Les eurodéputés ont atténué un certain nombre de propositions de l’eurodéputée du Parti Pirate Julia Reda sur la future réforme du droit d’auteur, en refusant notamment l’harmonisation des exceptions et en renvoyant la balle à la Commission sur le géoblocage.
L’harmonisation du droit d’auteur en Europe, tant redoutée par les ayants droit, n’a pas obtenu le soutien inconditionnel des eurodéputées.
La commission des affaires juridiques du Parlement européen a adopté le 16 juin par 23 voix pour et 2 contre une position sur la future réforme du droit d’auteur beaucoup moins radicale que la proposition initiale portée par l’eurodéputée allemande, Julia Reda, seule représentante à Bruxelles du Parti Pirate.
We won crucial votes on #geoblockling & libraries, lost on Freedom of Panorama & audiovisual quotation. Overall good #copyright report.
— Julia Reda (@Senficon) June 16, 2015
« Après des décennies d’introduction de nouvelles restrictions pour protéger les intérêts matériels des titulaires de droits, il s’agit de la demande la plus forte jamais faite pour restaurer l’équilibre des dispositions en matière de droit d’auteur et pour réduire l’incertitude juridique à laquelle sont confrontés aujourd’hui les Européens quand ils accèdent aux œuvres protégées par le droit d’auteur » s’est félicité l’eurodéputée.
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Plusieurs propositions formulées dans le projet initial du rapport de Julia Reda ont été adoucies dans la version finale, sous la pression des représentants des titulaires de droit et de certains pays, France en tête, très protectrice de son système de droit d’auteur.
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Parmi les propositions écartées par les eurodéputés figure l’harmonisation totale des exceptions et des limitations du droit d’auteur. Les États membres conserveront ainsi le droit de légiférer en fonction de leurs intérêts culturels et économiques.
Harmonisation plus limitée
Pour les eurodéputés, ces exceptions ou limitations – qui recouvrent par exemple le droit de citation – pourront donc être fixées par chaque État membre. Autre rétropédalage, la réduction de la durée de protection des droits à 50 ans après la mort de l’auteur contre 70 actuellement évoquée par le rapport Reda est aussi passée à la trappe. Les eurodéputés ont par ailleurs rappelé la nécessité de se conformer à la Convention de Berne, qui fixe la protection du droit d’auteur à 50 ans minimum après la mort de l’auteur.
« Le rapport a échoué à reformer des problèmes centraux dans les droits d’auteurs » selon l’organisation European Digital Rights (EDRI), qui déplore notamment l’absence d’harmonisation des exceptions et des limitations du droit d’auteur.
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« Ces propositions, dangereuses pour la pérennité et la vitalité de la création en Europe, ont heureusement été battues en brèche » s’est félicité l’eurodéputée Virginie Rozière (S&D).
Timide sur le géoblocage
L’épineuse question du géoblocage, qui faisait craindre à beaucoup une remise en cause de la territorialité du droit d’auteur au sein de l’Union européenne, a également été adoucie dans le texte final. Les élus européens ont choisi de maintenir le principe de territorialité, « qui permet à chaque État membre de garantir le principe d’une rémunération équitable ».
Tout en renvoyant la balle à la Commission européenne, afin qu’elle propose une meilleure accessibilité transfrontalière des contenus protégés par le droit d’auteur pour les consommateurs, notamment lors de la présentation de la réforme prévue fin 2015.
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Liberté de panorama
La commission a également adopté un amendement qui supprime le « droit de panorama » proposé par Julia Reda. Une décision que l’auteur du rapport a regrettée à l’issue du vote. Ainsi, les photographes ou reporters amateurs seraient soumis à l’obtention de l’autorisation des titulaires de droits des œuvres, principalement architecturales, s’ils souhaitent partager leurs clichés sur les réseaux sociaux.
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Le rapport de Julia Reda doit être voté en session plénière le 9 juillet. Avant que la Commission européenne ne dévoile sa proposition définitive de modernisation du droit d’auteur d’ici la fin de l’année.