté pendant longtemps, a soutenu M. Canfin.

« Les États membres ont exigé que la Commission européenne négocie des contrats solides pour éviter tout risque auprès des citoyens », a renchéri le législateur français du groupe centriste Renew Europe au Parlement européen.

S’adressant à EURACTIV, M. Canfin a défendu l’approche européenne consistant à négocier collectivement pour obtenir les meilleures conditions en matière de prix et de délais, afin de protéger les citoyens européens.

« C’est une fausse nouvelle de laisser croire que chaque nation d’Europe aurait trouvé seule de meilleures solutions – souvenez-vous de la crise de 2009 avec le H1N1 et tous les manquements en matière de gestion ».

M. Canfin a insisté sur le fait que l’UE a approuvé les vaccins plus tard, mais a obtenu de meilleures conditions que les États-Unis et le Royaume-Uni, tant sur le plan sanitaire que financier.

« Nous avons fait les choses différemment – et je pense de manière plus responsable – que certains pays, par exemple Donald Trump aux États-Unis ou Boris Johnson au Royaume-Uni, qui ont essayé d’accélérer le processus sans tenir compte de toutes les précautions sanitaires venant des autorités publiques ou des entreprises de santé », a-t-il maintenu.

Aux yeux du député européen, l’UE a maintenant obtenu environ 2,3 milliards de doses de vaccins, bien plus que nécessaire. Si les 27 avaient tenté de s’y prendre seuls, ils auraient probablement eu beaucoup moins de succès.

Des négociations parallèles « irresponsables » vont faire augmenter les prix

En ce qui concerne la politique nationale, M. Canfin s’en est pris à ceux qui, partout en Europe, ont exhorté leur gouvernement à conclure des accords séparés avec l’industrie pharmaceutique, en plus des accords conclus au niveau de l’UE par la Commission européenne.

« Lorsque j’entends certains hommes politiques du SPD en Allemagne et des Républicains en France, qui demandent des commandes nationales, en violation du cadre européen, je qualifie cette attitude d’irresponsable car elle signifierait des prix plus élevés, moins de solidarité, et n’apportera aucun bénéfice en matière de santé publique », estime-t-il.

Il a ajouté que des commandes nationales séparées signifieraient la négociation d’un nouveau contrat et, par conséquent, la fourniture des vaccins supplémentaires probablement trop tard.

« La meilleure façon est d’augmenter nos achats communs, comme l’a fait la Commission vendredi dernier », a-t-il déclaré, faisant référence à la commande par l’UE de 300 millions de doses supplémentaires du vaccin Pfizer-BioNTech.

La semaine dernière, l’Allemagne a déclaré qu’elle avait convenu avec BioNTech en septembre de fournir 30 millions de doses supplémentaires sur une base bilatérale. Il s’agissait d’un protocole d’accord, dont l’UE avait connaissance, a déclaré le ministère de la santé.

Mais la cheffe de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, a déclaré le 8 janvier que les négociations de l’UE sont le seul « cadre juridique contraignant » pour tous les États membres.

La ministre portugaise de la Santé, Marta Temido, dont le pays occupe actuellement la présidence tournante de l’UE, a confirmé que certains pays ont acheté des vaccins de leur propre côté.

« Nous savons également que ces achats ont été effectués après la tenue de négociations communes au niveau de l’UE », a-t-elle poursuivi.

Toutefois, nul ne sait si l’exécutif prendra des mesures à l’encontre de l’Allemagne ou d’autres pays. Lors d’une conférence de presse vendredi dernier, Mme von der Leyen a refusé de révéler si l’accord bilatéral conclu entre l’Allemagne et Pfizer-BioNTech avait rompu l’engagement de l’UE en faveur de l’achat conjoint de vaccins.

L’UE a évité le « chaos »

Sur ce point, M. Canfin a soutenu que davantage de précisions sont nécessaires concernant le processus de livraison.

« L’UE a commandé les vaccins et cela a été fait dans les délais. La distribution est maintenant entièrement entre les mains des États membres. Et que voyons-nous ? – Le chaos ».

« Imaginez maintenant ce qui se serait passé si les 27 avaient négocié individuellement avec les fabricants de vaccins, signé des contrats différents et commencé à vacciner à des moments différents. Le chaos serait encore plus grand. Dans un espace intégré comme l’UE, la coopération nous rend plus forts », a conclu M. Canfin.

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