La Commission européenne a annoncé sa stratégie tant attendue sur le marché unique numérique. Au programme : droits des consommateurs pour les achats en ligne, droit d’auteur, protection des données, mais aussi extension du réseau et utilisation de techniques modernes dans l’industrie. Un article d’EURACTIV Allemagne.
Le 6 mai, la Commission a présenté son projet de marché unique numérique. Priorité de l’exécutif européen pour les années à venir, ce projet devrait garantir que l’Europe ne prend pas de retard sur le reste du monde à l’âge de l’Internet.
La stratégie comprend 16 mesures centrales qui devraient être mises en place d’ici la fin de l’année 2016. Le projet devrait permettre aux citoyens européens d’économiser jusqu’à 11,7 milliards d’euros par an et est construit autour de trois piliers.
« Cette stratégie n’est que le début, ce n’est pas l’objectif final », a expliqué le vice-président de la Commission chargé du marché unique numérique, Andrus Ansip. Il exhorte les Européens à accélérer le processus. « Les initiatives sont interconnectées et se renforcent mutuellement. Elles doivent être mises en application rapidement afin de promouvoir plus efficacement la création d’emplois et de croissance. »
Selon la Commission, le marché unique numérique pourrait « représenter une contribution de 415 milliards d’euros par an pour notre économie et créer des centaines de milliers de nouveaux emplois ».
Le commissaire en charge de l’économie et de la société numériques a indiqué que l’Europe était engagée dans une course pour rattraper certaines entreprises, notamment les entreprises américaines.
La fin du blocage géographique, « pratique discriminatoire injustifiée utilisée pour des raisons commerciales » est l’un des point principaux de la stratégie.
« 95 % d’Européens n’ont un jour pas pu accéder à un site d’un autre pays de l’UE ou ont été redirigés vers un site différent et plus cher », souligne le commissaire. « Nous savons que c’est un problème et nous devons y remédier. »
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Netflix
Au lieu de supprimer les pratiques discriminatoires du géo-blocage, la Commission se limite à proposer un équivalent à l’itinérance de Netflix, estime Julia Reda, eurodéputée du Parti pirate.
« Souvent, quand on tombe sur un message d’erreur qui dit ‘Cette vidéo n’est pas disponible dans votre pays’, cela concerne des vidéos financés par la publicité ou des fonds publics », explique-t-elle.
Pourtant, comme les mesures concrètes de la stratégie de la Commission ne s’appliquent qu’aux contenus payants, le géo-blocage restera un problème de tous les jours pour les Européens, regrette l’eurodéputée.
Andrus Ansip s’est exprimé en faveur de la suppression rapide du géo-blocage, mais Günther Oettinger s’était opposé à cette idée.
Au mois de mars, Andrus Ansip avait déclaré haïr le géo-blocage, ce à quoi Günther Oettinger avait répondu : « à cinq heure du matin, je hais mon réveil ».
Lors de la présentation du 6 mai, le commissaire en charge de l’économie et de la société numériques avait parlé de la coopération « incroyablement structurée en interne » et « essentiellement sans frictions » au sein de la Commission.
Une loi européenne sur le droit d’auteur
D’ici la fin de l’année 2015, la Commission espère avoir présenté une proposition législative pour une loi sur le droit d’auteur « moderne et plus européen[e]».
L’objectif est de « réduire les disparités entre les régimes de droits d’auteur et d’élargir l’accès en ligne aux œuvres dans l’ensemble de l’UE ».
Günther Oettinger a expliqué que la Commission cherchait un équilibre entre les intérêts des utilisateurs et ceux des créateurs, compositeurs, réalisateurs, journalistes et développeurs de jeux vidéo.
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Des changements au sein du secteur des télécommunications sont également prévus. Il s’agit de créer des critères européens de distribution des fréquences au niveau national, et des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs du marché.
Les fournisseurs comme Deutsche Telekom ne pourront ainsi plus limiter les nouveaux modes de communication, comme WhatsApp ou Skype.
Dans le cadre du marché unique numérique, la Commission examine également le pouvoir de marché des plateformes en ligne américaines, comme Facebook ou Google.
Afin d’assurer une concurrence équitable, la Commission se propose d’examiner l’absence de transparence des résultats de recherche et des politiques tarifaires, ainsi que la manière dont ces plateformes utilisent les informations qu’elles obtiennent.
Comme annoncé au mois de mars, l’exécutif européen a également lancé une enquête sur les pratiques anticoncurrentielles dans le secteur du commerce électronique par des entreprises comme le géant américain Amazon.
Une procédure séparée est actuellement en cours contre Google et pourrait couter plusieurs milliards de dollars au moteur de recherche américain.
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L’exécutif européen espère être en mesure d’analyser les résultats des différentes mesures d’ici la fin de l’année 2016. S’il obtient le soutien du Parlement européen et du Conseil, le marché unique numérique devrait être opérationnel le plus tôt possible. La question sera discutée lors de la réunion du Conseil européen des 25 et 26 juin.
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