La présidence suédoise de l’UE présente ses priorités en matière de santé

Jakob Forssmed, ministre suédois des Affaires sociales et de la Santé publique (à droite), lors de la réunion de la commission ENVI du Parlement européen, lundi (23 janvier). [Parlement européen/Eric Vidal]

Les ministres suédois ont défini le programme de la politique en matière de santé que la Suède portera lors de sa présidence du Conseil de l’UE. Au programme : des mesures visant à lutter contre la solitude et la mise en place d’un espace européen des données de santé, entre autres.

« Ces six mois seront très chargés, et la présidence suédoise est préparée pour ce qui est à l’ordre du jour et pour faire face aux imprévus », a déclaré Jakob Forssmed, ministre suédois des Affaires sociales et de la Santé publique, face aux eurodéputés de la commission de la santé du Parlement européen (ENVI), lundi (23 janvier).

Stockholm a entamé sa présidence le 1er janvier dans un contexte difficile : des systèmes de santé surchargés, des pénuries de médicaments, les retombées de l’agression russe en Ukraine, la pandémie de Covid-19 ainsi qu’un agenda législatif chargé comprenant la stratégie pharmaceutique pour l’Europe et l’Espace européen des données de santé (EHDS).

La Suède a souligné qu’une approche coordonnée sera essentielle. « Il est vital de maintenir un dialogue et une coopération étroits au niveau de l’UE, le Parlement européen étant un partenaire naturel et, je dirais, crucial à cet égard », a souligné M. Forssmed.

Le ministre a ajouté que cela s’applique également aux négociations internationales concernant le traité international sur la prévention des pandémies et les amendements supplémentaires au règlement sanitaire international.

Espace européen des données de santé

Parmi les principaux actes législatifs figure l’Espace européen des données de santé (EHDS), l’un des éléments centraux de l’Union européenne de la santé, qui devrait être finalisé d’ici juin 2024. L’objectif est que l’EHDS soit opérationnel en 2025.

De nombreuses parties prenantes ont déjà exprimé des inquiétudes quant au calendrier, avertissant que l’EHDS pourrait ne pas être prêt à la date initialement prévue.

« Il est très important que les travaux avancent », a déclaré M. Forssmed. Il a par ailleurs décrit le partage des données comme une question centrale pour l’Europe qui, si elle était résolue, permettrait de partager les données de santé à travers l’UE pour les particuliers, les chercheurs et les décideurs politiques.

À cet égard, il a souligné l’importance de respecter la frontière étroite existant « entre ce que nous souhaitons réaliser et la protection des données, afin que chacun se sente en sécurité dans la manière dont ses données sont gérées ».

Cela implique l’alignement de l’EHDS sur d’autres textes législatifs, tels que le règlement sur les données (Data Act), la directive révisée sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information (SRI 2), le règlement sur l’intelligence artificielle (AI Act) et la proposition de dispositions nationales sur les données de santé.

L’espace européen des données de santé « irréalisable » sans la confiance des citoyens

Alors que la proposition de l’exécutif européen en faveur d’un espace européen des données de santé avance, les experts et les commissaires ont souligné qu’elle ne sera pas réalisable sans un niveau de confiance important des citoyens.

Les substances d’origine humaine

Un autre texte législatif figurant sur la liste de la présidence suédoise est la nouvelle réglementation proposée par la Commission relative aux substances d’origine humaine (SoHO), qui remplacerait les critères actuels, mis en place il y a plus de 20 ans.

L’objectif de la présidence suédoise n’est pas seulement de l’actualiser, mais également de la rendre « à l’épreuve du temps ».

« Nous ferons avancer la proposition de règlement sur les normes de qualité et de sécurité des substances d’origine humaine destinées à une application humaine », a déclaré Acko Ankarberg Johansson, ministre suédoise de la Santé.

Système de redevances de l’EMA

La Commission européenne révise actuellement le système de redevances de l’Agence européenne des médicaments (EMA), afin de le rendre plus flexible pour s’adapter aux évolutions futures et plus durable sur le long terme.

Mme Johansson a déclaré que la présidence suédoise ferait avancer le règlement sur les redevances de l’EMA.

« Le système doit être rendu aussi flexible que possible afin de s’aligner sur le paquet médicaments à venir. Mais bien entendu, nous devons donner aux États membres le temps d’analyser la proposition avant de nous mettre au travail », a-t-elle déclaré.

Règlement relatif aux dispositifs médicaux

La Commission européenne a adopté début janvier une proposition visant à donner aux fournisseurs quatre années supplémentaires pour recertifier les dispositifs médicaux, afin d’éviter les risques de pénurie. La commissaire européenne à la Santé, Stella Kyriakides, a appelé le Parlement européen et le Conseil à adopter rapidement cette proposition.

Mme Johansson a assuré qu’il s’agissait d’une « question urgente » pour la présidence afin de garantir la sécurité des patients.

« Il est crucial que nous évitions les pénuries de dispositifs médicaux qui permettent de sauver des vies », a indiqué la ministre.

Une réunion du groupe de travail de la présidence consacrée à ce dossier s’est tenue la semaine dernière. Au cours de celle-ci, la proposition a reçu un fort soutien des États membres, selon Mme Johansson.

Résoudre le problème des pénuries de médicaments dans l'UE

La Commission européenne estime que la forte augmentation de la demande et l’insuffisance de la capacité de production sont les principales raisons des pénuries de médicaments observées dans l’UE. Les eurodéputés appellent à la relocalisation de la production en Europe.

Législation pharmaceutique

La Commission doit présenter cette année une révision de la législation pharmaceutique, ainsi que des dossiers relatifs aux médicaments orphelins et aux médicaments pédiatriques.

« Nous espérons obtenir une proposition de la Commission », a déclaré Mme Johansson.

La nécessité d’un nouveau cadre est mise en évidence par les pénuries de médicaments observées dans l’ensemble de l’Union.

« Nous avons des problèmes avec la chaîne d’approvisionnement et nous connaissons des pénuries car certains médicaments n’ont pas été développés, alors qu’ils peuvent s’avérer nécessaires dans différentes régions », a souligné Mme Johansson. Et d’ajouter que ces questions doivent être abordées conjointement.

La question des pénuries de médicaments et des produits pharmaceutiques sera examinée lors de la réunion informelle du Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » (EPSCO) les 4 et 5 mai, si l’on en croit le projet d’ordre du jour du Conseil.

La présidence suédoise de l’UE a souligné l’importance des médicaments orphelins et des médicaments à usage pédiatrique.

« Nous devons disposer de stratégies et d’outils permettant d’accorder un accès à la détection précoce, aux soins, aux traitements, aux soins à vie, et aux mêmes dispositifs que ceux disponibles pour d’autres maladies », a déclaré Mme Johansson.

Le Conseil envisagera de créer des initiatives visant à obtenir les médicaments nécessaires pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens (RAM), la maladie d’Alzheimer et d’autres maladies, a précisé Mme Johansson. Les initiatives comprennent des coupons et des mesures d’incitation.

« Nous ne pouvons pas simplement compter sur des ventes importantes, il est donc très important de travailler avec différents modèles, tels que des mesures d’incitation », a ajouté M. Forssmed. Il a également indiqué que la présidence espère que cela se reflétera dans la prochaine proposition de l’exécutif européen.

Pénurie d’antibiotiques : pas de quoi s’alarmer, selon la Commission européenne

La pénurie actuelle d’antibiotiques est très alarmante pour l’UE, mais ne nécessite pas de mesures spéciales car les États membres disposent d’alternatives pour y faire face, explique la « numéro deux » de la politique de santé de la Commission.

Cancer

Comme ce fut le cas pour la présidence tchèque, le cancer est une priorité pour les Suédois. « Nous devons faire davantage pour prévenir cette terrible maladie », a affirmé Mme Johansson.

La présidence organisera, en collaboration avec la Commission, une conférence sur le cancer à Stockholm le 1er février. Celle-ci portera sur la mise en œuvre du plan européen de lutte contre le cancer et sur la garantie de l’égalité des soins du cancer pour tous.

En outre, le diagnostic et les traitements avancés du cancer seront abordés lors d’une conférence de la présidence sur l’avenir des sciences de la vie en juin.

Cancer : la Commission européenne veut créer une base de données d'imagerie commune aux 27

La Commission européenne a lancé lundi son initiative européenne en matière d’imagerie sur le cancer dans le but de créer une infrastructure numérique commune aux 27 pour faciliter le partage de données sur la maladie.

Résistance aux anti-microbiens

La présidence attend actuellement les recommandations de la Commission en matière de lutte contre la RAM, dans l’espoir de les adopter lors du Conseil EPSCO de juin.

« Nous avons essayé de trouver des moyens d’utiliser des antibiotiques à spectre étroit, mais aussi de superviser l’utilisation des antibiotiques chez l’homme et l’animal et de s’assurer qu’il y a suffisamment de ressources humaines disponibles pour le faire et pour observer la situation au niveau clinique et dans la pratique », a déclaré Mme Forssmed.

La réunion des États membres sur la RAM est prévue les 6 et 7 mars à Stockholm.

Santé mentale et solitude

La Commission européenne devant présenter sa stratégie en matière de santé mentale d’ici la fin du mandat de la présidence suédoise, cette dernière prévoit de mettre en avant la question de la solitude.

« La solitude peut avoir un impact négatif sur la santé publique, sur la santé mentale, sur le bien-être de la population, ainsi que sur l’inclusion dans la société et la cohésion sociale », a expliqué M. Forssmed.

Il a également indiqué que la présidence espérait pouvoir profiter de l’échange d’expériences avec d’autres pays sur la manière d’aborder la question et sur les mesures qui permettent de lutter contre la solitude.

La stratégie européenne sur la santé mentale doit impliquer tous les acteurs, selon la commissaire à la Santé

La stratégie de l’UE en matière de santé mentale annoncée par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sera à l’ordre du jour l’année prochaine, a déclaré le Vice-président de la Commission européenne mardi.

Covid-19

Suite au changement de la politique de lutte contre la Covid-19 en Chine, les États membres de l’UE ont convenu, au début du mois de janvier, d’une approche coordonnée consistant à prendre des précautions. Les ministres suédois ont affirmé que l’une des priorités sera de veiller à ce qu’une approche coordonnée soit également suivie à l’avenir.

« La présidence suédoise est prête à faciliter et à promouvoir une approche coordonnée de l’UE si nécessaire, et nous surveillons les développements de très près », a déclaré M. Forssmed. Il a en outre fait remarquer que si les pays prennent des mesures différentes, « l’effet est très limité ».

Santé mondiale

La stratégie de l’UE en matière de santé mondiale, qui a été adoptée fin novembre, a pour objectif d’améliorer la sécurité sanitaire mondiale et de garantir une meilleure santé pour tous dans un monde en mutation.

« L’UE doit en faire davantage avec cette stratégie, en faire plus pour la santé mondiale », a expliqué M. Forssmed. Il a également indiqué que bien que l’objectif soit de promouvoir la santé, la stratégie a également une importance géopolitique.

LEAK : la Commission veut l’UE comme leader mondial en matière de santé

La Commission européenne souhaite que les États membres de l’UE jouent le même rôle décisif qu’ils ont eu dans la réponse mondiale à la pandémie de Covid-19 en reproduisant le rôle de leader de l’UE dans les enjeux sanitaires futurs.

[Édité par Anne-Sophie Gayet]

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